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Suicide collectif.

Les syndicats paient aujourd’hui :
1) la disparition d’une ambition, celle de construire un monde plus juste :
2) le manque de visibilité des structures, presque toutes rémunérées et quasiment non électives ou trop en connivence avec les partis pour l’être réellement ;
3) les convergences politiques d’une vision fausse d’un monde économique avec lequel les syndicats se sont réconciliés.
Les populations pensent que les syndicats sont dirigés par une pseudo élite recrutée dans un monde universitaire réduit à l’avocat et à l’économiste, malgré quelques exceptions. L’espérance d’une société débarrassée des conquêtes et des pouvoirs de l’argent n’existent plus. On s’affilie au syndicat pour des raisons de tranquillité ou dans la crainte de perdre son emploi. Le syndicat est devenu l’appendice des Administrations officielles, une assurance qui se dit « tout risque » et qui, en finale, ne protège de rien. La réconciliation de l’économie et du social est tous les jours contredites par l’âpreté d’une vie sans espoir, frôlant la misère et en perpétuelle inquiétude. Le travailleur a l’impression d’être seul à se débattre devant les employeurs, les politiques qui le méprisent en le trompant sciemment et même devant les guichets de son syndicat qui lui laissent l’impression de n’être qu’une succursale du FOREM.
L’exemple de la FGTB de la place Saint-Paul à Liège est exemplaire. Ce n’est pas sans un certain serrement au cœur que les militants, jeunes et vieux, voient le produit de leurs cotisations finir dans l’immobilier et les rétributions des cadres, plutôt que dans les luttes syndicales.
Que le syndicat socialiste FGTB soit à son plus bas niveau depuis 1958 selon le CRISP n’étonne personne. On peut même augurer que la descente n’est pas finie, que les cadres, dont aucun ne sait ce qu’est une journée de travail, ont du souci à se faire.
Que la CSC ait dépassé en affiliés la FGTB et que la CGSLB (syndicat libre) n’a cessé de progresser ne signifie pas grand-chose, si ce n’est un glissement général vers un centre mou fataliste, un découragement qui voit le jour et un cynisme aggravé par ceux qui jure dorénavant par « on ne me la fait plus ». Ce glissement est en rapport avec le regroupement au centre des partis politiques et le dégoût profond qui s’installe dans la population qui, sans savoir qu’elle peut autre chose, commence par stagner sur place, avant de s’écarter d’un univers qu’elle suspecte de ne la conduire nulle part.

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Ce long cheminement vers le dégoût absolu est parti de la fin des Trente glorieuses et a trouvé à s’alimenter de la crise de 2008 qui a fait de tels dégâts en profondeur qu’on peut dire, sans grande chance d’être contredit, que la société capitaliste ne s’en relèvera pas.
Le rôle des syndicats qui aurait dû être grand, sera au contraire infime, voire inexistant, en cela en harmonie avec les partis politiques actuels.
Le vide sous nos pieds a quelque chose d’effrayant. Le monde qui s’effondre n’est pas remplacé par un autre qui se crée. On voit poindre un océan d’incertitude fait de misères et de guerres.
La poussée des partis de droite et d’extrême droite annonce un désastre. On assiste en direct à la fin des illusions sur la démocratie. La modération des décisions de ceux qui détiennent l’argent et les pouvoirs qui l’accompagnent relève des illusions du passé.
Plus les fortunes sont vertigineuses et plus certains hommes empochent des millions d’euros, plus la catastrophe se rapproche et bien malin pourra dire d’où elle nous tombera dessus et jusqu’où elle ira.
C’est que nous ne sommes plus seuls à gérer ce qui reste à défendre de justice sociale sur cette planète. La rapidité des transports, le nombre de personnes qui se déplacent, d’évidence nous avons aussi à régler les problèmes de plus pauvres que nous et qui nous submergeront parce qu’ils ne peuvent faire autrement et que nous n’aurons rien fait pour les aider.
Davantage victimes que nous d’un système en déshérence, ils s’étonnent que nous ayons encore plus de pain qu’eux et ils jugent ce qui nous reste de privilège, comme étant encore trop, par rapport à eux qui n’ont rien, par un réflexe de survie que nous ne saurions leur reprocher.
Voilà donc le prolétariat européen assailli de deux côtés, par les riches et par les pauvres d’entre les pauvres.
Dérisoires et ridicules deviennent alors les syndicats et les partis qui agitent leurs petits bras en s’enfonçant dans une sorte de néant effrayant.
N’avons-nous pour demain aucune autre perspective que celle de l’extrême droite ? Sommes-nous aveuglés à ce point ? Comment reprendre en main et refaire fonctionner les syndicats et l’espérance qu’ils véhiculaient jadis ?
Voilà ce à quoi nous devons penser aujourd’hui. Il semble que tendre une perche à ceux qui se noient chez nous et dans le monde soit au-dessus de la tâche des syndicats et de la gauche en général. Alors qu’ils disparaissent, nous nous noierons bien sans eux, lestés du plomb de l’extrême droite, nous coulerons plus vite et mieux.

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