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Un morceau d’Oprah comique.

Les fanatiques du vélo, les maboules du Tour de France ont belle mine !
Ils ont cru que Lance Armstrong ne s’était jamais dopé, que c’était un pur héros du vélo et voilà qu’à 41 ans, le champion s’apprête à leur dire qu’il courait à la dopette… en somme qu’il les a roulés facilement parce que c’est une bande de cons
Enfin si l’on en croit les bruits de couloir qu’Oprah Winfrey – la star de l’interview qui fait pleurer – sur ce que le champion déchu va dire aux masses accablées par le poids de sa faute.
Ce qui me fait courir le risque d’interpréter avant l’heure un passage à l’antenne du roi du vélo, c’est qu’il se serait déjà présenté aux membres de son association contre le cancer, afin de leur présenter des excuses.
Oprah sait y faire dans le sensationnel, elle ourle ça en points de croix de ses « clients » qui passent devant sa machine à avouer, parfois dans le but non-dit, de se refaire une vertu publique, après avoir mené tout le monde en pédalo sur le lac des mirages.
Et ça marche !
Dans le cas de Lance, des tonnes de louanges sur des kilomètres d’articles de journaux ont été lues par des dizaines de millions de sportifs en chambre et tout ça était bidon ! Les journalistes médusés, les collègues cyclistes abasourdis, jaloux ou admiratifs, les anciens à genoux devant la merveille, le rêve à l’état pur, et c’était un adepte du pot belge !
Les Américains vont adorer cette chute de vélo. Ils aiment les come back de ceux qui se frappent la poitrine et qui implorent le pardon, pour recommencer une nouvelle carrière, plus pure, plus près de Dieu, Alléluia.
Est-ce qu’Eddy va apprécier ? Et les sportifs de la Dernière Heure ? Et Poupou, toujours en vie ? Et le public qui ne croit jamais à fond une nouvelle qui remettrait en cause son conservatisme, son amour de la passivité, son besoin d’ancrage ?
Bah ! on dira tout simplement que c’est du cinéma et que Lance Armstrong est le seul coureur dopé à avoir signé le plus bel exploit qu’il se puisse être entre dopés.

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Il y a quelque chose de malsain dans ce cirque médiatique dont Oprah fait monter la toile pour jeudi, c’est la confession intime, celle qu’on arrache du bout des lèvres du confessé, le jeu de la vérité « en vrai » pour un public qui adorerait qu’un bourreau place la tête du cycliste sur un billot, lève la hache et attende les statistiques pour stopper ou pour trancher.
Evidemment, Lance serait gracié par Barak Obama en personne. Scénario monté à l’avance, cela expliquerait que Lance serait resté souriant la tête sur le bloc.
Merde !... la télé-repentance me débecte. Je suis plus intéressé par les réactions autour du fait-divers que le fait-divers en lui-même.
C’est qu’après en avoir jeté plein la vue à tout le monde, Armstrong restera par « son courage » une sorte d’idole, déchue, mais idole quand même. Il ne sera plus possible d’ignorer son nom dans les chaumières. Les enfants des écoles feront de belles rédactions sur « son sacrifice ». On trouvera même de la noblesse dans ce volte-face après vingt ans de dopage, des millions planqués en banque, des maillots jaunes signés « Lance » et des folles d’amour pour le cycliste prodige qui auront donné leur corps à un vaurien !
Il aurait mieux valu que Lance avoue dès le premier tour et ne soit pas arrogant envers les deuxième et troisième – qui n’étaient peut-être pas dopés – ou alors moins que lui… Et ensuite qu’il ne tourne pas en dérision sur des années de procès, les autorités sportives et judiciaires devant lesquelles il aurait été plus honnête qu'Armstrong s'explique.
On voit d’ici, après le divan de la Winfrey, le gros pognon que le roi de la dope pourrait tirer d’un livre relatant ses exploits, avec juste une page à la fin pour présenter ses regrets et ses excuses.
Après le déballage, le bal des faux culs peut commencer. Parce que, n’en doutons pas, si tout le monde était au courant des pratiques de Lance dans la caravane du tour, personne n’a moufté et surtout pas les autres rois de la pédale. Car, en suspectant « le meilleur », on jette aussi le discrédit sur « les moins bons ».
Et les Autorités de la pédale, qu’est-ce qu’elles fichaient ? Lance les arrosait de son beau pognon ?
Ce qui va se passer après l’interview coule comme de l’eau de roche. C’est un peu ce qui fait durer nos hommes politiques. Nous pardonnons tout à qui fait de sa vie un show, et qui, comble de l’admiration qu’on lui porte, s’enrichit de son abattage et de sa niaque. Nous chions dans notre froc de peur d’en rater une miette, nous aimons Lance parce qu’il a su se doper à en devenir riche. A travers lui, c’est au pognon que nous chantons en chœur, l’hymne au succès.

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