« Dessine-moi un con ! | Accueil | La mondialisation heureuse (suite). »

La théorie de la saucisse.

On pourrait croire, naïvement, que ceux qui pratiquent un sport ont l’exclusivité de s’appeler sportifs. Pour le football, ce n’est pas le cas. Les supporters se prennent pour de grands sportifs. Quand leur favori triomphe, c’est un peu grâce à eux. Du reste, ils se réunissent dans des clubs de supporters, du même nom que le club qu’ils supportent. Il faut reconnaître qu’être membre d’un club de supporter, c’est un peu aussi faire du sport : casser des clôtures, la castagne avec les supporters d’en face, envahir les rues le verre de bière à la main, affronter les flics, tout cela relève d’une certaine manière, d’une vie sportive – à ne pas confondre avec sportivité.
Que les matchs soient bidonnés, ils ne le sont pas tous, mais l’expérience a prouvé par le passé que des championnats ont été faussés, ce n’est pas rien tout de même. Qu’importe, et que la FIFA soit un nid de profiteurs gourmands de pots-de-vin, on s’en doutait aussi. Le supporter n’est pas contre que tout le monde s’emplisse les poches, du moment que son club gagne. C’est pour cette raison qu’à chaque dimanche la moitié des supporters va à la baston et que l’autre moitié lui pète à la gueule.
Tout cela n’est pas grave, puisqu’il s’inscrit dans l’air du temps de l’argent roi, de la morale aux chiottes et du club de Gand, champion de Belgique.
Le football est devenu le miroir aux alouettes de la jeunesse des banlieues, surtout africaine, puisqu’en Afrique, la banlieue commence au centre ville. Le truc fait aussi recette chez nous par les sommes astronomiques que génèrent l’achat et la vente des joueurs, avec l’étalage des chiffres dans les journaux, voilà la moderne caverne d’Ali Baba pour soutenir le moral de la jeunesse pauvre. !
Mais d’où sortent ces millions d’euros, de quel portefeuille inépuisable achète-t-on les talents du pied gauche ou le placement « génial » d’un type dont le seul don : le talon d’une jambe suffit !
Pourquoi des milliardaires acquièrent-ils des clubs de foot dont on nous dit qu’ils sont déficitaires ? C’est pas leur genre de prendre en main des combines pourries.
Comme dans toutes les affaires d’argent, depuis que les grands escrocs ne vont plus en prison et que les gouvernements s’aplatissent devant l’économie mondiale, l’argent a pris une dimension mystique à l’égal de toutes les religions.
Même chez Daech, on arrête la conquête de l’Irak pour un beau match de foot.
Et comme le pognon peut tout, il a donc aussi ses tiffosi, adorateurs du foot, bons bosseurs silencieux et efficaces de la semaine et illettrés et incapables de discernement, hors de la synthèse du match.
L’époque est au sport et les belles filles aux sportifs. Amen.
On n’a rien encore trouvé de mieux que le foot pour oublier dans quelle merde on vit.
La nôtre, avec le dieu pognon, a fini par rejoindre les jeux du cirque romain. Des types courent sur des pelouses, certains en attrapent une crise cardiaque, rien que pour les liasses de biftons. Et il faut qu’il aille vite, le propriétaire du jeu de jambe merveilleux ! Il dépasse rarement la trentaine sur les terrains. Alors, sous peine de finir marchand de chaussures sur la Batte, il faut en mettre de côté. Ce qu’ils ne savent pas faire en général, puisqu’ils vivent fastueusement à crédit et que la Ferrari et la nana de rêve, ça coûte bonbon.
Les joueurs de foot, enfin les pros qui passent au guichet des banques, ont le tendon fragile, pas celui qui sert à bander, non, celui du mollet. Ils peuvent passer en un éclair parfaitement plein aux as et capitaliste enthousiaste, à mancheux de la bretelle d’Ans de l’autoroute, pas facile, courir de voiture en voiture avec des chaussures de foot !
Ces jours-ci voilà qu’on apprend ce que tout le monde sait déjà, six membres de la FIFA ont été arrêtés mercredi 27 mai pour des faits de corruption à Zurich, où aura lieu vendredi l'élection du président de la Fédération internationale.
On en arrête de temps en temps quelques-uns, ce qui n’empêche pas les autres de poursuivre la chasse aux mallettes de cash. Remarquez que ce n’est jamais les pointures qu’on embarque, mais des seconds couteaux qui veulent en croquer, comme les grands. C’est un peu comme si un secrétaire d’État qui aurait de la prétention, volait comme un ministre !...
Les supporters, les clubs, les dirigeants, les joueurs, tout baigne plus ou moins dans des affaires louches : achat, vente, location, bail prise d’intérêt, pourquoi voulez-vous que la FIFA soit le dernier refuge de l’honnête homme ?

1mllmlp.jpg

Un blogueur a écrit un truc amusant et combien judicieux, c’est la théorie de la saucisse: «Si vous aimez quelque chose, n’essayez pas de savoir comment c’est fait.». Maxime admirable et qui peut s’adapter à nos grandes gueules : les puissants « spécial compte bancaire », aux petits supporters, qui se privent de tout pour se payer les matchs en tribune.
Et c’est justement là qu’Alain Gerlache se trompe sur mon populisme démesuré, je devrais pourtant me réjouir de voir ces belles collections d’immatures illettrés, jadis pauvres, se goinfrer de billets de banque, puisque ce serait « la revanche du petit peuple ». Eh bien non, cher libéral de mon cœur, ce n’est pas de cette revanche-là des « petites » gens dont je rêve.

Poster un commentaire