« La bijoucratie de l’Humble. | Accueil | Un jeudi noir ? »

La bêtise et le gaz…

…sont à tous les étages.

Ça va être dur de lutter contre la déferlante sentimentale, Hakima Darhmouch avait une larme à l’œil en évoquant l’enfance misérable du héros, qui, devant elle, se rengorgeait en toute humilité. Pour le doux chant de la sirène de RTL, Elio Di Rupo semblait ne pas avoir d’acouphènes.
La vraie gauche va avoir besoin de toute sa lucidité pour ne pas sombrer avec la fausse gauche dans la distribution du pain d’épice à la trêve des confiseurs. Période particulièrement délicate où nous entuber est plus facile pour les escrocs qui nous décapsulent aux sentiments.
La bêtise n’est pas qu’une certaine incapacité de raisonner juste. Elle fait aussi la chasse à tout autre raisonnement que le sien et estime ne jamais se tromper. En politique, elle promet un avenir bien meilleur que celui vécu, et pour cause, la bêtise ne l’est pas autant qu’on le croit, puisque celui qui en est pétri voit bien l’état dans lequel la société se trouve au présent, dans la plupart des cas, c’est lui qui l’y a mise.
Comme elle est universellement répandue et touche pratiquement tout le monde, personne ne peut s’en exclure et, ce faisant, l’observateur jette un œil sévère sur la perle de la démocratie : le suffrage universel.
Guy Hermet, l’auteur d’un livre sur la démocratie (1), au paragraphe « Les gouvernants doivent-ils ressembler aux gouvernés ? » pense « qu’il n’y a nulle nécessité que ses chefs ressemblent au peuple ». Et il ajoute, sans mesurer les conséquences de ce qu’il écrit, « La prudence conseille même l’inverse ». Il ne nous cache pas que pour lui, les gouvernants « s’en distinguent par l’intelligence, les capacités héritées et acquises… ». Il tient, par conséquent, le peuple en piètre estime, ce qui, pour quelqu’un qui fait l’apologie de la démocratie, est assez consternant de bêtise.
Elio est dans le cas inverse. Il fait croire que, ce qu’il a est dû au mérite et que son apogée vient d’un périgée et y retourne. Faussement modeste, il conforte la rombière de la Saint-Nicolas des vieilles méritantes, de lui faire confiance. Ce qu’elle fait sans plus réfléchir. Même si devant Darhmouch, il a vendu la mèche, puisque son équipe c’est la philosophie tout entière du PS « centre à centre ». L’homme a réussi le tour de force de faire disparaître complètement la gauche !
Universellement partagée, les effets de l’ankylosante nature de la bêtise n’épargnent personne.
Elle défait sous cape les grandes idéologies et à force de persévérance, elle assure la stabilité de la démocratie.
En aparté, tout le monde s’accorde sur la médiocrité et l’opportunisme de nos représentants aux affaires du pays. Sur la scène publique, il n’y a pas d’éloges des journaux qui ne flattent plus les nouveaux ministres. Nous-mêmes n’en sommes pas avares.
Nous les avons choisis pour exercer leur pouvoir sur nous, sans que nous ayons ratifié les prérogatives qu’ils ont acquises par des votes anciens que nous n’avons pas faits ! De sorte que la démocratie s’exerce sur des critères qui ne sont pas les nôtres et que nous n’entérinerions pas, par des hommes dont nous vantons les mérites sans les connaître.
C’est ainsi que plus la bêtise est partagée, plus elle remplace toute forme d’intelligence.
On n’en finit pas avec la bêtise, sans tricher.
Nous nous résignons à faire les sots, en pensant qu’à l’échelon supérieur, il en est de plus sots que nous.
Nous voyons bien que nous allons vers des désastres en poursuivant une règle économique que nous n’imaginerions plus aujourd’hui à la lumière des faits, mais nous sommes tout heureux d’apprendre par le premier venu que nous nous trompons et que moyennant quelques efforts, nous allons repartir de plus belle vers nos sottises anciennes que nous regrettons déjà.

69000b.jpg

L’affectation de simplicité dont fait montre l’immense infatuation de lui-même de Di Rupo, nous fait glousser de plaisir chaque fois que cet homme en prenant une décision majeure et qui va toucher chaque citoyen, nous la livre « en toute modestie ». Alors notre sottise nous dupe sur le caractère de simplicité de l’homme, et nous finissons par la croire et le croire.
Il n’y a pas pire qu’un sot convaincu par sa sottise, parce qu’il l’est ainsi doublement.
La bêtise ne peut exister que « dans une société où la médiocrité et la méchanceté se portent bien. Dans ce monde d’apparence, il lui suffit de se montrer comme marque d’esprit, de lucidité supposée pour faire tout le mal possible (2). »
« Il y a des moments dans la vie où la question de savoir si on peut penser autrement qu’on ne pense et percevoir autrement qu’on ne voit est indispensable pour continuer à regarder ou à réfléchir (3). »
Camarades socialistes, se poser la question « mon camp a-t-il toujours raison ? », c’est y répondre. Selon toute apparence la réponse est déjà moins sotte que la question ; sauf si elle confirme que la raison est unilatéralement de votre côté.
Dans cette dernière hypothèse et qui est la plus vraisemblable, vous connaissant, agissez donc sans moi. Le temps presse.
----
1. Dominos, Flammarion édit.
2. Michel Adam, Essai sur la bêtise, in édit. « La Table Ronde », 2004.
3. Michel Foucault, L’usage des plaisirs, in édit. « Gallimard », 1984.

Poster un commentaire