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Match France-Belgique truqué ! (1)

Dans l’excellent roman de Philip Roth « La tache », une anecdote colle parfaitement avec le thème du livre. En Amérique, s’il y a bien des citoyens encore discriminés, ce sont les gens de couleur, alors que plus Américains de longue date que la plupart des citoyens actuels, les origines de leur ancrage remontent de la fin du 18me s. à la mi-19me.
Venons à l’anecdote :
« Le docteur Charles Drew a découvert comment empêcher le sang de coaguler, ce qui a permis de le stocker. Puis, il a été blessé dans un accident de voiture, et comme l’hôpital le plus proche ne prenait pas les gens de couleur, il est mort en se vidant de son sang. » (« La tache », page 444 et 445 Folio).
Cette anecdote est symptomatique de l’ambiance « petit blanc » qui existe encore dans la société américaine. On y adhérerait complètement par élan du cœur et dans la réprobation des discriminations. Cependant, elle est fausse. !
Le docteur ayant été accueilli dans le même hôpital que les autres passagers du véhicule. Son artère fémorale sectionnée dans l’accident, il a été impossible de le ranimer aux Urgences.
L’affaire aurait pu se passer comme l’écrit Roth. Les bouteillons ont la vie dure.
Mais ce n’est pas vrai.
Le livre est paru à NY en 2000. Voilà 18 ans que le bruit se colporte en librairie et bien plus longtemps encore de bouche à oreille.
Depuis la diffusion des tweets de Trump, grand dénonciateur et grand diffuseur de Fake news lui-même, cette pratique de la fausse nouvelle revient sur le devant de la scène politique, cependant elle est très ancienne.
Trump rend presque service au camp de la vérité en incriminant la presse de cette pratique assez répandue. De ce fait, il joue les arroseurs arrosés.
Souvent le fake est à sens unique, la craque de droite impactant l’oreille de l’homme de gauche, attendu que la quasi-totalité de la presse est aujourd’hui dans des mains intéressées de personnages plutôt de droite, sinon d’extrême droite et qu’il est plus facile à un représentant d’un parti de l’espèce de se faire interviewer par des journaux de connivence comme Le Soir, La Dernière Heure, sans parler des presses locales.
Si bien de nos jours, qu’une nouvelle profession est en train de voir le jour : diffuseur de fausses nouvelles.
Fake news et hoax (canulards malveillants) menacent la démocratie, qui n’avait pas besoin de ça pour être menacée( l’illustration de cette chronique est hoax à double titre).
Nous voilà entrés dans la « postvérité », la vérité d’après, c’est-à-dire celle qui aurait pu être, comme la mort supposée du docteur Drew. Une vérité supposée chuchotée entre amis, lorsqu’elle est suffisamment répandue devient « majoritaire » par rapport aux faits réels. C’est une « vérité » à laquelle on veut croire parce qu’elle adhère à nos propres convictions ou qu’elle est « poétique » et que c’est finalement une plus belle histoire, qui a en tous cas plus de sens, que la réalité.

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Dans le genre, le flacon brandi par Colin Powell aux Nations Unies faisant preuve que Saddam Hussein travaillait à l’arme atomique reste fameux parmi tous les fake-News.
Les peuples travaillés par des esprits forts, des prêtres et des escrocs viennent d’hériter d’une catégorie à vrai dire ancienne de propagandistes du faux, en train de revenir en force, les placeurs d’hommes politiques dans l’opinion et les politiques eux-mêmes enthousiasmés à l’idée que les promesses électorales non tenues pourraient se nourrir de fake établissant le contraire.
Jean-Claude Juncker, titubant au sommet de l’OTAN, était-il fin saoul ou victime d’une crise de sciatique ? Cette interrogation n’est pas anecdotique. Elle est politique et d’une grande importance, puisque cet homme joue un rôle considérable dans la construction de notre avenir en Europe. Saoul ou état physique mauvais, la vérité ou fake-new : on a déjà les deux !...
Là aussi, l’idée n’est pas neuve de faire passer le rêve d’une démocratie idéale pour la réalité.
En 1733, Jonathan Swift – l’auteur des Voyages de Gulliver – définit le mensonge en politique comme « l’art de convaincre le peuple par des faussetés nécessaires ». L’historien américain Robert Darnton, bibliothécaire de l’université de Harvard avait constaté que les journaux anglais du XVIIIe s. vivaient de ragots, exploitaient les rumeurs à des fins politiques ou mercantiles. Les journaux français rivalisaient avec eux en publiant des informations invraisemblables à une époque très sensible, au point que Louis XVI y perdit la tête. Cela ne signifie pas que les Révolutionnaires étaient des menteurs patentés, mais on ne saurait dire quelle aurait été la suite de l’Histoire de France si les informations avaient reflété la réalité, l’Ancien Régime, ne vérifiant pas les sources, diffusant les rumeurs dans la jubilation d’avoir trouvé le moyen de faire fortune en vendant du papier !
Marc Fougères mentionnait en 1943 que l’exactitude d’un fait n’est pas un concept absolu qui porte en lui-même sa preuve. À l’époque, le Régime de Vichy était passé maître dans l’art de raconter des craques. Mais la réflexion de Fougères est juste. Il n’existe pas de vérité absolue qui ne puisse être controversée, sinon que nous naissons mortels !
Trump et ses pareils n’ont pas fini de nous étonner. Il est vrai que depuis le temps que la foi se passe de vérité prouvable, on se demande si ce n’est pas Dieu lui-même qui aurait lancé la fausse nouvelle de son existence !
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1. Je compte sur un nombre record de lecteurs rien que par le titre, même si cette chronique le dénonce comme fake-new, par son contenu !

Commentaires

En tout cas, sans doute sans le faire exprès, Trump a réussi son coup. Tout le monde emploie ce terme fake news, sans qu'on sache exactement ce que cela recouvre. Quand Trump employait (ou emploie) fake news, cela veut dire: une information qui ne me convient pas.

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