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Fuite et surplace.

On n’a nul besoin de Pascal Delwit pour s’apercevoir que le monde populaire n’est plus celui des Trente Glorieuses et encore moins celui d’Orwell et de Huxley.
Nous passons d’une ère de prospérité entre 1955 et fin des années 70 d’un enrichissement quasi général, à un surplace avant un recul généralisé.
C’est là que les prévisions du PS d’un monde de plus en plus prospère coincent, au point que la fin de la lutte des classes est une hypothèse qu’il faut oublier, plongeant le PS dans le doute et ses militants dans la confusion. N’est-ce pas, Michel Henrion ?
C’est que jusqu’aux alentours de 80, à peu près tout le monde y a cru. Le monde ouvrier sortait de près d’un siècle et demi de malheurs, d’exploitations éhontées, jusqu’à faire descendre des enfants de dix ans dans la mine.
Si l’effondrement du carcan religieux et de la politique censitaire doit beaucoup à la pensée universitaire (les Jaurès, les Vandervelde, les Truffaut, les Huysmans), l’appoint décisif fut l’enrichissement des milieux populaires.
C’est une période intéressante qui voit au sortir de la guerre 40-45 un parti communiste à égalité avec le PS et qui par l’effet d’une vie générale meilleure, finit quasiment inexistant à la fin des Trente Glorieuses.
La consommation de masse est passée par là.
Le libéralisme, bête immonde en 36, fait illusion en 60 et pour certains le fait encore en 2021. Au vu de ce qui nous attend, ce ne sera plus pour longtemps.
Bien sûr la consommation de masse n’a pas dit son dernier mot, ni fait fantasmer à la lecture des magazines de ce qui était déjà un paradis et qui va devenir un paradis tout à fait fictif.

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L’augmentation des salaires qui permettait de croire à un avenir du capitalisme, pas si mauvais que cela, vit ses dernières heures. Et si pour faire illusion, le patronat cédait encore quelques euros, il sait très bien que donner d’une part et reprendre de l’autre par l’inflation, cela ne s’appelle pas une avancée sociale.
Le conformisme moral de l’après-guerre, avec la montée des salaires, baigne dans ses dernières années de tranquillité passive. Hélas ! du côté du monde du travail les dégâts sont considérables. Il n’y a plus vraiment de syndicats, le PS a abandonné le monde du travail pour se consacrer à celui de l’épicerie et aux embrouilles de Meusinvest. À part le PTB qui tient le cap et ne se laisse pas distraire de la cause ouvrière, on ne retrouve le parti communiste que dans des belottes à quatre chez des camarades.
La fatigue mentale des populations succède au narcissisme libéral. Tout est en germe pour une recrudescence d’affrontement entre les exploités et les exploiteurs. Mais la désintoxication est lente et elle est freinée par l’excessive propagande du pouvoir qui tient en laisse tous les médias.
Le Covid n’a pas ouvert une crise sociale, il l’a simplement postposée par une suite de constats d’incurie du pouvoir, coupés de protestation de bonne volonté. Mais, ce sursis de la remise des comptes de la Nation aux électeurs prendra fin bientôt. On se doute que certains se réveilleront avec la gueule de bois, vainqueurs et vaincus, bourgeois et travailleurs, dans un face à face, probablement comme en 36. Les Trente Glorieuses feront effet de loupe sur ce qui avait été acquis et ce que les gens seront en train de perdre.
C’est probablement dans cette cruelle comparaison entre ce qui était possible et ce qui l’est aujourd’hui, que cette fatigue mentale, comparable à une paresse de l’esprit, disparaîtra peu à peu et que les partis survivants à gauche avec les syndicats reprendront des couleurs.
Il ne faut pas s’y tromper, le néolibéralisme n’a pas prolongé la vie économique du libéralisme. Au contraire, il est en train d’en hâter la fin.
Mal embarqué dans une Europe qui peine à défendre ses propres intérêts vassalisée comme elle l’est par l’Amérique, ce sera peut-être du vieux continent que viendront les premières puanteurs de la gangrène finale.
Le rôle que les gens auront à jouer est immense. Seront-ils à la hauteur ? C’est la question à laquelle on ne saurait répondre pour l’instant. L’intelligence des Gilets jaunes est quand même un fait historique et l’élément optimiste qui fait garder de l’espoir.

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