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Antigone d’Anouilh

A S. en guise de viatique pour lundi…

Ecrite en 1944, la pièce d’Anouilh symbolise la résistance d’une femme au pouvoir absolu. C’est la pièce de Sophocle qui sert de canevas. La représentation de la tyrannie du pouvoir peut symboliquement figurer la maladie, dès lors que cette dernière impose sa loi et que toute résistance est aléatoire et difficile à son impérialisme. Mais Antigone possède en elle une force qu’elles trouvent dans ses convictions et dans ses amours essentielles.
Les personnages d’Anouilh s’ils ne s’écartent pas trop des rôles grecs, ne reflètent pas pour autant la pensée antique. Anouilh s’en éloigne en nous montrant un Créon conciliant et embarrassé et une Antigone moins intériorisée que l’originale. C’est ainsi que le pouvoir moderne se veut bonhomme. Tandis qu’il poursuit son autoritarisme, Créon agit comme la maladie qui couve et attend une opportunité pour terrasser ses victimes. Antigone courageusement s’efforce d’en éviter les morsures.
Transposé de nos jours, le drame de Sophocle perd de sa force. Ce qui était la volonté de dire le droit d’Antigone est devenu une obstination morbide de désirer la mort. Plus Antigone s’entête dans son idée fixe, plus elle se discrédite. Cette dénaturation des valeurs des amours essentielles est comparable à la passivité devant la maladie. Opposée aux lois de la vie et à la volonté de poursuivre son destin jusqu’à son terme normal, c’est presque une démission.
Le personnage de la nourrice introduit dans la pièce est superfétatoire. C’est un personnage secondaire de comédie sans le relief d’une servante de Molière.
La scène d’amour d’Antigone et d’Hémon remplace la scène d’amour contenu de ce dernier face à son père quand il vient plaider la grâce d’Antigone dans la comédie antique.
Le Créon de Sophocle avait au moins le mérite pédagogique de nous montrer ce que peut être un discours fasciste.
Celui d’Anouilh par la manière dont Créon veut étouffer l’affaire et sauver sa nièce, tient plus de Tartufe que de Cromwell. C’est l’Anouilh de la guerre, s’arrangeant de la présence de l’ennemi. On l’identifie sous les traits du roi : il ne peut plus rien quand le scandale arrive sur la place publique et atteint les troupes d’Occupation.
Dans l’alternative où cela n’aurait pas été su, Créon se serait contenté de faire tuer les gardes ayant surpris Antigone à ensevelir son frère. La nuance est importante. Ce n’est plus le Créon borné et allant jusqu’au bout dans ce qu’il croit être une décision en rapport avec la raison d’Etat, c’est un Créon sans rigueur et à l’intransigeance retorse.
Le Créon d’Anouilh est un pétainiste.
Peut-être ainsi est-il plus moderne ? Je le préférais obstiné et homme de caractère. Cela collait mieux pour un affrontement avec Antigone, le tyran symbolisant le mal absolu. Le divorce avec Sophocle est achevé dans le personnage du roi.

antigone 1.JPG


Antigone reste seule avec le garde. Il était inutile de créer un dialogue de sourd entre celle qui va mourir et le souhaite ardemment et un fonctionnaire du palais subalterne et terre à terre.
Dans la lettre d’adieu à Hémon, elle avoue ne pas savoir pourquoi elle meurt, le spectateur non plus, Ce dernier transpose l’intrigue dans une Europe où plus personne ne mourrait pour pareil motif.
C’est le tort d’Anouilh d’avoir mis « au goût du jour » le drame antique. La fascination ne joue plus. Nous ne sommes plus émus. La fin de la pièce prête à sourire. Le carnage final laisse Créon échappant à l’épée de son fils. Le geste de Hémon de Sophocle se passant l’épée à travers le corps est plus vraisemblable.
Il restait à Créon une nouvelle à apprendre : la mort de sa femme Eurydice qui s’est tranché la gorge quand elle a appris la mort de son fils.
Non, la vraie Antigone n’est pas celle d’Anouilh, ni même celle de Sophocle bien embarrassé en tombé de rideau d’avoir supprimé tous ses personnages à l’exception du despote.
L’Antigone du mythe est une battante. Il est impossible qu’elle meure aussi stupidement…
Nous assistons à une farce, une formidable supercherie au seule triomphe la tyrannie.
Antigone est à réécrire.
Je la vois triompher de Créon comme d’autres se défont d’une maladie et tomber dans les bras de Richard III… pardon de Hémon.
Comédie à l’eau de rose ? Allons donc ! C’est Créon qui doit mourir, emporté par la maladie du pouvoir. La tragédie est donc sauvée puisqu’il y a un mort : Créon et le mal qu’il symbolise !
Ce serait un grand jour que les amours essentielles vinssent à triompher.
C’est en tout cas ainsi que je l’écrirais.
Et que périssent Créon et tous les tyrans…

Commentaires

En Bref : une Happy End à l’américaine???
Richard..??..
???
Est-ce bien toi?

Non, puisque le roi meurt !
Comment faire plus fort et souhaiter mieux ?
Sophocle et Anouilh n’ont pas osé. C’était trop dérangeant. Et puis, comment dire ? J’aime Antigone.
Tu connais quelqu’un qui souhaite voir mourir celle qu’il aime ?

Je l’aime, Antigone,
Cette tragédie est monstrueuse,
Comme celle du Che,
Ghandi, Wallace, Jaurès, Di...

Aucune Happy End pour ces individus,
Si ce n’est bien évidemment pour ceux qui ont réussi à protéger leur vie
Staline, Mao, Di Rupo...

La force de se battre,
Le courage de mourir,
La victoire?..
Pfff..
Laissons-la là
lala

J’aime Antigone,
Elle meurt,
Créon aussi... Un peu plus tard,

je pleure a chaque fois quand je la lis meme1000fois mais ce qui me rend triste c que l amour a tue au lieu d egayer

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