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Le discours de Filip Dewinter.

-C’est fait. Dans presque pas longtemps, on sera entre nous. Il n’y aura plus que des pauvres.
-C’est quoi des pauvres ?
-Des gens qui travaillent et qui n’arrivent à rien du tout, même pas à la reconnaissance par réciprocité des autres qui bossent comme eux … .
-T’as vu les primes de départ de VW Forrest ?
-Un truc qui vaut pour quelques-uns ne vaut que dalle. Celui qui a 28 ans de galère dans la boîte touchera le max, les autres… et je ne te dis pas le sort des sous-traitants.
-Enfin, c’est mieux que rien.
-…Presque tous n’ont qu’un an devant… Après…
-Qu’est-ce que tu veux dire ?
-Je veux dire qu’on n’est plus sur le seuil de pauvreté, on est en-dessous… Ce n’est pas ce qu’on nous avait dit de la croissance continue et qu’avec le capital productif, on allait en heure de table, de midi à quatorze heures.
-Tu parles des trente glorieuses, des promesses faites ?
-Un peu.
-Fallait s’y attendre.
-Pas du tout. On nous a menti. Mon tonton m’a menti, mon père, mon prof d’économie politique, mon patron, les élus, enfin toute la Belgique triomphante et épanouie.
-Ils ne savaient pas.
-D’accord. Ils ne savaient pas. Mais maintenant qu’ils savent ?
-Ils peuvent rien faire, qu’ils te disent La mondialisation, les responsabilités ailleurs, bref, ils sont impuissants. Di Rupo…
-Ah non !... finis les discours.
-Qu’est-ce que tu veux ?... que Noël, qu’était dans dix jours, ramène sa fraise, ses rennes, son sapin, tout de suite ?
-Je veux baiser les femmes des patrons, manger dans leurs assiettes et péter dans leurs draps de soie. Je veux plus que Di Rupo répète les discours de Reynders. Je veux qu’il reconnaisse qu’on s’est gouré sur l’économie de marché, qu’on ne la ramène plus sur les nécessaires sacrifices…
-On ne peut pas revenir en arrière.
-Non. Mais on n’est pas obligé de suivre les autres sans savoir où ils vont. Je ne veux pas crever idiot.
-T’es un anar, Ferdinand ! Tu raisonnes trop rouge. On va trouver des solutions pour nos petits enfants. On en a toujours trouvés.
-Tu parles comme les journalistes et les mecs qui se sont arrangés pour grappiller quelques primes, et nager au-dessus du lot dans la fiente des riches…
- Quand tu vois comme on vit ailleurs, on ne peut pas prétendre qu’on soit trop mal…
-Je ne suis pas en cause, Arthur.
-Alors, si t’es pas en cause, de quoi tu te plains ? Parole t’es la conscience du quartier ? Quand un métallurgiste, à dix roupies de l’heure, se fait botter le cul aux Indes par Mittal, en quoi ça te concerne ?
-Tu tombes dans le discours qu’ils tiennent.
-T’es pas pauvre que je sache. Il te manque rien.
-Je pense aux autres.
-Tu penses aux autres, toi ? Et depuis quand ? Tu penses aux autres… tu fais que ça, penser !... Ça te rapporte rien, mais ça rapporte rien aux pauvres non plus. Et quand je dis que ça te rapporte rien, j’oublie la bonne conscience que tu te fais…
-Où tu touches pour me parler comme tu le fais ?
-Je suis plus d’accord avec personne, Ferdinand. Je suis plus sensible du tout aux discours. J’en ai ma claque des marlous qui sont derrière. Bien sûr qu’on va tous vers quelque chose qui est une belle merde. Seulement, en attendant, on n’y est pas encore ; tandis que la moitié de la planète y patauge depuis belle… mieux, je me demande s’ils ont fait autre chose qu’y patauger… les autres, autrement, ils ne radineraient pas plein berzingue depuis toujours, champions au partage, en organisant notre pénurie.
-Justement faudrait s’organiser pour recevoir et pas les parquer avant de les fourrer dans des charters…

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-Rien du tout. T’organiseras rien du tout et moi pareil. Et je me demande si on n’est pas coincé entre deux forces contradictoires, la première, la capitaliste, avide et dégueulasse, qui s’organise loin de nos pouilleries pour digérer ce que nous leur mâchons dans les usines, … et l’autre, les vrais damnés de la terre, les crève-la-faim qui se passent les bonnes adresses, et qui bouffent dans nos assiettes, comme toi tu pisses à la raie des riches.
-Ils ont raison, Arthur. C’est un réflexe humain que je comprends.
-Avec quoi tu t’es fait dix kilos de trop, Ferdinand ? Quand t’auras plus que l’arête et que ce seront les autres qui becteront, même si ta conscience te dit qu’ils ont raison, ton cerveau qui commande à ton appétit te dira que t’es un con !... Rien qu’un con…
-Tu te rends pas compte, Arthur ! Tu tiens même plus le discours à Reynders, tu tiens celui de Filip Dewinter !...

Commentaires

Je te l'ai certainement déjà dit mais j'éprouve une gêne devant le discours qui oppose les malheureux pauvres aux salauds de riches. Il y a des salauds de pauvres comme des riches passionnants d'intelligence et de générosité.La Palice dirait que la seule différence entre pauvres et riches est que les premiers n'ont pas d'argent et les seconds bien. Pour le reste, ils partagent tous deux les mêmes vertus et les mêmes ignominies. Le discours de gauche est marqué par un romantisme malsain. Un pauvre qui accède à l'aisance comme un socialiste qui accède à la griserie du pouvoir ont exactement les mêmes chances que les riches de devenir odieux.Il faut aider les pauvres à s'en sortir non par vertu mais parce que c'est l'intérêt bien compris de la société et que nous sommes tous interdépendants. Même réflexion en ce qui concerne le respect de l'environnement.Encore une fois, le salut est dans la culture philosophique pourvoyeuse d'éthique.

Bien sûr, si l'étoffe n'est pas la même, entre un pauvre et un riche, la peau l'est.
Aussi, dans ce dialogue, Arthur a un raisonnement que Ferdinand n'a pas. Mais lorsque ce dernier dit qu'il veut baiser les femmes des riches, il faut entendre par là qu'il n'est pas insensible au parfun, au langage et au confort. Et c'est là qu'apparaît une différence énorme de classe dans le domaine des possibles. Au point qu'il faut se méfier des discours du riche philanthrope qui se prétend de gauche.
Pour en terminer, je dirais que le travail en usine ou pas de travail du tout ne prédispose pas à l'épanouissement et à la joie de vivre. Ce sont ces facteurs primordiaux du déni de reconnaissance d'une minorité par rapport à une majorité qui font qu'un pauvre aura toujours raison et un riche toujours tort, même si le premier est un salaud et le second un parfait honnête homme.
C'est ce qui nous différencie, mon cher Michel.

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