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À l’exception des autres…

En France, quand l’à-peu-près de démocratie n’est pas suffisamment souple, autrement dit, quand la démocratie telle qu’elle a été imaginée sous la 5me république devient gênante, le gouvernement a recours à l’article 49-3.
L’article 49-3, de la Constitution de 1958 , dispose que : « Le premier ministre peut, après délibération du conseil des ministres, engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la Sécurité sociale. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. »
Comme les partis politiques belges ne sont traversés d’aucun courant, le 49-3 serait donc inutile chez nous, puisque le principe belge est l’alignement pur et simple de la majorité parlementaire sur le programme du gouvernement, en général conduit par un seul homme : le chef. Seule l’ambition d’un chef de parti allié pourrait faire tomber le château de cartes.
On l’a bien vu lors de la guerre entre le clan Michel et le clan Reynders à la suite de quoi il y eu un échange de chef, Reynders, l’ancien chef, est resté dans la famille libérale et intégré dans le gouvernement minoritaire des francophones de Charles Michel. Les « trublions » se sont dissous dans l’ambiance « progressiste » libérale. Il faut dire que Didjé n’avait pas fait que des amis.
En France, les partis sont divisés en interne, surtout le PS au pouvoir avec ses frondeurs.
L’utilisation du 49-3 a été critiquée à maintes reprises, notamment par François Hollande, qui déclarait en 2006, alors qu’il était premier secrétaire du Parti socialiste : « Le 49-3 est une brutalité. Le 49-3 est un déni de démocratie. »
La méthode belge consiste à prendre des mesures aussi impopulaires, à entendre la gueulante des partis d’opposition et à faire voter par la majorité en gardant le profil bas dont Charles Michel est le prototype par excellence, ni l’opinion des électeurs souvent le reflet de celle de la rue, ni les syndicats n’ont à voir dans la décision du chef.
Devant le scepticisme des populations sur l’efficacité des gens qu’ils ont élus et sur le respect des programmes qui les ont fait élire, certains se demandent si la démocratie n’est pas confisquée par un petit groupe de privilégiés ?
Et de fait, quand on reprend la liste des élus des partis, se détache une certaine filiation en continuité du père au fils ou à la fille, pour la transmission des postes clés et des mandats parlementaires ce qui fait dire à certains que la démocratie est confisquée.
L’effondrement des régimes communistes en 1989 sembla vider la question de la démocratie, elle n’avait plus de concurrence et donc plus de comparaisons possibles avec tout autre régime.
Francis Fukuyama (La fin de l’histoire) avait raison : la démocratie fermait l’horizon. Ainsi devenait obsolète la boutade de Winston Churchill : « La démocratie est le pire des systèmes... à l’exception de tous les autres. », puisqu’il n’y en avait plus d’autres, sinon des fantômes, comme la Corée du Nord.

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Et pourtant, de plus en plus nombreux sont ceux qui dénoncent ce système comme une imposture. Le 49-3 le rappelle aux Français. Le système win/win belge, nous le rappelle aussi. En Europe, l’apparition de 20 millions de sans-emploi et de 50 millions de pauvres repose la question... Comment peut-on parler d’une démocratie qui exclut au bas mot deux cent millions de personnes, si on y ajoute les bas salaires ?
Est-ce faire du populisme façon Gerlache en refusant d’accepter une telle chute de notre société. Est-ce pour ne pas en convenir que l’on se jette dans un espoir de croissance capable d’éponger durablement l’hémorragie sociale de ces millions de personnes ?
Sait-on que cette démocratie marche à grand pas vers un tiers-monde universel ? Selon l’ONU et la Banque mondiale : « Au Royaume-Uni, les inégalités entre riches et pauvres sont les plus importantes du monde occidental, comparables à celles qui existent au Nigeria, et plus profondes que celles que l’on trouve, par exemple, à la Jamaïque, au Sri Lanka ou en Ethiopie. »
On comprend les partisans du Brexit, mais cette lamentable conception de la démocratie nous pend sous le nez aussi.
Tandis que se lézarde la cohésion sociale, la classe du dessus du panier va s’épanouissant.
Tout cela dans un cadre économique où triomphe la finance.
Ce serait peut-être le moment de mitiger les grandioses citations et les superlatifs d’une démocratie dont il devient urgent de fouiller dans « l’exception de tous les autres » afin de trouver mieux.

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