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De la résignation à la protestation.

Macron interpelle un public conquis à l’avance pour dire à l’opinion « je suis le chef, seul responsable ». Le prince fait de la com. Il se sait intouchable.
La figure du chef est très ancienne. On a eu le baron médiéval du haut de son donjon haranguant ses féaux. On a le châtelain de l’Élysée visitant ses vassaux LREM.
Une attitude plus démocratique eût été de déroger à la majesté du rôle de président de la République (bel oxymore) en se rendant au Parlement pour y répondre de l’irrésistible ascension de Benalla.
En Belgique, le passe-droit des autorités est plus subtil. Le pouvoir est dilué. Il est parfois difficile de savoir dans la répartition des compétences, qui est responsable de quoi. Néanmoins la fonction de premier ministre implique quasiment des passerelles entre autorités, privée, justice et politique, même si les génuflexions sont invisibles et les hiérarchies relativement respectées. Le nombre d’importants, présidents de région, ministres fédéraux, hauts magistrats, généraux, sans oublier le roi, dilue la force pénétrante des pouvoirs et en amoindrit les effets. Il est certain, par exemple, que les sécessionnistes flamands sont les ennemis naturels de la royauté, que Michel a ses entrées dans les allées du pouvoir économique, De Wever est connu parmi les chefs de la droite au pouvoir en Europe. Di Rupo a perdu de son prestige avec l’effondrement du socialisme français.
Le système présidentiel français et le système belge, tous deux diversement hiérarchisés, s’appuient néanmoins sur des convictions économiques identiques, plus libérales que jamais.
De là à se demander en quel temps vivons-nous, quelle est la dérive qui irrite tant les citoyens d’une société libérale, fille aînée de la démocratie ?
Sans parler des partis politiques, vaut-il mieux s’abonner aux leçons de morale politique et à la manière de Michel Onfray, découper la scène médiatique en petits paquets, chacun ayant droit à son bout de filet ou, après l’invective propre à l’irritation de voir la morale et le droit énoncés par des salauds (1), s’en tenir après s’être ressaisi, à une réserve distanciée à la contemplation de mauvais acteurs d’un théâtre pitoyable ?
Réfléchir à mieux comprendre simplement ce qui nous arrive : nous avons tout pour vivre parfaitement heureux et nous ne le sommes pas, au contraire, notre conscience nous interdit de l’être. Nous vivons proprement révoltés de ce que les hommes de pouvoir font aux autres, au nom de leur seul intérêt ! Nous voudrions que cela change et nos efforts n’aboutissent pas. Nous avons l’impression que nous ne parlons pas de la même démocratie, qu’il y a entre eux et nous un mur d’incompréhension infranchissable.
Réfléchir à mieux comprendre simplement ce qui nous arrive, est la seule chose que nous puissions faire.
Jusqu’à quand ? Telle est la question après que, dans la journée du 22 juillet, tous les liens renvoyant vers Nordpresse ont été mis sur liste noire par Facebook, en commençant par une suppression de masses des derniers contenus, portant fatalement sur l’affaire Benalla.
Je veux bien que Nordpresse ne fasse pas dans le sérieux, mais quand même, voilà qui est inquiétant.
Tous les opposants au système sont dans le même bain. Je suis de l’avis du philosophe Rancière lorsqu’il dit n’être qu’un « individu qui essaie de s’expliquer le monde où il vit sans prétendre donner à des individus ou des groupes déterminés des méthodes d’action à vérifier ».
Lorsque j’écris que Charles Michel n’est qu’un salaud, je ne prétends pas que mes lecteurs partagent ce point de vue qui pourrait paraître outrancier, voire vulgaire et inapproprié aux yeux de beaucoup de gens opposés à la politique de ce personnage. Pour ce faire, mon argument tient dans la définition du Grand Robert « Salaud – Personne méprisable et moralement répugnante ». C’est exactement ce que je pense. C’est mon droit et je l’assume. Sartre, du reste, conforte le fond de ma pensée en élargissant le terme sur la personnalité d’un homme dont le comportement moral est fondé sur la bonne conscience absolue.

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On voit tout de suite qu’on est loin de l’invective et assez proche des définitions de La Bruyère sur ce type de caractère.
La parole libre maintient la possibilité d’un autre monde. Dire ce que l’on pense est un plaisir coûteux, comme le prétendait Anatole France. On cesse de mentir sur sa légitimité. C’est un pari sur l’émancipation intellectuelle à la portée de tous. Son but est de combattre "l'ordre dominant" qui ne me convient pas.
Quant à passer de la parole aux actes, je me réfère encore à Rancière pour en terminer avec ce casse-tête du « comment sortir » du ménage inapproprié entre pouvoir et citoyens non-inscrits dans la culture des privilèges “Ceux qui parlent aujourd’hui d’insurrection font en fait une croix sur l’histoire réelle des processus insurrectionnels et feignent d’ignorer que le peuple en armes n’a plus aucune réalité dans nos sociétés“.
Voilà qui laisse le champ libre aux éventuels partis de gauche, mal à l’aise dans les sables mouvants d’une démocratie du faux semblant, mais le moyen de faire autrement ?
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1. Ils ne savent pas qu’ils le sont, bien entendu.

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