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un tramway nommé revient.

L’incident au cours duquel un agent de la STIB a perdu la vie a été l’objet de réflexions inadaptées.
Il me semble inopportun d’abonder dans la diatribe, en ajoutant à l’hystérie collective la saillie de Brigitte Grouwels, ministre bruxelloise des Transports, lorsqu’elle s’exclame : « Il faut accroître la présence policière ! ». On ne doutait pas que Joëlle Milquet allait surenchérir, dans une sorte de bras de fer de laquelle des deux ressemblerait le plus à Margaret Thatcher.
Suite à ma chronique du 14 avril, celle-ci tombe à merveille.
Elle est l’illustration de la récupération d’une partie des électeurs en usant d’une technique simple autant qu’efficace : aboyer avec la meute ! Accroître le sentiment d’insécurité par une prise en compte larmoyante du fait-divers a toujours été payant, même si pour les observateurs plus avisés, ce n’est qu’un signe de faiblesse.
Celui qui fait un métier à risques et y perd la vie pour quelques euros de l’heure, est victime d’une injustice infinie. Un manœuvre d’Arcelor-Mittal qui se fait couper en deux par un rouleau d’acier mal arrimé fait moins de bruit. Le fait-divers fait à peine trois lignes dans les journaux, tandis que l’autre confine au drame national ! Ils sont pourtant tous les deux victimes de voyous, à la différence que le voyou qui navigue dans les hautes sphères de la finance est intouchable, tant il y a de la distance entre « son crime » et lui, tandis que l’autre est en contact permanent avec l’opinion.
Cette société se désintéresse complètement de ce qui se passe derrière les tôles peintes des grandes usines, et c’est bien regrettable.
Le fait-divers qui remue la Belgique aussi tragique soit-il, est d’une grande banalité.
Le malheureux contrôleur de la STIB est tombé à la renverse suite à un coup asséné par un ami du chauffard. Malheureusement, il en est mort.
Des conducteurs qui se croient les rois de la route, j’en croise vingt tous les jours.
Impuissants dans la vie, presque toujours victime d’un métier de merde ou pas de métier du tout, la voiture leur rend une liberté supposée dont ils manquent cruellement.
Il y a beaucoup d’individus incapables d’exprimer ce qu’ils pensent, et qui le disent avec les poings. Ils sont impulsivement conduits à des brutalités sans commune mesure avec la situation, qui leur échappe.
Cette brutalité est de tous les temps. Elle est le fruit d’un manque d’éducation, souvent d’un manque de discernement, voire d’intelligence. Qu’il y ait de plus en plus d’immatures qui courent les rues, c’est un fait. C’est tout l’enseignement qui serait à revoir, l’humanisme y fait cruellement défaut.

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On a tout essayé pour conscientiser l’utilisateur d’un engin d’une tonne qui roule dans des rues traversées par des piétons nombreux sur les trottoirs. Des examens pour le permis de conduire, à l’amende salée pour ivresse au volant, on a tout tenté, en vain pour une partie de conducteurs pour lesquels le retrait du permis de conduire ne servirait à rien, puisqu’ils reprendraient le volant le lendemain, s’ils le pouvaient.
La hiérarchisation à outrance de cette société met l’individu en constante compétition, si on joint à cela le culte de l’argent et le ressenti cruel d’en avoir trop peu, en parallèle au coût du standing, de la voiture, de la frime, on construit une société violente qui perd en route l’altérité et le respect des autres.
Les petits assassins de trottoir, les voyous de la revente de hash, les malfaisants stupides de la destruction de l’environnement, les crapules imbibées d’alcool et violeurs d’enfants étaient-ils moins fréquents jadis, au milieu du siècle dernier ? Courent-ils les rues aujourd’hui ?
N’y a-t-il pas l’effet grossissant d’une accélération de la connaissance des faits-divers par les médias, joint à la concentration dans les grandes villes, d’une population disparate et sans culture commune ?
Il ne faut pas baisser les bras devant la fatalité. Mais, tromper les gens en leur disant que ces drames seraient évités par une présence policière accrue est un mensonge. Comme cela fait plaisir à l’opinion, on s’y complaît en donnant de fausses raisons, quoique, si la Belgique compte aujourd’hui 11 millions d’habitants, il y a lieu de tenir compte de cette croissance pour le calcul du nombre de policiers.
Misérable époque qui déplore les méfaits et qui en oublie les causes !
L’homme est un animal à pulsions et à l’intelligence souvent altérée par son goût de l’accaparement du travail des autres. Cette constante va de Paul Frère, le milliardaire qui fait la fierté des imbéciles, au conducteur et son ami meurtrier.
Je ne suis pas un donneur de leçons, je tiens ma partie quelque part dans l’échelle des pulsions non maîtrisée, j’ai droit à une part d’erreur qui n’a pas encore entraîné des préjudices graves à quiconque, mais qui le pourrait dans un avenir toujours inconnu et incertain par définition.
Alors, si on se mettait quand même à réfléchir ?
La presse pourrait reprendre à son compte, ce à quoi les politiciens ont renoncé : dire - en partant des faits - une vérité qui n’est pas bonne à dire.

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