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Une solution algèbrique

-Tu aimes Mimi, pourquoi ne le lui dis-tu pas ?
-Mais je le lui ai dit.
-Qu’a-t-elle répondu ?
-Qu’elle avait pour moi une amitié tendre, mais qu’elle ne m’aimait pas.
-Qu’as-tu fait ?
-Rien. Que veux-tu que j’y fasse ? Elle ne m’aime pas. Moi, je l’aime ; c’est une histoire qui arrive tous les jours.
-Il te reste l’amitié tendre. C’est mieux que rien !
-Bien sûr. Mais en amour, tu le sais, l’amitié tendre, c’est de la foutaise.
-Tu t’en contentes ?
-Probablement non. J’ai justement fait la connaissance de Julienne !
-Comme la soupe ?
-Aussi comestible.
-Et alors, quid de Mimi ?
-Je me pose la question.
-Qu’est-ce qui te dérange ?
-Rien. Julienne m’aime…
-Voilà qui t’arrange !
-Non. Pas vraiment.
-Je ne vois pas…
-Certes, Julienne m’aime, mais je n’ai pour elle qu’une amitié tendre et j’aime toujours Mimi.
-Julienne le sait ?
-Je n’allais pas lui dire que je n’ai pour elle qu’une amitié tendre.
-Mimi te l’a bien dit !...
-D’accord, mais ce n’est pas pareil.
-En quoi n’est-ce pas pareil ?
- C’est que je l’aime et quand on aime on supporte mieux les choses qui font mal.
-C’est la même chose pour Julienne ! Puisqu’elle t’aime, elle supporterait mieux les choses désagréables que tu aurais à lui dire…
-Sans doute. Mais, une amitié tendre signifie entre autres qu’on n’aime pas de faire de la peine à la personne qui la reçoit.
-Mimi n’a pas hésité, elle, a t’en faire…
-Les circonstances sont différentes et puis avec Mimi, j’étais au courant de sa vie dès le départ.
-Cela ne change rien !
-Je n’ai à m’en prendre qu’à moi-même…
-J’ai compris. Tu excuses tout de l’une et tu ne pardonnes rien à l’autre.
-Au fond…
-Mieux peut être. Tu excuses tout de l’une et tu charges l’autre des fautes qu’éventuellement la première commettrait !

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-C’est moche, hein ?
-Non. C’est vache d’un côté et romantique de l’autre.
-Où cela va-t-il me conduire ?
-En général, les deux finissent par se rencontrer… Elles sympathisent, et tu en prends pour ton grade, c’est-à-dire que tu perds les deux !…
-Que vas-tu chercher là ?
-Les histoires d’amour finissent mal…
-…en général.
-Comme tu dis.
-C’est quand même mieux quand on aime tout court… sans amitié tendre.
-Tu as atteint dans ton histoire une sorte d’équilibre.
-Comment ?
-Oui, il y a deux amours non partagés et deux amitiés tendres…
-Tiens, comment cela se fait ? C’est en équilibre comme tu dis. Pourtant, nous ne sommes que trois pour quatre situations !
-Cela pourrait se résoudre par l’algèbre !...
-Le tout c’est de poser l’équation. Et je ne suis pas certain que les mathématiques aient un quelconque pouvoir sur les sentiments.
-Et puis, cela risque de faire zéro = zéro !...

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