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Un dimanche trop sérieux.

Tiens, revoilà Richard III qui redéconne avec une nouvelle tentative de coller les morceaux de notre société qui part en miettes, à un philosophe du siècle des Lumières mort en 1804, Emmanuel Kant !
Quand on ne comprend plus très bien son temps, je crois que la bonne méthode est de revenir aux fondamentaux, c’est-à-dire à la philosophie. Justement en l’espèce Kant est l’interlocuteur parfait, auteur de deux essais qui tendraient à prouver qu’il s’était posé les questions que nous nous posons, il y a plus de deux siècles.
Le premier s’intitule « Qu’est-ce que veut dire Aufklärung ? (Lumières) ».
Quand l’œuvre a été écrite, l’Europe se trouvait en ébullition, comme aujourd’hui. Des idées nouvelles surgissaient du peuple à la veille de la Révolution française. En 2016, elles surgissent des progrès techniques et notamment ceux de l’aviation qui permettent la circulation des peuples et des marchandises, bouleversant les règles de l’économie.
Qu’elles proviennent d’une forme de pensée nouvelle ou d’un moyen technique nouveau de raccourcir les distances, la question centrale demeure « que devient l’Homme dans tout ça ? ».
À supposer que Kant ait vécu de nos jours, il aurait certainement transposé sa réflexion de la fiction des idées à la réalité technique des faits, par le même parcours politique. Comment devenir majeur dans un environnement qui infantilise ?
Pour lui devenir « majeur », c’est prendre ses responsabilités en luttant contre le penchant à la paresse et la lâcheté de chacun, en luttant contre l’idée que le peuple est éternellement mineur et a besoin d’un tuteur.
C’est le rappel que pour atteindre la majorité, le peuple doit vivre sa propre expérience. La seule façon d'apprendre à penser, selon lui, est d’en faire une affaire personnelle et de le tenter soi-même.
Pour cela, il doit pouvoir jouir da la liberté de publication et d’expression, non pas selon les critères du goût du jour et des fortunes personnelles, mais selon l’originalité des pensées exprimées et leur libre discussion.
Déjà des obstacles : l’étouffement par les politiques de la réaction des foules dans la peur qu’émergent du nombre, des raisonnements supérieurs aux leurs ; les ligues anti-ceci, promouvant cela, sous couvert de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme ; prétexte ou nécessité, les restrictions de liberté de toutes natures afin de lutter contre le terrorisme ; surveillance directe par caméras ou électronique sur le NET avec ou sans résultat etc. Je ne suis pas en train d’écrire que c’est bien d’être raciste, ni d’être laxiste devant les menaces d’attentats. Je dis tout simplement que pour porter un jugement, il faut connaître le « meilleur » et le « pire » dans tout type d’informations, enfin ce qui nous est donné comme tel, et démêler ce qui nous paraît être juste, injuste ou simplement aberrant.
Les dirigeants des démocraties rassemblés en communauté d’intérêt, en ayant décidé que le citoyen n’est pas prêt pour l’âge adulte, l’ont contraint à l’infantilisation éternelle.
Kant pense qu'il est difficile de sortir seul de cette impasse de la libre expression. « L'âge de majorité » sera atteint par l'usage public du raisonnement.

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Deuxième essai d’Emmanuel KANT « Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique ».
En 1784, le contexte historique du siècle des Lumières: le déchiffrement des « terra incognita », la guerre d’indépendance des États-Unis, l'agitation d’une découverte du corps social dans le tiers état, expliquent les mouvements des Idées. Kant pose trois questions essentielles 1. Que puis-je savoir ? 2. Que dois-je faire ? 3. Que puis-je espérer ?
Ces questions sont toujours devant nous à attendre des réponses.
Or, il semble bien que le monde en mouvement est tout à fait orienté vers les seuls progrès que l’on peut retirer des entreprises qui tournent autour des productions et des rémunérations bénéficiaires ou déficitaires qu’elles supposent. En un mot, que le seul progrès qui vaille, c’est-à-dire celui de l’amélioration des besoins de l’Homme, soit subsidiaire et relatif à celui d’en tirer profit.
Assez étrangement la définition kantienne du progrès a d’étranges similitudes avec celle de Marx, nonobstant que ce dernier reste productiviste et indéfectiblement sur la même idée qu’un Alexis de Tocqueville (1), par exemple.
Où Kant est résolument moderne, c’est quand il pense que l’idée de progrès ne permet de comprendre l’histoire que parce qu’elle est l’idée d’un progrès indéfini : supposer l’histoire proche de sa fin anéantirait tout espoir. Sauf que cette idée de progrès en 2016 reste attachée à la croissance matérielle, au lieu d’imaginer qu’elle puisse l’être, selon le philosophe, à l’idée d’un monde devenu un grand village, progressant dans les connaissances de l’autre et respectueuse de l’environnement.
Serait-ce que nous touchons à « une fin à l’histoire au sens de but et non de terme » parce que nous n’avons pas compris le sens profond du progrès ?
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1.Capitalisme et communisme ont une définition identique : le productivisme.

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