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Conservatoire du conservatisme.

-C’est stupéfiant !
-Vous trouvez ?
-Superbe !
-Ah bon !
-Vous avez vu la salle ?
-Bien sûr, j’étais à côté de vous.
-Alors qu’est-ce que vous en dites ?
-Ce sont toujours les mêmes.
-Comme ils étaient enthousiastes…
-Cette manie qu’a le chef d’entrer, de sortir, d’entrer et ainsi de suite, suivi de la soliste.
-C’est la tradition.
-J’ai reconnu le type qui ouvre et qui ferme les portes à la Ville.
-On peut être portier et mélomane.
-Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire. Je me suis fait la réflexion qu’il avait eu des places gratuites.
-Vous trouvez que c’est cher payer le soutien aux « Petits sapins ardents » de la Cité du même nom ?
-Quand même. La boutonnière à dix euros, plus l’entrée. Ce n’est pas donné.
-Quand c’est sublime, ça n’a pas de prix.
-Parlez pour vous qui veniez pour que l’échevin de la culture vous remarque.
-Il n’était pas là.
-Il n’aimerait pas la musique ?
-Pensez-vous, le plus cher budget de la Ville ! Vous voyez ce parterre ? Les notables… et Daniel Barenboïm au pupitre. C’est exceptionnel.

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-Je me suis endormi !
-Je le sais, je vous ai donné un coup de coude pour vous réveiller.
-Je n’ai pas compris. La soliste est Chinoise ?
-Marina Poplavskaya, vous trouvez, un nom pareil ?
-Et Pomakov qui n’est pas resté jusqu’à la fin.
-Forcément. Il n’a interprété que deux extraits en duo.
-Non, vraiment. Je ne comprends pas.
-Vous ne comprenez pas quoi ?
-Que l’on puisse tomber en pâmoison pour ça.
-Je vous le concède, il y a une sorte de rituel qui peut irriter un néophyte. Mais un mélomane averti ne peut qu’être émerveillé.
-Justement, j’ai vu dans la salle Jean-Marie Averti. Vous n’allez pas me dire qu’il paie sa place ?
-Bien sûr que si. Il s’est reconverti critique.
-Vous avez lu ses articles ?
-Ils sont bien faits.
-Ils ne tarissent pas d’éloges. C’est d’un bourgeoisisme chiant ! Je l’ai connu tout jeune plus à gauche…
-Qu’est-ce que la gauche vient faire dans la critique ?
-Il a évolué.
-Tout le monde évolue, mon cher.
-Ainsi vous, que ne feriez-vous pour placer vos sonnets !.
-Ne recommencez pas avec ça.
-Avouez que la musique, dans le fond, vous vous en foutez, comme Jean-Marie Averti. Lui, c’est pour jouer un rôle dans la vie mondaine. Vous, c’est pour le prix « jeune poète ». Vous savez bien que cette année ce sera Proutskaya et que l’année dernière, c’était Rizembard. Vous souhaiteriez changer les choses ? Vous n’ignorez pas que c’est impossible. Tout est connu d’avance, truqué, vendu. Et savez-vous pourquoi ?
-Non !
-Parce que ces gens n’y connaissent rien, en musique comme en poésie, et même en peinture. Or, pour cacher leur inculture, voire leur goût exécrable, ils passent leur temps à consacrer des gens qui le sont déjà par d’autres qu’eux. C’est plus sûr…
- L’organiste de Saint-Jacques ? Séraphin Droitfil ? Le poète Jean-Paul Riverain ? Jean-Marie Averti ?... même Joseph Broutex, le scénariste !...
-Ils se sont emmerdés comme moi et comme vous, Karl Hubert. Sauf que moi, je m’en fous.
-Pourquoi êtes-vous venu ?
-C’est vous qui m’aviez invité…
-Il fallait ne pas venir.
-Ah bon ! Et où j‘aurais pu voir des gens de gauche ? Au Premier mai, peut-être ?

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