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Le gâtisme volontaire.

Ce titre a été repris d’un ouvrage écrit il y a onze ans par Georges Sebbag, spécialiste du surréalisme. Cela se borne à cet emprunt délibéré.
Nous sommes dans ce gâtisme volontaire depuis trente ans, sans que la plupart d’entre nous en aient conscience.
C’est une forme de vie qui se défend. Elle consiste à s’isoler avec les moyens dont on dispose. On se fabrique une tour d’ivoire pour s’y réfugier et prendre les plaisirs que l’on peut.
Un inconvénient : si vous ne vous intéressez pas aux autres, ceux-ci s’intéressent à vous de mille manières.
En Belgique le gouvernement que Di Rupo tente de former, ne nous ignorera pas longtemps. Fin du mois, nous serons fixés. La marche vers des abîmes programmés est plus que probable. Elle finira par rattraper aussi les contemplateurs de leurs doigts de pied, très nombreux sous ce climat.
Vous allez me dire « Qu’est-ce que ça change ? Y pouvons-nous quelque chose ? ». La deuxième question règle la première. Oui, nous pouvons quelque chose – ne serait-ce que regarder les choses avec lucidité - cela pourrait les faire changer.
Par exemple, l’hallucinante question de la fin des réserves mondiales en gaz, charbon, pétrole, plus ou moins étalée entre 50 ans pour le pétrole et 300 ans pour le charbon, comment se fait-il que les journaux font leurs manchettes ces moments-ci de l’augmentation des prix de l’essence, sans rappeler que la génération suivante devra s’en passer et qu’en attendant, ce qui est rare, est cher et que la spéculation n’est pas responsable de tout ! Lié à cela, comment peut-on faire l’impasse sur l’expansion continue de la race humaine qui en est actuellement à 7 milliards d’individus, alors que chauffer, éclairer, transporter tout le monde, cela sera impossible ?
La liberté et l’égalité pour tous, ne sont-elles pas déjà mises à mal parce que nous nous sommes désintéressés de ce problème récurrent ? N’avons-nous pas applaudi à des discours criminels selon lesquels même à 12 milliards, notre mère nourricière, la Terre, pourra le faire moyennant quelques arrangements !
La réponse est simple : le grand public en plein gâtisme volontaire, ne veut pas de ces informations complémentaires, en dehors de celles déjà troublantes des hésitations de nos responsables au sujet de notre sort immédiat.
André Breton ne voyait que trois alternatives à la destinée : A) la mort (Gérard de Nerval) ; b) le gâtisme involontaire (se prendre au sérieux : Malraux) ; c) le gâtisme volontaire (finir dans le commerce comme Rimbaud). Trop peu lucide pour les deux premières attitudes, le public a choisi en masse la troisième. Cependant, il est rare d’amasser une fortune et encore plus d’écrire comme Rimbaud.
Cette attitude offre l’avantage que le temps entre la prise de conscience et le fait accompli est très court. L’inconvénient, c’est la fatalité qui accable l’habitant de la tour d’ivoire qui poussé par la nécessité, mettra, tôt ou tard, le nez dehors.

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Voilà un an et demi que les citoyens se sont habitués à l’absence de gouvernement. Ils se réveilleront dans quinze jours avec les brodequins et la poire d’angoisse actionnés par Di Rupo, comme au Moyen-âge. Il nous fera les poches en nous jurant que c’était nécessaire et que cela ira mieux demain. Nous ferons semblant de le croire et nous ne voudrons pas voir la misère qui gagne !.
Au niveau international, nous ne valons guère mieux. Avec notre complicité, Israël réduit depuis vingt-trois ans, cinq millions de Palestiniens à l’esclavage. Pensez-vous un seul instant que Netanyahou veuille la paix et un accord ? Alors qu’il poursuit l’occupation des Territoires par l’implantation des colonies en Cisjordanie, jusqu’à ce que l’Etat juif annexe toute la Palestine ?
La révolution du Maghreb qui allait soi-disant ouvrir ces pays à la démocratie nous prouve le contraire avec l’avènement en Tunisie et en Libye du parti islamiste, suivant ainsi l’exemple de l’Egypte.
Nous nous ruons sur les articles chinois, alors que nous savons qu’ils sont moins chers à cause du bas prix de la main-d’œuvre, que cela a ruiné notre économie et qu’on nous recommande de les imiter.
Qu’à cela ne tienne, nos politologues vous diront que notre démocratie se transforme et que de cette transition découlera un réel progrès.
Toujours sous l’effet des subprimes depuis l’effondrement de 2008, les partisans du gâtisme volontaire ont eu trois ans pour vérifier si les mesures proposées par Merkel et Sarkozy (ne parlons pas d’Obama) allaient être appliquées à l’Europe. Ils n’ont rien vérifié et ne savent pas que rien n’a été fait.
L’univers libéral est à la dérive, le néolibéralisme est en train de ruiner notre société.
Avec ou sans Di Rupo, avec ou sans Alexandre De Croo et ses exigences, nous n’échapperions à la machine à broyer qu’à condition de bouleverser notre mode de vie, le gâtisme volontaire ne saurait l’admettre.
Les menteurs sont toujours au pouvoir. Ils comptent bien s’y accrocher. Notre mode de vie va changer, mais ce sera à notre corps défendant.
Nous faisons le contraire des ours, nous avons hiberné l’été, ça va être le moment de s’apercevoir qu’un million de personnes auront froid cet hiver en Belgique… enfin quand j’écris « nous », il faut relativiser. Ceux qui ont placé des doubles vitrages à leur tour d’ivoire, ne s’en apercevront pas. Ils séjournent toujours dans le gâtisme volontaire.

Commentaires

C'est fatigant de toujours se battre contre des moulins à vent, sachant que toutes les décisions se prennent au niveau européen, voire mondial...Nous ne sommes plus au 19ème s où on savait à qui on s'adressait dans les revendications. Tout cela se joue au-dessus de nos têtes, même di Ruppo n'est qu'une marionette.

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