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Façon Musset et Chopin.

Il n’y pas de surprise. On le savait déjà. Sous des tonnes de prévenances et de gentillesses, l’homme-à-femmes enfouit son cynisme au plus profond de lui.
Dans le roman de Flaubert madame Bovary, Rodolphe Boulanger est le séducteur type. Si l’on excepte la séduction de dégustation rapide par pauvreté de moyens d’expressions, tous les Casanova, qui tiennent des discours amoureux, ne vident pas autrement leurs gonades.
Beau garçon et coureur de filles, Rodolphe devient l’amant d’Emma. Celle-ci s’exalte et veut entraîner Rodolphe à fuir la vie de province. Il organise un contre-feu en lui faisant parvenir une lettre lui expliquant qu’il ne veut pas la compromettre et qu’il ne partira pas avec elle. Ils ne se reverront que quelques années plus tard lors d’une démarche humiliante d’Emma auprès de son ancien amant pour lui réclamer une certaine somme afin d’éviter une saisie. Rodolphe déclare qu’il n’a pas la somme nécessaire et c’est après ce refus qu’Emma s’empoisonnera.
Dès la première rencontre, l’auteur nous entraîne dans la réflexion qu’à Rodolphe à la vue de la jeune femme.
D’abord celle du maquignon : « De belles dents, les yeux noirs, le pied coquet, et de la tournure comme une parisienne. »
Rodolphe était un gros garçon de trente-quatre ans, de tempérament brutal et d’intelligence perspicace de sa connaissance des femmes. Quant au mari :
-Je le crois très bête. Il porte des ongles sales et une barbe de trois jours. (Bovary est médecin de campagne). Tandis qu’il trottine à ses malades, elle reste à ravauder ses chaussettes… Ça baille après l’amour comme une carpe hors de l’eau. Avec trois mots de galanterie, cela vous adorerait. Ce serait tendre, charmant !... Oui, mais comment s’en débarrasser ensuite ?...
Les séducteurs ne sont pas écologistes, ils ne trient pas leurs déchets et jettent indistinctement à la fosse commune, celles pour qui ce sera la première fois et d’autres pour qui faire l’amour est une habitude.
La pauvreté des échanges sur Internet en témoigne, même Rodolphe passerait pour un séducteur trop formaliste et qui s’embarrasserait de précautions inutiles pour arriver à ses fins. Si tenir des discours amoureux relève de plus en plus de l’exploit, une phrase bien dite relève de la psychologie et l’on sait encore déceler dans les échanges l’art épistolaire et la belle manière de s’en servir.
C’est pourquoi en comparaison d’une démarche sans sentiment à cause de la triste inculture dans laquelle nous sommes, celle de Rodolphe apparaît comme une sorte de véritable déclaration d’amour pour de vraies jeunes filles…
Les temps sont arrivés des amours qui ne sont qu’ardeurs. La rougeur maculopapulaire remplace la confusion ingénue. La myotonie et le spasme carpopédal des mains et des pieds deviennent les étirements du sportif qui s’accouple. Les contractions du sphincter anal, comme en télévision, sont en plateau du cycle de réponse sexuelle, avant les contractions expulsives de l’urètre. A la Hollandaise qui accoucha en public, répliquera bientôt des concours des « trous du cul à zéro » président au cassage de noix depuis ce moyen original. La tachycardie n’est plus que l’excès de cholestérol et la pression sanguine une prédisposition à l’infarctus du myocarde, enfin la réaction de sudation, un effet du chauffage central.
Emma Bovary a été le jouet d’un séducteur qui passerait aujourd’hui pour un grand timide.
On se demande quelle place tiendra demain l’éjaculation, dans le show contemporain ?

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Liberté des mœurs ? Egalité des sexes ? Plaisirs devenus normaux et sortis de la clandestinité honteuse ?
Plutôt pauvreté de vocabulaire, absence d’intelligence sentimentale, médiocrité des rapports homme/femme.
Le monde économico libéral de consommation rapide aurait-il vaincu aussi l’homme sur le terrain de la sexualité ?
Il paraît que les mâles bandent moins qu’avant, que le sperme se fait rare. Quand les amateurs de délires collectifs se regroupent en club et que les échangistes se jouent aux dés, le séducteur titube de fatigue et finit par s’adapter à l’oreille de cochon matelassée !
Alors, Rodolphe, roi de la vulgarité, du sans-gêne et de la rage animale des sens… ou esthète 2005, délicat et romantique ?

Commentaires

Alors, Rodolphe, roi de la vulgarité, du sans-gêne et de la rage animale des sens… ou esthète 2005, délicat et romantique ?

Ni l’un ni l’autre, un homme tout simplement.

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