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L’homme qui valait un milliard !

Un qui ne manque pas d’air dans la jungle des affaires, c’est Bernard Tapie. On le croyait au tapis, après l’annulation par la cour d’appel de l’arbitrage rendu en sa faveur à propos de l’affaire Adidas.
Après les magouilles avec les experts et Madame Lagarde, ministre des finances au moment de l’arbitrage à tel point qu’elle reste toujours « témoin assisté » dans cette fumisterie juteuse, voilà le diablotin qui sort de sa boîte et contre-attaque en réclamant la somme grandiose d’un milliard d’euros à l’État français !
Ils sont bien oubliés tous les travailleurs licenciés sur le parcours industriel de celui qui spéculait sur l’achat des canards boiteux pour des reventes à la découpe, plongeant ainsi des centaines de famille dans l’euphorie d’une reprise après le beau discours de l’homme public, suivi six mois plus tard de la liquidation de ce qui n’était pas rentable, entraînant souvent l’ensemble du personnel dans des faillites desquelles le travailleur sort en perdant des plumes.
Ici, dans le match nouveau, l’ex « Beau » Bernard a calculé que les intérêts courant sur vingt ans de la somme que le Crédit Lyonnais lui aurait escroquée à l’embrouille d’Adidas, plus le capital, tournaient autour du milliard. On n’en est plus à quelques dizaines de millions près…
Pour se refaire par ce nouveau coup, Tapie compte sur Me Emmanuel Gaillard, un spécialiste de l’arbitrage, après en avoir gagné 400, dont celui contre l’État russe de l’affaire Ioukos.
Tout en prononçant l'annulation, la cour d'appel s'est déclarée compétente pour examiner le dossier au fond et a donné rendez-vous aux parties le 29 septembre. Bernard Tapie s'est pourvu en cassation contre cette décision, procédure actuellement en cours. En matière civile, le pourvoi n'est pas suspensif.
Un élément est troublant, celui des 400 millions et des broutilles, octroyés à Tapie et annulé par le tribunal. L’appel n’étant pas suspensif, l’État français était en droit de réclamer la restitution de la somme. Il n’en a rien fait, espérant sans doute en rester là, donc Tapie garde ses billes. Il est vrai que c’est une épée de Damoclès pour l’homme d’affaires et s’il peut changer 400 millions incertains en un milliard certain, quel est le businessman de ces hautes sphères qui hésiterait ?
C’est assez édifiant d’ouvrir de temps à autre, comme Asmodée à Madrid, les toits de la haute société où l’âpreté au gain le dispute au manque de scrupule. Tapie y est entré par effraction, puisqu’il s’est fait lui-même en copiant les mœurs et coutumes du beau monde. Et c’est ce qu’on lui reproche, il n’est pas « né ». Pour ces gens ce sera toujours un imposteur et, en même temps, c’est ce qui fit son succès populaire à l’époque où il se conduisait déjà comme un ruffian parfait de la finance, mais où sa gouaille et son faux air front popu, le faisait aimer des gens, au point qu’il fut un temps le ministre de la ville de François Mitterrand.

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À présent le voilà à l’âge de la retraite, dans l’excitation d’un jeune loup à son premier coup.
« J’aurais aimé être un artiste » bramait-il pour les ménagères en pâmoison, lorsqu’il était chanteur, tôlard, banqueroutier et comédien. Et il le fut, dans son genre, un artiste, dans un milieu où l’on déteste se faire remarquer et où il ne fut pas un exemple pour la nouvelle génération montante, de Charles Beigbeder à Macron.
Il aime faire savoir qu’on lui a tout fait, même le flanquer en tôle, sans qu’apparaisse dans son plaidoyer ce qu’il a fait aux autres, y compris les plus humbles à qui il a pris le boulot.
Tel qu’il est, ce n’est pas mauvais qu’on suive ses derniers exploits.
Le milliard qu’il convoite et qu’il recevra peut-être est à l’image de ces sommes folles qui dépassent l’entendement dont ces messieurs parlent comme s’il s’agissait de cacahouètes.
Franchement, à l’heure des restrictions et de la pauvreté, Tapie nous éclaire sur l’état de pourriture sur lequel bambochent et avancent joyeusement dans l’inconscience, les joyeux fêtards de l’économie, de nos ministres à nos millionnaires, d’une société qui fait penser à Versailles avant 1789.

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