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Attendez-vous à savoir…

Il fallait s’y attendre, dans la perspective d’un gouvernement PS-N-VA, Bart De Wever prend les devants. Puisque l’excuse ne sera plus économique après l’échec de Charles Michel (ce qui ne veut pas dire qu’on changera l’économie néolibérale), elle portera sur l’immigration et le communautaire.
C’est malin de sa part. Après le 26 mai, Di Rupo se trouvera devant un dilemme, négocier sur l’immigration pour mieux progresser sur le communautaire, comme si de rien n’était.
Pour tout dire, l’Anversois sait bien que l’immigration sera de toute façon contenue. Les lois belges et les décisions européennes dans le sens d’un renforcement de la surveillance des frontières, le pacte honteux avec Erdogan faisant de la Turquie un camp de concentration, on est paré.
Il peut donc faire semblant de lâcher du lest. 2.100 € de revenu net d’une famille, pour avoir le droit de rapatrier des enfants d’immigrés établis en Belgique. Le président de la N-VA sait bien que cette concession ne remplira pas les salles d’attente de Zaventem.
Di Rupo aura ainsi l’occasion de faire savoir à sa troupe d’électeurs de première génération que des progrès ont été accomplis sur l’immigration grâce au socialisme. Quelques concessions supplémentaires plus loin, De Wever lui laissera le bénéfice de la qualité d’accueil améliorée, dans le projet du nouveau gouvernement.
La vaseline appliquée bien onctueuse, on entrera dans le réel. La N-VA remet le thème de la compétence des Régions à l’ordre du jour. C’est un programme modéré qui prend à contre-pied le Vlaams Belang, mais personne ne sait ce que cette modération réserve de modifications au pays.
Bart De Wever pourrait très bien remuer chez les socialistes le souvenir du Mouvement Populaire Wallon qui aurait applaudi à la fin de la Belgique, si les socialistes l’avaient voulu dans les années soixante. La génération qui a fait carrière au PS et s’est enrichie sur cette renonciation a disparu, avec son dernier représentant Philippe Moureaux. Les successeurs sont-ils toujours heureux d’avoir renoncé à l’indépendance de la Wallonie alors que ce sont leurs aînés qui ont vécu sur le prix de leur trahison ?
C’est sur cette idée qui semble bizarre aujourd’hui à la plupart des Wallons qui ont oublié la vague indépendantiste de 60, que Bart De Wever pense ramener petit à petit le social-libéralisme francophone à un confédéralisme tout sucre tout miel, pour ne pas faire peur.
Carl Devos, politologue à l’Université de Gand : « …on en viendrait à oublier que le gouvernement est tombé sur la question migratoire. Le thème a été remplacé par le climat et le pouvoir d’achat… la migration ne fera plus reparler d’elle avant quelque temps ».

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Quoi de mieux que raviver le nationalisme ? Pas tant pour remiser l’immigration au fond d’un placard, que pour faire oublier que le programme économique de Michel ne conduit qu’à une poussée d’urticaire sur le social que Bart De Wever veut éviter, avec ce qui est assez curieux, l’approbation de Di Rupo lui-même qui craint que s’embarquer sur le pouvoir d’achat, c’est se faire battre d’avance par les arguments du PTB.
Reste donc le communautaire, cqfd.
De Wever fait de la corde raide avec le Belang. S’il se montre trop radical, les électeurs du centre passent illico chez Alexandre De Croo.
Carl Devos : « De Wever a changé son fusil d’épaule et verrait d’un bon œil, sur le plan national, une coalition « bourguignonne » (sp.a, Open VLD et N-VA). Il a donc tout intérêt à ne pas se rendre infréquentable pendant la campagne. »
Vu ainsi sur le plan national, il va de soi que le PS de Di Rupo a sa chance.
L’immigration remise au placard, c’est aussi pour Theo Francken au sein de son parti un coup qui le ferait redescendre loin derrière son leader, lui qui se croyait déjà calife à la place du calife.
De Wever aurait profité de l’affaire Kucam (ce membre de son parti, ami de Francken, qui aurait monnayé au prix fort des visas humanitaires).
Reste à établir un programme de la reprise du chemin du confédéralisme. De Wever a sa petite idée.
Nous allons vivre une législature bizarre. Rien ne sera fait sur les deux modifications essentielles à savoir le social et l’écologique. Quoi de mieux que les socialistes pour orchestrer cela. Tout convergera vers un confédéralisme qui aura le chic de faire croire que c’est mieux pour tout le monde et pour l’économie libérale. Comme de bien entendu, cette politique sensiblement la même que celle de Charles Michel ne profitera qu’à la bourgeoisie de haut niveau, comme toujours. Mais ce sera l’occasion pour le MR de crier au scandale, comme d’habitude.
Reste une petite formalité : les élections. Les instituts de sondage sont formels : dans la piste aux étoiles, il y en aura peu de nouvelles. C’en est au point qu’on devrait faire l’économie des urnes et se fixer sur le choix des sondages. Le temps des algorithmes est venu, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ni Michel, ni Di Rupo, ni Bart De Wever sont des robots, ce sont des images subliminales dont le projectionniste nous est inconnu.

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