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Obéissez ! Payez ! Croyez !

Hier, j’évoquais la perte de solidarité dans nos sociétés post-2008.
L’individualisme n’est-il pas le propre du capitalisme ? N’est-ce pas la contrepartie humaine liée au principe de croissance ?
Toute la pensée libérale est basée sur la réussite individuelle et sur la libre concurrence censée faire baisser les prix. À ce propos, les Français vont devoir payer leur électricité 6 % plus cher, l’Europe ayant mis l’électricité en concurrence ! Bizarre, non ?
Il y a un paradoxe entre un libéral ministre et sa fonction de penser aux autres, alors que selon le principe même de sa doxa, c’est surtout penser à lui.
Le système promotionne l’égoïsme et, merveille absolue, ne sont vus et écoutés que ceux qui ont réussi ! Si bien que l’illusion que tous ont leur chance et vont réussir est la pilule du bonheur distribuée en dose massive par les médias.
Il n’y a pas mieux qu’un personnage de gouvernement satisfait de lui-même pour parler aux autres. Grâce à son égo ainsi exposé, les gens croient que c’est d’eux dont le ministre parle alors qu’en réalité ils sont dans le troupeau des consommateurs, n’en sortiront pas, ne comptent pas et, surtout, ne sont intéressants pour le ministre que si son égo y trouve son compte.
Nous nous mentons à nous-mêmes, nous avons fait de ce mensonge une règle de vie. C’est assez simple. Chacun est libre de choisir les marchandises qu’il veut, la production d’une économie « rien que pour nous » y pourvoit.
On vend le produit « consommateur » grâce à un discours permanent de liberté, fausse liberté bien entendu. Il n’est pas vrai de pouvoir faire tout ce qu’on veut comme un ministre. On est tout de suite rattrapé par ce qu’on gagne, qu’on ne peut dépasser sans sanction.
Les gens vivent séparés les uns des autres, ce qui flatte leur égoïsme. Reliés sous un mode virtuel à des amis subliminaux. Il est plus facile aujourd’hui d’entrer en conversation avec son ordinateur, qu’avec son voisin de palier.
La famille n’est plus qu’un simple groupement fonctionnel d’intérêts économico-affectifs.
Une société où la télévision a pris la place du livre, a introduit dans les familles un « troisième parent » plus proche désormais que les deux autres. La crainte de la solitude a trouvé là un moyen de substitution à l’humain sans les humains.
Avec l’écran plat, la télévision ressemble plus à un portrait animé dans un cadre que l’on peut mettre partout. On finira par en tapisser les murs.
C’est ainsi que peu à peu la vraie famille disparaît supplantée par la fausse, combien plus intéressante, surtout plus typée, l’intelligent l’est plus, le stupide tout autant, comme les caractères, la beauté, la jeunesse les rêves et les ambitions.
Bien entendu vous n’y rencontrerez pas de vrais citoyens, ceux qui s’essaient à comprendre et critiquent un système qui va dans le mur. Non, le prolétaire y aura le défaut de boire un peu trop, le ministre de trop vouloir le bien des citoyens, la belle fille d’y être un peu volage, le macho de rouler des mécaniques et la mère aura le courage sublimé jusqu’au sacrifice. Tous ne voient pas d’autre bonheur que celui proposé par le capitalisme.
Ne vaut-il pas mieux une « famille » virtuelle qu’une vraie famille, avec toutes les tracasseries, les ennuis, les responsabilités que cela suppose, se dit-on rassuré !

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Demain, quand s’assombrira l’avenir au point de laisser planer un doute sur le but poursuivi du capitalisme et qu’on s’apercevra qu’il n’en a pas, que la machine tourne à vide et ne profite qu’à ceux qui ont acquis le pouvoir d’entrer dans la machine, alors divertir les gens plutôt que les jeter en prison ne sera plus suffisant… et on les jettera en prison.
Cette société marchande et commerçante peut mieux faire.
Le système inventorie la vaste zone d’énergie psychique qu’il convertit en audience.
On apprendra ainsi plus facilement si un Reynders a ou non plus de chance qu’un autre de décrocher le secrétariat européen qu’il convoite. Quelles ont été ses fautes s’il échoue, et ses réussites s’il emporte la place. Ce n’est pas le personnage en lui-même qui est intéressant, mais s’il a une bonne image dans les groupes les plus importants de citoyens.
Nietzsche l’avait bien anticipé en parlant d’une société-troupeau dont il prévoyait l’hégémonie, alors que la télévision n’existait pas. Il n’est pas seul dans cette prémonition, Kant en 1784 arrivait aux mêmes conclusions dans « Qu’est-ce que les Lumières ». La Bruyère dans ses Caractères est moins direct, mais l’âme humaine avait en germes ce dont je parle aujourd’hui.
Quand les hommes renoncent à penser par eux-mêmes et qu’ils se placent sous la protection d’un mirage, tout peut arriver pour leur malheur.

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