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La presse en voie de disparition.

Les syndicats du groupe Vers l’Avenir se sont dits inquiets du projet du groupe de presse VUM de délocaliser les activités du Centre d’Impression de Rhisnes vers le site de la VUM à Grand-Bigard. (les journaux)
La presse se rétrécit comme une peau de chagrin en Belgique. C’est une des conséquences du désintérêt de la lecture en faveur de l’image télévisuelle et électronique. Résultat, c’est une pluralité de l’opinion pour une démocratie digne de ce nom qui n’y trouve pas son compte.
Autrement dit, avec les disparitions des titres et les concentrations de ceux qui restent, c’est la pensée individuelle et collective qui s’abstrait de la lecture et des lecteurs.
Dans la bataille de crabes qui s’engage entre les survivants et les disparus, ce n’est pas l’actionnaire Machin qui perd des plumes pour le triomphe de Chose, ni le Journaliste Fend-la-Bise qui se retrouve prépensionné, ce n’est pas non plus en l’occurrence, l’évêché de Namur qui va rétrocéder ses parts du groupe vers l’Avenir à la VUM qui veut concentrer sur son site de Grand-Bigard les activités de Rhisnes, c’est la responsabilité citoyenne de nous tous qui s’amoindrit à cause de la moindre diversité d’expression, même si dans le cas présent, il ne s’agit que de concentrer des moyens techniques ; mais, on sait bien qu’un problème résolu en amène un autre.
Car, nous savons depuis les années quatre-vingts que la technique et le contenu de la presse sont étroitement imbriqués dans des pouvoirs qui, du moment qu’ils convergent et se concentrent, finissent par uniformiser l’information et par conséquent altérer les moyens critiques.
Pour ne prendre que le cas de Liège, se souvient-on encore du nombre de journalistes qui étaient à pied d’œuvre tous les jours quand La Gazette de liège, La Meuse et La Wallonie avaient chacune une rédaction rivale des autres ?
Indirectement, cette rivalité permettait la différence de ton et d’opinion, augmentait la garantie d’une information recoupée et des faits vérifiés. Nous avions des chroniqueurs spécialisés de qualité dans les nouvelles internationales, judiciaires et politique.
Tout cela a disparu. Les informations internationales sont téléchargées, les colorations politiques se sont fanées pour ne tirer que sur le rose et le bleu pâle du centrisme bourgeois, seuls les faits-divers locaux voient survivre un petit nombre de journalistes souvent surchargés et fort en peine d’écumer la Région avec assiduité.

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Si bien qu’une confusion des valeurs s’est installée. La politique ne s’analyse plus. Le ton s’est uniformisé. Tout cela créant une sorte de toboggan, moins c’est « bon », moins a-t-on de lecteurs.
Les jeux d’érudition à la télévision ont remplacé le rappel historique dont étaient capables les journaux ; comme si connaître les dates des événements de l’Histoire dispensait d’en apprendre davantage. Les informations et les débats télévisés puisés à la même source ne se complètent pas, d’une chaîne de télé à l’autre, ils font tout simplement double usage.
Les sommes dépensées dans ces nouveaux moyens d’information sont de loin supérieures à l’entretien des imprimeries et au maintien des journalistes. Ces derniers informaient mieux et plus sérieusement que les premiers.
On pourrait croire que les commanditaires de l’information d’aujourd’hui n’investissent pas à perte et que l’opinion bien apaisée, bien centriste, est enfin limitée à ce qu’ils veulent bien qu’elle soit.
C’est faux. L’opinion risque d’échapper un jour à tout contrôle à force de vouloir la rendre insignifiante.
La Presse écrite est toujours, jusqu’à preuve du contraire, la meilleure façon d’informer un large public. Il s’agit de la sauver des sots qui veulent sa perte. Il s’agit, comme nous subventionnons les services publics, de subventionner la presse écrite de manière telle qu’elle ne doive aucun merci à personne.
Si une rotative coûte 25 millions d’euros et qu’il en faut trois pour la Wallonie, faisons l’effort de nous en pourvoir, quitte à les gérer en coopérative, en veillant à ce que les rédactions restent indépendantes du pouvoir.
Ce n’est pas un investissement à fonds perdu, c’est un investissement d’avenir pour notre jeunesse.

Commentaires

Le phénomène a probablement deux origines :
- Le choix de la "facilité". Il est plus facile de voir des images que se "fatiguer" à lire un texte. Pour l’achat d’un livre, la préférence accordée, par les plus jeunes générations, aux bandes dessinées confirme cette tendance à la facilité.
- le coût croissant de la presse. Dans une société qui s’appauvrit, toute économie est bonne à prendre. On réduit les dépenses qui sont jugées moins importantes, comme l’achat de journaux. Du fait des moindres ventes, les journaux sont obligés d’augmenter leurs tarifs, ce qui entraîne, par un effet de boule de neige, une nouvelle diminution des ventes.

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