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L’école des cadavres *

C’est une erreur de s’en prendre à des personnages que nous trouvons odieux, sans les entendre, parce que nous ne les voyons pas comme nous, c’est-à-dire pensant autrement. Nous écartons ainsi la possibilité de comprendre pourquoi ces gens sont différents et nous passons à côté de l’occasion de les réfuter par des arguments tirés de leurs propres contradictions.
Croyez bien que je ne partage pas les vues de ceux dont je vais vous proposer l’exemple.
Si le pouvoir accable Dieudonné et Zemmour, afin d’empêcher le premier de jouer la comédie par des moyens illégaux, comme la mise à la fourrière de son bus après en avoir saboté le moteur (venant des autorités, c’est assez curieux cet irrespect des lois) et le second de tenir des propos à la Barrès, ce n’est pas tant pour empêcher des esprits formés de les écouter, que pour empêcher les masses, faciles à convaincre, de les entendre.
Cette façon de faire commence aux libelles antiroyalistes sous Louis XIII, dont les auteurs se font éditer à Amsterdam, pour revenir incognito en France, jusqu’au fameux « Mein Kampf » du fou, interdit puis autorisé, aux ouvrages antijuifs de Louis-Ferdinand Céline encore non montrables aujourd’hui.
La responsabilité est partagée entre le pouvoir et la grande presse qui ne cessent d’infantiliser le citoyen, le croyant incapable de résistance et de réflexion contradictoire.
Les conséquences de cette mise à l’écart de la liberté d’expression sont cruelles pour les courants d’idées « autorisés », car ils passent tous pour avoir une proximité avec le pouvoir ! Cela a pour effet d’accorder une audience accrue à ceux que la société condamne, surtout dans les circonstances actuelles des partis décriés, des hommes politiques soupçonnés d’être les marionnettes du capital et une démocratie à genoux à cause du Covid-19.
Voilà que Zemmour troue le plafond des audiences de CNews, tandis que le racisme-show de Dieudonné survit dans des spectacles semi-clandestins.
On peut se demander si le système des listes noires n’est pas en train de perdre la partie au profit de ce qu’il voulait réduire en cendres ?
Il ne faut pas faire le plaisir de laisser les ennemis de la justice sociale se singulariser en-dehors de la société. L’opinion a horreur qu’on lui cache les choses.

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Le plus dommageable, ces polémistes n’ont souvent tort qu’à moitié. La plupart du temps, Zemmour met le doigt sur une plaie qui existe réellement. La suite est controversable, car d’un constat que tout le monde fait, il part dans des raisonnements pour aboutir à des conclusions dont les applications seraient nuisibles à l'équilibre social..
Un journal parle d’une “Zemmourisation” de la société ! Et le Huffingtpost de conclure « Si les émissions d’Éric Zemmour, Pascal Praud ou Jean-Marc Morandini séduisent, c’est parce qu’elles sont le miroir de la société actuelle. Une société où les opinions les plus radicales sont mises en avant, quitte à enflammer encore un peu plus les débats. »
Le show-éditorial le plus couru aujourd’hui est en format court sur Twitter avec les débats à la télé qui ne font pas dans la nuance. C’est la prime à la grande gueule.
L’urgence est défavorable à la pensée. On sait bien que le tandem Wilmès-De block est responsable de milliers de morts et qu’Alexander De Croo en reprenant la boutique va sans doute faire mieux d’ici la fin de l’année. Il faut donc savoir mêler l’urgence à l’efficacité d’un contre, d’où la difficulté de l’exercice.
Des personnes refusent le dialogue avec des gens qu’ils décrivent comme des « salauds ». Le public les considère comme des lâches qui se planquent derrière les mots. En réalité, leur souci est de s’abstraire des batailles rangées, black and white, dichotomiques ou l’on ressasse des arguments simplistes.
Si nous voulons en finir avec la société libérale par des actions non-violentes, pour un monde apaisé, nous devons laisser parler ceux qui ne sont pas de notre avis.
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* Titre d’un pamphlet de Louis-Ferdinand Céline, génie littéraire et parfait salaud dit à chaud une opinion indignée par ouï-dire, car n’ayant pas lu l’œuvre dans son entier.

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