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Mes respects, Madame Defonseca.

Trop, c’est trop… j’ai ironisé sur ce blog en réaction à un comportement typique d’avocat, à Maître Uyttendael, à propos de sa cliente Misha Defonseca (« Survivre avec les loups ») une œuvre que l’on croyait autobiographique et qui n’était que de fiction.
Elle s’en est finalement confessée
Le cher Maître est resté avec ses gros mensonges de prétoire sur les bras, l’air ridicule et ma conviction qu’il fait un drôle de métier.
On a déjà vu pire en littérature. Ceux qui pratiquent le compte d’auteur savent le parcours du combattant pour être édités par un vrai éditeur, plutôt qu’un marchand de papier. Ils sont prêts à tout pour être consacrés écrivains. C’est dans l’édition et le show-biz que se trouve la plus belle collection de menteurs qu’on puisse rêver.
L’important reste le récit, la façon dont il est présenté et s’il offre un quelconque intérêt littéraire.
Je n’ai pas lu l’ouvrage et de toute manière ce n’est pas mon propos.
Les charognards de la grande presse sentant le bon filon pour ramener des abonnements ont découvert un autre pot aux roses. Et autant, l’interprétation des journaux du pathétique dans la vérité psychologique de Defonseca-De Wael pouvait prêter à sourire, autant l’instinct fouille-merde pour ce qui suit est parfaitement dégueulasse.
Je cite :
« Le Soir » apporte de nouvelles révélations qui démontent définitivement la fausse « autobiographie » racontée par Misha Defonseca dans son livre « Survivre avec les loups » et le film éponyme réalisé par Vera Belmont. Son père, Robert De Wael, a vendu des résistants à la Gestapo. ».
Et de poursuivre comme fait indiscutable :
« La plaque commémorative aux agents communaux de Schaerbeek tués par les nazis. Le nom effacé était celui de Robert De Wael, le père de Misha Defonseca. ».
Pour bien enfoncer le clou d’une affaire vieille de 67 ans, ces journaleux sont allés jusqu’à faire le siège des maisons de retraite, pour ouïr des témoignages.
C’est ici que maître Uyttendael pourrait ressortir des trémolos et remettre les choses dans leur contexte.
De Wael fut arrêté en septembre 1941 par la gestapo et est mort en déportation en 1944. Probablement sous la torture, il a donné les noms de ses camarades du Groupement Grenadier. Les fientes de rédaction ont préféré écrire « vendu ». Vendu contre quoi, puisqu’il est mort dans un bagne nazi ?
C’étaient les mêmes vautours qui devaient planer autour des bûchers de sorcières au Moyen-âge.
Ce destin est pathétique, finir comme un lâche, alors qu’il aurait pu finir en héros ! Qui peut dire aujourd’hui parmi la faune journalistique du « Soir » la graine de héros qui résisterait à la torture, sans donner des camarades en situation de résistance à l’ennemi ? Oui, il y en eut. Oui, c’est magnifique ! Et les autres alors ? C’est quoi ? Il n’y aurait donc pas de place entre le héros et le salaud ?
Et les trafiquants du marché noir, les ouvriers de la FN, les calotins qui priaient pour que l’Allemagne vainque les Rouges, les attentistes, les pleutres et les Dupont-la-joie, c’étaient des quoi?
Car, en 1941, nous étions en temps de guerre, sale temps et sale Occupant, et il y avait très peu de Résistants. A cette époque, la plupart des Belges étaient léopoldistes, avec eux presque tous les industriels, tous prêts à collaborer pour la grande Europe du fou.
Au moins, lui, De Wael, eut l’idée de résister, d’opposer sa frêle personne de fonctionnaire de mairie, aux Verts de gris. Combien de grands-pères glorieux et hardis comptent aujourd’hui les scribouillards du Soir ?
Et puis les choses ne vont pas toujours comme on le souhaite. Grande gueule ou pas, De Wael recrute. Pour faire quoi ? Il n’en sait rien. C’est un petit fonctionnaire qui passe le plus clair de son temps derrière un bureau à gratter du papier, qui rentre chausser ses pantoufles près de sa femme. Mais, par rapport à la race moutonnante et résignée, il écoute Radio Londres et se dit qu’il faut faire quelque chose, que l’on ne peut pas accepter cette Occupation. Comme beaucoup à cette époque précoce dans une Résistance qui se cherche, il est peu méfiant, avec un rien de prétention à vouloir tout savoir quand il ne sait rien. Il bricole un réseau. Cela a été dit, c’est une grande gueule, un imprudent.. Il se fait prendre, comme un amateur, qu’il est. Alors, il tombe dans les rets de la force barbare qu’il croyait vaincre et qu’il a sous-estimée. Le voilà aussitôt confronté à la cruauté et à la bestialité.

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Il tombe, mais le monde ne s’arrête pas de tourner.
Les nombreux léopoldistes s’arrangent avec l’ennemi et vivent comme ils peuvent. Lui est en prison. A défaut d’autres formes de courage, il a eu au moins celui de s’opposer, un temps, au nazisme. Les autres dont les descendants sont fort prompts à le juger aujourd’hui, ne font rien. Plutôt si, ils travaillent à l’effort de guerre allemand. Oh ! pas tous de façon directe. Il y en a même qui trouveront le moyen de sortir la tête haute et décorés de cette abomination qu’est la guerre. Les exploits supposés sont légion !
Les patriotes feront marteler le nom de De Wael de la plaque commémorative de Schaerbeek, comme s’il n’était pas mort en déportation, peut-être plus accablé par son destin que les purs héros !
La peur de mourir sous la torture l’a fait craquer. Il commet l’ignominie de dénoncer ses camarades, mieux, ceux qu’il avait recrutés et qui lui avaient fait confiance !...
Il mourra après trois ans d’enfer et avec la conscience d’être un lâche dans un camp de concentration et sa femme avec lui, victime expiatoire et innocente.
Pauvre petite fille, Misha, sans parents et si jeune !
Quand elle a su le malheur qui frappait ses parents, peut-être que Madame Defonseca s’est inventé un autre destin, plus glorieux, plus romantique ?
Belle plaidoirie pour un bon avocat, hein Uyttendael ?
Quant à moi, j’assure madame Defonseca-De Wael, de mon profond respect.

Commentaires

Bravo, Richard!

Je découvre donc le fond réel de cette histoire grâce à vous.
Merci pour cette réhabilitation.


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