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L’extrême gauche n’a pas le pompon de la grossièreté. On pourrait même dire qu’elle est parmi les partis politiques, la plus respectueuse de la personne humaine. Parfois dans une colère soudaine, il lui échappe quelques gros mots (dont votre serviteur). Elle ne s’attarde pas sur les disgrâces physiques d’un adversaire, comme je le fis parfois à propos de l’alopécie du premier ministre.
Un ministre à chaque nouvelle loi antisociale doit s’attendre à être brocardé. C’est souvent la seule défense du peuple devant la puissance de l’oligarchie. En face, n’est-ce pas de la vilenie de la part de celui qui a des revenus considérables soldés par les contribuables, de retrancher le peu qu'il a d’un chômeur, d’un pensionné ou d’un malade ?
Il est tentant de dénigrer des ministres arrogants que la nature n’a pas favorisés. Le parler rude dans les corons n’incitait pas les mineurs de jadis à la politesse de salon, les Gilets Jaunes traqués par l’autorité publique aujourd’hui, non plus.
En comparant sur Wikipédia les photos des ministres jeunes, puis vieux, les transformations physiques sautent aux yeux. C’est tentant de comparer Reynders à 25 ans, l’air poupin, et le masque empâté et flasque du personnage aujourd’hui. Il y a des gens qui vieillissent bien, d’autres qui portent leurs vices et leurs défauts sur leur visage. Il y a dans la politique des « portraits de Dorian Grey » ambulant. La frontière entre les faits et ceux qui les produisent est floue. On résiste mal au plaisir d’exprimer ce que l’on voit sur le visage d’un ministre, quand on souffre de sa politique.
Sinardet et Delwit pensent le contraire de ce que je viens d’écrire, évidemment. Ils voient le peuple ne marcher qu’aux gros mots, avec des chefs illettrés qui ne profèrent des cris de guerre que sous formes d’onomatopées.
Les épithètes et les invectives ont volé bas autour du G7 à Biarritz, parmi le gratin de la planète. La gauche pourtant était absente. De Brasilia, le président Jair Bolsonaro a entretenu la machine des imprécations, en commentaires offensants sur Brigitte Macron-Trogneux. Son âge, son physique, tout le répertoire y est passé. Si Macron est resté impassible, on se souvient de la manière dont il parle des Gilets Jaunes et des comparaisons qu’il fait entre le fainéant et l’actif, sur un quai de gare.

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Un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne a dit Jean-Pierre Chevènement. Ce ne fut pas le cas des démissionnaires de la N-Va qui ont claqué la porte à l’affaire de Marrakech et ont ouvert leurs gueules comme rarement des démissionnaires ont fait.
Des exemples nombreux viennent de France. Les gens de l’extrême droite et de droite y sont des plus grossiers. En Belgique, l’extrême droite se cantonnant en Flandre, nous avons droit à des traductions soft. .
– « J'aurai une mission de 'casse-couilles' démocratique ". Gilbert Collard à la suite de son élection à la députation dans la 2e circonscription du Gard.
– « Casse toi pauv' con » l'insulte dont on se souvient le plus, au salon de l'agriculture en 2008, de Nicolas Sarkozy.
– Anne-Marie Camparini, est une belle « salope » pour Patrick Devedjian. La scène est filmée et diffusée sur la chaîne lyonnaise TLM.
Daniel Cohn Bendit : « Georges Marchais était une ordure », lors de l'émission " Droit d'inventaire " présentée par Marie Drucker et consacrée à Mai 68.
Avant ce n’était pas mieux. Clémenceau à propos de Jaurès : " Voilà ce que c'était, Jaurès... Un dangereux imbécile. Je le répète, son assassinat fut une chance pour la France. "
Ségolène Royal « Nadine Morano, c’est la Madame sans-gêne de l’opposition ».
Trump a le record de la goujaterie. Dans un meeting, il s’est mis à singer l’infirmité visible d’un journaliste, encouragé par les rires de l’assistance.
En politique comme dans la vie quotidienne, la grossièreté produit l’effet inverse. Quand les membres d’un parti politique crient « liquidez ce type », nous sommes face à quelque chose qui s’approche de la déclaration de guerre. Un président qui qualifie à plusieurs reprises l’opposition «d’Ennemi du peuple» et qui règle ses comptes en «Fake News», un autre qui mobilise sa police pour éborgner et tuer des manifestants et qui délègue son ministre de l’intérieur, aux infos du soir pour dire que des voyous menacent la République, n’est-ce pas aussi des coups portés à la démocratie ?
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1. Wallon liégeois « je crève d’enrager ».

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