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Les cocus du libéralisme.

On le sait, partout dans le monde, sauf en Belgique, le capitalisme a échoué dans trois domaines : la prospérité, la sécurité et l’égalité des droits. La prospérité s’est fait la malle pour une catégorie bien définie de la population, celle dont les Michel ne cessent de dire qu’ils s’en préoccupent : la partie inférieure des classes moyennes.
L’économiste Branko Milanovic en a fait des tonnes sur le sujet, articles, graphiques, conférences, tout y a passé. N’importe qui peut s’en convaincre en parcourant les grandes villes, les magasins en gérance exploités à fond par les grandes marques, sont en train de rendre l’âme et la clé de la location aux propriétaires.
Les revenus des classes moyennes inférieures des pays industrialisés stagnent. Elles vivent moins bien qu'elles pouvaient l'espérer, parce que c’est la seule sous classe sur laquelle l’État puisse encore prélever de nouveaux impôts. Les classes les plus basses sont exsangues et les classes supérieures détiennent le pouvoir avec les politiques. Vous avez déjà vu un législateur et un banquier qui se défausseraient financièrement pour le bien public ?
Cette catégorie est très importante, puisqu’elle a un rôle de charnière entre l’au-dessus et l’en-dessous, mais pas seulement, elle concentre une grande partie des espoirs et des illusions des classes inférieures qui veulent « s’en sortir en s’élevant ».
Cette stagnation fait penser à l’Ancien Régime et même plus avant, quand les masses ne progressaient même pas d’un point par siècle !

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Une belle image d’un économiste me vient à l’esprit « les métropoles occidentales très actives encore ressemblent à des îles tropicales bordées d'océans de ressentiment, où vivent des riches nés dans un Versailles postmoderne, qui forment une classe sans frontières et sont regardés avec envie ou colère à l'intérieur de leur pays comme au dehors. » (Slate magazine)
La classe moyenne inférieure fut l’élément moteur d’un capitalisme à ses débuts, en constant progrès dès le XIXme siècle. Elle se voit aujourd’hui supplantée par une autre forme de prospérité qui ne tient pas au travail, mais à la politique et à la spéculation. En effet, la classe politique en Belgique regroupe une multitude de fonctions régaliennes d’État, des hauts fonctionnaires et tout l’appareil des élus à titres divers. Tout cela constitue une classe moyenne de remplacement qui tire ses revenus des taxes et impositions, justement principalement de la classe moyenne inférieure dépossédée.
Certes, nos sociétés n’on jamais été l’exemple d’hommes égaux en droit, mais elles sont en passe de transformer le suffrage universel, un homme = une voix, en une formalité très inégalitaire.
C’est un phénomène de détournement du jeu démocratique par des intérêts privés, qui arrive tout naturellement par l’interprétation qu’ils en donnent, à s’approprier la morale de circonstance quand, par exemple, on met en parallèle l’intérêt de quelques milliers de chômeurs avec l’intérêt général, sans que ce dernier soit bien précisé.
La démocratie achetée par un milliardaire, un banquier ou un groupe high-tech en situation de monopole, parce que mise au plus offrant par un commissaire priseur qui touche sa commission, il y a de quoi faire des pronostics sur une disparition prochaine.
La gauche n’est pas exemptée de reproches dans ce drame moderne. Elle a trop longtemps considéré la classe moyenne inférieure comme son plus grand adversaire, quand celle-ci était faite d’artisans ayant réussi. Il est vrai qu’ils aspiraient à faire oublier d’où ils venaient, dans un réflexe de nouveau riche. À présent qu’ils y retournent, il serait bon qu’on leur explique pourquoi ils se sont fait piéger par les classes supérieures, avec la complicité des partis traditionnels.

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