« Assange et les barbouzes. | Accueil | Le FDF en attente… »

L’agnotologie (1)

Le public ne le sait pas. Il ne le saura pas demain non plus.
On a frisé la catastrophe économique !...
A un cheveu, on vous dit. Les gazettes ont fait l’impasse sur l’info. Une catastrophe évitée ne vaut plus la peine qu’on en parle. « Ouf ! on a eu chaud… », et puis après ? Ça aurait changé quoi ? Jouer à se faire peur ? Comme quelqu’un qui passe sans problème un pont qui s’effondre comme il atteint l’autre rive !
Donc on n’en parlera jamais !
On ne saura pas ce qu’on a évité !
La liste est longue des sauveurs de l’inénarrable.
Di Rupo en tête, puis le gouvernement, on a les meilleurs. Pas de raison de craindre une autre catastrophe économique, les médias n’en parleraient pas comme la précédente. Ils auraient raison. Nos héros nous en sauveraient de la même manière.
Di Rupo était pour le plan Marshall, c’était un début d’intuition, un essai de pertinence. Voilà qui était bien. Mais, il y a mieux : l’avis de quatre économistes belges de renom : Bruno Colmant (UCL, Vlerick), Eric De Keuleneer (Solvay Business School, ULB), Ivan Van de Cloot (Itinera Institute) et Paul De Grauwe (London School of Economics). Tous d’accord pour un sauvetage garanti : un nouveau New Deal selon Roosevelt !... La clé de nos déficits, seul à nous sortir du marasme, de nos peurs et de nos misères : Franklin Delano Roosevelt !
Puisqu’on est sauvé, ce n’est plus indispensable de revenir sur ce qu’on doit et à qui, si cette dette est unique ou multiple et sur quoi on la compare, par exemple si c’est sur la fortune des Belges, elle est infime, si c’est sur le Belge moyen, elle est énorme, etc.
Ces quatre rigolos – il faut bien les appeler par leurs noms - près d’un siècle d’études universitaires, sont officiellement la crème de l’économie !
Après tout, s’ils vous empêchent de réfléchir, ils vous évitent des maux de tête…
Quelques questions restent pendantes.
Prenons l'indicateur de la dette qui établit le ratio (60 %) entre la dette publique totale et le PIB annuel. Il est fort discutable, incohérent, même ! Il compare un stock de dettes de plusieurs années sur un an de richesses produites (le PIB). C’est comme si on mesurait le total des dettes (yacht, voiture, appartement, etc.) aux revenus d’une seule année.

08a000.jpg

C’est Mélenchon qui l’a dit et j’en ai retenu l’esprit : il faudrait rapporter le stock de dette au PIB, en tenant compte de la durée de vie de la dette.
Et Mélenchon de conclure : « Selon la statistique du Trésor Public, les titres de la dette française sont en moyenne de 7 années et 31 jours. Donc on doit rapporter les 1640 milliards de dette totale aux 14 000 milliards d'euros environ que produira le pays en sept ans ! Dans ces conditions, le stock de dette représente 12% du PIB cumulé pendant 7 ans ! C’est donc tout autre chose, non ? Ce stock de dette n'est donc pas un réel problème. »
Un déficit n’est rien qu’une dette, puisqu'il faut emprunter pour boucler son budget.
Les économistes cités plus haut, méprisent trop les internautes pour se pencher sur certaines critiques qui sortent de la Toile.
C’est sur une boutade de Fabius lorsqu’il était ministre des Finances sous Jospin, que seront repris les 3 % de déficit permis et qui deviendront le fameux critère du traité de Maastricht.
Pour Stiglitz, qui n’est pas cité parmi le quatuor de grands comiques - la fixette de l'Europe sur l'austérité tient à une mauvaise compréhension du problème. La Grèce a trop dépensé, mais l'Espagne et l'Irlande disposaient avant la crise d'un excédent budgétaire et d'un ratio dette/PIB faible. Les tirades sur la prudence budgétaire sont donc inappropriées. Les prendre au sérieux ou même simplement adopter un cadre budgétaire plus strict pourrait aboutir à l'inverse du résultat recherché. L'austérité va aggraver la situation.
Reste la solution « blitzkrieg », celle dont se moque les experts qui est de remettre les compteurs à zéro, ce qui désole tant Wall-Streets et la City, qu’on y craindrait des suicides.
Cette solution est loin d’être aussi imbécile que ces messieurs le croient.
La remise à zéro ne signifierait pas que les prêteurs seraient sur la paille et dépossédés de l’argent qu’ils ont gagné à la sueur de nos fronts. Cela voudrait dire que plutôt que de tout perdre, il conviendrait que le pouvoir économique sente le courroux du pouvoir politique qu’il a voulu déposséder de ses prérogatives, et à partir de l’instant où le pouvoir politique les a recouvrées, ce serait peut-être le moment de négocier.
Ce n’est pas du New Deal, ni du patinage artistique, cela s’appelle remettre les pendules à l’heure dans une vraie démocratie !
---
1. Terme dérivé du grec ancien par l’historien des sciences Robert Protor, à Stanford, pour évoquer la science de l’ignorance en tant que production culturelle, socialement construite. Cette ignorance sert de puissants intérêts.

Poster un commentaire