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Stop à la social-démocratie…

On ne peut pas dire que Jacques Julliard, soit un intellectuel exalté. Membre du PS français, traditionnellement « chrétien de gauche », on le remarque déjà en mai 68 à la Sorbonne pour ses propos modérés et son attentisme prudent, soulignant l’impasse politique du « gauchisme » tel le PSU, il soutient et participe aux processus des Assises du socialisme jusqu’à son adhésion au PS en 1974. Il voue une certaine estime à Michel Rocard pour son livre « Questions à l’État socialiste ».
Attaché à la modernisation du parti (déjà !), il adhère aux thèses de la social-démocratie qu’il développe dans ses différentes collaborations aux journaux et notamment au « Nouvel observateur » grâce à l’amitié de Jean Daniel.
Actuellement, il est membre du Comité pour la réforme des collectivités locales.
Pourquoi ce rapide et incomplet tour d’horizon de Jacques Julliard ?
Parce que ce personnage clé de la vie intellectuelle a su mettre le doigt sur l’essentiel du malaise au PS en phase de recomposition à l’université d’été de Rennes. Il tient en deux mots accouplés : la social-démocratie. Dans un article au « Nouvel-Observateur » il se livre à une critique sévère de la dérive de cette politique.
Cet homme qui joua un grand rôle à la CFDT et dans la propagation du roccardisme, voilà qu’il dit que les socialistes européens font fausse route et se trompent et trompent leurs électeurs, alors que la pâle Martine Aubry se jette dans des manœuvres de rassemblement autour du spectre d’une social-démocratie devenue pratiquement indéfendable à l’heure de la mondialisation du capitalisme.
Les jours de la social-démocratie sont comptés, écrit-il. Il est temps que les socialistes perdent cette idée que collaborer avec le capitalisme sera favorable à la longue aux travailleurs.
L’hebdomadaire Marianne a relevé quelques extraits du papier de Julliard que je me fais un plaisir de reproduire. « Le passage du capitalisme civilisé au capitalisme sauvage des actionnaires nous oblige à reconsidérer toutes nos analyses et toutes nos pratiques politiques (…). La deuxième gauche est morte. Le néocapitalisme l’a tuée (…). L’horreur économique, nous n’avons rien fait pour la conjurer. Pis : nous avons donner parfois l’impression de la tolérer (…). Nous avons aussi à entamer une analyse et une réflexion en profondeur sur le statut de l’argent dans nos sociétés (…). C’est l’idée même de ce capitalisme hors sol, hors production, fondé exclusivement sur la spéculation, qu’il faut déraciner, expulser des cerveaux formatés par le bourrage de crâne ultralibéral (…). Un Fabius, un Strauss-Kahn sont beaucoup trop compromis avec l’ancien système économique dominant pour incarner le renouveau (…). Il faut redonner au socialisme sa dignité morale ».

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Ce texte est sans appel quand on l’applique aux notables qui constituent l’épine dorsale du socialisme belge, tous plus ou moins compromis, englués dans le pouvoir et l’argent.
Et c’est le drame de tous les partis socialistes européens qui ont cru aux lendemains qui chantent par une co-gestion du capitalisme, d’un côté les propriétaires, de l’autre les travailleurs avec leurs intermédiaires syndicats et parti, pour l’octroi de conventions de compensation dans une cohabitation bénéfique pour tous.
Eh bien ! cette vision idyllique du monde des affaires en osmose avec celui du travail, c’est fini !
On pourra me reprocher les pires erreurs, mon impulsivité, parfois la confusion de mes propos, mon manque d’information, mon manque de rigueur, même, je l’admets bien volontiers. Je ne peux pas être à la fois un auteur, un comité de rédaction et un grand reporter qui va aux sources. Mais jamais je n’ai dit autre chose que ce que Jacques Julliard martèle avec force dans le « Nouvel Observateur » : la social démocratie est en train de faire la démonstration de sa nuisance…
Hélas ! c’est un drame pour les notables du parti à double titre, parce qu’ils en vivent et fort bien, et parce qu’en vivant très bien de la chose, ils se sont tout à fait – volontairement ou involontairement – coupés des réalités de la classe sociale qu’ils représentent et qu’ils sont en train de trahir.
Vous savez ce que c’est que d’avoir un parti engagé à fond dans un système dont il faut le désengager au plus vite. Les élites ne suivent pas, pire font de l’obstruction.
C’est flagrant en France, ce l’est encore plus en Belgique, parce que dans notre pays, il n’y a pas d’autre alternative quand on est de gauche que d’être socialiste !
En France, les échappatoires sont salutaires et finiront par avoir la peau des résistances au sein même du parti de Martine Aubry. En Belgique, il faudra bien qu’une lame de fond éjecte tous les notables hors du parti de Di Rupo. L’argent qu’ils gagnent dans un système qui corrompt l’homme jusqu’aux fonds des poches n’est qu’une forme de la corruption « douce » dont use le capitalisme à leur égard..
Ce qui fait douter en Belgique que l’on puisse un jour sortir du concept social-démocrate, c’est que les « élites » socialistes y ont fait de belles et longues carrières, s’y complaisent et destinent la même vie à leur progéniture, comme le CDh et Ecolo, par ailleurs.
Vous voyez comme c’est difficile de changer les habitudes en Belgique. Il est vraisemblable que ceux qui veulent le changement au parti socialiste n’y arriveront pas, laissant un boulevard à toutes les aventures et à tous excès.
C’est dramatique !
Eh bien ! si le parti ne change pas, il faudra bien en refonder un autre.

Commentaires

Mon cher Michel,
Il y a pourtant du nouveau dans notre situation. Améliorer ou tout au moins maintenir le pouvoir d'achat, certes, ce fut vrai. Mais cela ne l'est plus. Nous sommes entrés dans une phase du système qui nous fait régresser dans l'ensemble.
Julliard a raison. Le discours que tu tiens n'est plus de saison. Il est même dangereux, car je sens bien le renoncement au progrès, même des plus misérables, derrière les mots du discours que tu tiens.
La balance qui équilibrait les plateaux du travail et du capital est rompue. Désormais le travail ne vaut plus ce qu'il prétendait valoir l'année dernière et ce sera pire dans les années à venir.
Le capitalisme fait perdre plus d'argent qu'il en a fait gagner jusque ces dernières années.
La social-démocratie, c'est fini ! Même si elle va durer encore quelques temps dans l'esprit des gens malades des fausses informations.
Vers quoi va-t-on ?
Si le socialisme ne réagit pas, nous allons vers la misère.
Aujourd'hui ce qui est important, c'est la prise de conscience de la situation exacte. Le capitalisme mondialisé ne nourrit plus son homme ! Voilà ce qu'il faut comprendre, et rien d'autre !
Aux politiques et aux militants de gauche d'en tirer les conséquences.

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