« Les croissants chauds. | Accueil | L’art de rompre. »

Freud et l’art..

Entre l’herméneutique de la création et l’inventivité de la psychanalyse de Freud, le livre déjà ancien de Sarah Kofman « L’enfance de l’art » (1970) nous balade avec beaucoup de compétence dans l’esthétique freudienne.
Comment Freud comprenait-il l’art et que doit-on retenir de sa pensée ?
Comme l’a si bien écrit Elie Faure, « …l’énigme de la transposition de pulsions dans la création, révélant par là le mystère de la jouissance esthétique… » est ce que Baudelaire traduit par « le style c’est l’homme ».
Les peintres et les écrivains le savent bien, l’œuvre est une improbable analyse.
Freud avait déjà observé avec d’autres que la création artistique n’est pas le privilège de tous et chez les mêmes qu’elle ne surgit pas à tous les moments, mais qu’elle a ses fuites, ses saillies brusques, ses épanchements féconds.
Pour Freud, l’art c’est avant tout l’homme qui se projette et qui nous montre avec la forme d’expression qu’il a choisie, ses craintes, ses désirs, ses vertus et ses vices.
Ce qui dérange aujourd’hui, par rapport à cette analyse, c’est la placidité de l’expression lorsque l’Officiel l’avalise.
Ainsi, prenons l’exemple de ce qui s’écrit parmi les poètes et est honoré par l’Echevinat de la Culture de la Ville de Liège : l’espace de l’amour et de la cruauté, les vicissitudes de la sexualité et de la mort et cette folie créatrice rejetant la vision bourgeoise du monde y sont proscrits. Simple oubli ? Non. Volontairement rejetés parce que n’édifiant pas une barrière de certitudes morales et de conformisme d’éducation entre l’artiste en liberté et l’autre encagé dans les honneurs et les manifestations de reconnaissance.
Le quoi de l’art, c’est l’inconscient.
Charles Baudelaire avait anticipé la pensée freudienne en écrivant en 1866 « plus l’homme cultive les Arts, moins il bande ». On a l’impression que les Artistes liégeois consacrés ne bandent plus depuis des décennies. Ils ont trop cultivé l’art dans les endroits publics, flattés trop de gens, parce qu’avides de reconnaissance synonyme de médiocrité.
La plus évidente dimension est celle du rapport de l’art avec la pathologie mentale. Ici, on entre dans le domaine de Freud : la psychologie.
Avoir conscience de soi, n’est-ce pas sentir que l’on pourrait être tout autre ? (Paul Valéry). Ainsi les créateurs lorsqu’ils montrent au public ce qu’ils ont créé paraissent souvent aux antipodes des songes et des héros qu’ils nous invitent à contempler.
Freud s’incline « la psychanalyse ne découvre rien que les poètes n’aient pressenti depuis longtemps ».
Venue des profondeurs indéchiffrables, l’œuvre d’art est intraduisible par des mots qui découlent de la raison.

fantasma1.JPG

Est-ce le même processus que le rêve, l’imagination qui crée des villes qui n’existent pas et des héros que l’on ne voit nulle part ailleurs ?
La démarche freudienne est simple, elle s’apparente à la tragédie antique. Les héros meurent parce qu’ils en sont dignes, dira par ailleurs un humoriste qui n’avait pourtant pas tort.
Freud ne s’est pas attardé dans le distinguo entre la primauté des différents processus, alors qu’il élaborait son ouvrage « L’interprétation des rêves », tout à son concept de l’inconscient.
Encore aujourd’hui, on n’a pas trouvé mieux que le rêve mis en forme pour échapper à la censure. C’est dans la fantasmagorie ainsi annoncée que le défoulement de l’artiste s’exerce enfin sans pathologie.
Le revers de cette « action-soupape » gît dans sa réduction de contrainte. L’artiste se déguise et en se déguisant se mutile. Ce n’est plus une force vive, mais une résistance.
Freud y pensera toute sa vie et restera sceptique sur les « vrais espaces de liberté » en matière d’art.
C’est pourquoi, dans son œuvre, l’analyse fine des formes de l’art, ne sera jamais pleine et entière.
C’est plus l’inconscient que l’art qui s’y voit disséqué.
Il n’en est résulté qu’une seule vérité. Et quand bien même, il n’y aurait que celle-là, elle réjouira les artistes et effrayera les pisse-froid : l’art est placé sous la soumission du principe de plaisir.
En témoigne cet extrait de « Contributions à la vie amoureuse » : …les écrivains sont sous la nécessité de produire un plaisir intellectuel et esthétique, aussi bien que certains effets émotionnels, c’est pourquoi ils ne peuvent reproduire la matière de la réalité sans la changer ».
C’est assez mince comme conclusion. J’entends bien que l’art ne renonce pas au plaisir, voilà qui est parfait et d’une certaine manière m’arrange bien dans cette chronique au jour le jour et suivant les fortunes diverses de mes désirs, de mes regrets, de mes observations. Personne n’a encore trouvé le lien entre cette seule vérité et les autres constructions idéologiques d’une réalité qui échappe à notre compréhension.

Commentaires

je vu psychopatologie

Poster un commentaire