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Dilemme !

Le kern, c’est-à-dire la crème du gouvernement, va se déterminer d’ici à vendredi pour nous accommoder à la sauce européenne des fameux 3 % du PIB, redescendus aux alentours de 2,6, because le revirement des stratèges de l’Europe inspirés par Madame Lagarde du FMI.
Les vacances de Pâques sont au bout de la semaine et c’est l’élément déterminant pour l’ouverture du poulailler.
Devant l’urgence de foutre le camp, Elio Di Rupo va contenter tout le monde, dans son cas cela signifie de n’indisposer personne des ministres et des partis. Le chef a prévu d’aller plastronné à San Valentino où l’Italie l’attend ! Reste encore à convaincre le petit Alexandre De Croo qui fait de la résistance.
Le peuple ? Tout le monde s’en fout !
Il s’agit de respecter la fameuse règle : on ne touche pas aux fondamentaux du système, le profit et l’exploitation de l’homme par l’homme. Là-dessus, ils sont tous d’accord. Même Onkelinx, c’est dire si la conscience socialiste est en repos.
Il faut croire que les citoyens sont contents et que la cote de popularité des ténors du désastre est toujours aussi élevée.
Jusqu’où cette mascarade va-t-elle durer ?
Contrairement aux idées reçues (celles qui ont prévalu dans les années 60) lorsqu’on croyait à partir d’une dizaine de pour cent de chômeurs et un taux de pauvreté de quinze points, que l’élastique serait trop tendu et que cela allait péter, les chiffres d’alerte sont dépassés, et il ne se passe rien, nada !... pas même un pied aux fesses du séducteur montois. Les beaux quartiers sont calmes, ceux de la misère semblent écraser par le mauvais sort, Sarkozy est venu spécialement de Paris pour décorer son ami Reynders et faire quelques bons mots !
Les futurs chômeurs bloquent les usines, les ouvriers aux fenêtres de l’usine à côté comprennent, mais ils frissonnent dans la crainte que cela pourrait leur arriver. Leurs syndicats négocient des diminutions de salaire et des heures de rattrapage. La patronne de la FGTB se dit incapable de survivre avec 800 € par mois. Elle compatit. Dans son cas, compatir n’est pas suffisant.
Les partis des différentes colorations entretiennent l’espoir qu’il faut purger la société de ses excès et que tout redeviendra comme avant. Seulement pour eux, la société à purger est limitée aux travailleurs et aux classes moyennes, sans compter les déclassés et les laissés pour compte, à qui on retire progressivement le pain de la bouche.
On enjambe les SDF sur les trottoirs et on en a marre de donner la pièce « à des drogués et des fainéants ».
L’autre jour au carré, une jeune femme (à peine 20 ans) m’a proposé carrément de faire l’amour pour 50 euros ! Et foi de Richard III, elle n’avait pas l’air d’une pute. La veille, une femme âgée (dans la soixantaine), d’aspect bourgeois, me demande avec une gêne infinie, si je n’ai pas pour elle, un euro de trop !
On sent que ça bascule, qu’on change d’univers. On entre dans quelque chose d’inconnu.
Je me suis rendu à la raison que j’étais du côté de ceux qui ont un chauffage central, des pièces de séjour, une voiture, du confort, et que, malgré mon évidente bonne volonté, je ne pouvais rien pour que ça change, sinon dénoncer les faits et critiquer cette société sans âme et égoïste en diable. Pendant que les autres se la caillent, je polis des alexandrins ou je zappe sur une de mes soixante chaînes !
Que puis-je, en effet, faire d’autre ? Sinon assister impuissant à cette séparation de fait entre ceux qui peuvent entretenir l’illusion que tout va bien et d’autres qui ne le peuvent plus !
Comment faire comprendre que ces partis politiques, cette démocratie formelle, ce côté « Vieux Bruxelles » fonctionnent encore « comme avant », mais que pour ce résultat on augmente le nombre de places dans les prisons, on met des caméras et des radars partout et on entraîne la police à manier les gaz lacrymogènes !
Et surtout, surtout… on maintient « ceux qui s’en sortent » dans l’illusion que ceux qui ne s’en sortent pas ont une tare quelque part, un vice, une difficulté à être moderne. Ils ne sont pas à l’image de leur temps !

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Vous me direz, vous êtes sensible au malheur ? Vous voulez faire quelque chose ? Vous pouvez toujours vous dépouiller et donner aux autres ce dont vous n’avez pas besoin et même au-delà, ce dont vous avez besoin ! Sacrifiez-vous !...
Je devrais ainsi me dépouiller, c’est-à-dire liquider mon ordinateur, mon adresse mail, ce blogue, manger une fois par jour, vendre mes biens qui ne sont pas ceux de Frère, loin de là, et puis après ? Une voix, parmi les rares de ce désert trop peuplé d’humains ce sera tue. J’aurai perdu ma bibliothèque, mes références, mes philosophes, jusqu’à la correspondance de Flaubert et les Mémoires de Saint-Simon que j’aime tant, dans leurs œuvres complètes de la Pléiade.
Bref, je ne serai plus rien et je ne pourrai même plus lever le poing et désigner les salopards qui nous conduisent à l’abîme ! Car eux, continueraient de plus belle à s’en mettre jusqu’à crever d’indigestion, coucher entre les draps de soie, boire leur don Pérignon, fumer leur Havane et se foutre de ma gueule depuis leur résidence secondaire.
Une voix, la mienne, est trop infime pour que cela dérange beaucoup ; mais morte, elle ne pourra que rendre les salauds qui se disent socialistes, un peu plus convaincus qu’ils ont raison et le peuple qui les acclame, un peu plus persuadé, que c’est ce qu’il y a de mieux à faire.

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