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Un Noël à la con.

-Tu veux qu’on fasse demi-tour ?
-Où tu vas ? C’est l’année de Zandrine…
-Merde !... Je prenais le chemin de chez Victor.
-Je me demande où tu as la tête ?
-Encore sous l’arbre de Noël de l’année passée, chez Victor.
-Oui, l’année passée, c’était le tour de Victor.
- Qu’est-ce qu’on s’était emmerdé !
-C’est une tradition. On s’emmerde toujours à Noël.
-Pourquoi on doit s’emmerder à Noël ?
-C’est l’occasion de s’emmerder qui compte. On s’emmerde à Noël, parce que si on ne s’emmerdait pas, ce ne serait pas Noël.
-En voilà un raisonnement ! Et si je te disais que je m’emmerde autant à la nouvelle année ?
-Je sais bien. Toi tu t’emmerdes toujours partout.
-Ce n’est pas vrai. Je m’emmerde quand c’est lourd. Et chez Victor, ce l’était particulièrement.
-Tu dis ça parce que c’est mon frère. C’est ma famille que tu n’aimes pas.
-Non. Pas que ta famille. Chez ma sœur Zandrine, ce ne pourra pas être pire, on a atteint des sommets l’année dernière, mais on s’emmerdera quand même, c’est fatal…
-Dis tout de suite que Victor est plus con que Zandrine.
-Non. Ils se valent. Mais chez Zandrine, on est plus à l’aise. On ouvre la télévision et on peut fermer les yeux au spectacle navrant de circonstances.
-Tu parles. Et ta soeur qui n’arrête pas de commenter, même ce qui est incommentable, comme l’arrivée du père Noël chez Patrick Sébastien ou, ça va être sans doute pire, le truc-machin de Guillaume Durand…
-Pourvu qu’on ne se farcisse pas la quatrième prédication du père Cantalamessa en présence du pape et de ses collaborateurs de la curie romaine. Elle a un côté mystique qui m’inquiète…
-Et si on n’y allait pas ?
-Qu’est-ce qu’on ferait chez nous jusqu’à minuit ?
-On s’emmerderait pire encore.
-Je ne te le fais pas dire.
-Oui. Avant, on s’emmerdait tout autant, mais on ne le disait pas. Il a fallu que tu commentes. Voilà cinq ans que tu commentes et on s’emmerde de plus en plus.
-Dis tout de suite, que si on s’emmerde, c’est ma faute ?
-En un sens… Qu’est-ce que t’as besoin de ricaner quand mon frère ou sa femme en raconte une ?
-T’as vu comment ils sont ? D’année en année ça descend. Ce n’est même plus l’almanach Vermot. C’est dépassé. C’était encore trop fin.
-Parle pour ta sœur et le beauf qui perd ses dents quand il rie par avance de la « bien bonne » qu’il a lue dans « Fou rire » de la semaine avant.
-Au moins quand il perd son râtelier, c’est drôle.
-Oui, ce serait drôle, s’il ne le faisait pas exprès.

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-Tu crois que pour faire rire, il le fait exprès ?
-On verra cette année… si c’est pas prémédité ?
-On n’a pas d’autres solutions. Faut se les farcir…
-Oui. Ce serait plus drôle, si on se faisait inviter dans une autre famille.
-Pourquoi ?
-Là, on s’en fouterait complètement. On serait plus cool. On partirait quand ça nous paraîtrait chiant…
- Ça reviendrait au même. On finirait pas la soirée…
-Tu crois que c’est pareil partout ?
-Sans doute.
-Pourquoi les gens ne se révoltent-ils pas, plutôt que « prendre du bon temps » au coup de sifflet ? C’est le calendrier qu’est con ! Pourquoi on doit penser à la famille le 25 et rigoler le premier, tout ça à date fixe. Et si moi je prétends rigoler le 25 et faire la gueule le premier de l’an ?
-La Noël, c’est une sorte de commémo, pareil le nouvel an… Personne n’y coupe… des milliards de gens s’emmerdent ces deux jours-là, sans l’oser pouvoir dire…
-Je me demande, si on ne fait pas une crise de mélancolie au mot « fête ». Le désir qui vient par bouffée de se flinguer aux douze coups de minuit.
-On ajouterait le treizième qui ferait pan, et on pourrait dire qu’on les a eus. Ils seraient bien emmerdés…
-Penses-tu… la Noël suivante, le beauf, un coup dans le citron, pourrait pas s’empêcher de perdre sa prothèse dans la crème de la bûche, rien qu’au récit de notre suicide.
-Je veux pas lui laisser ce plaisir.
-Moi non plus.
-C’est eux qu’on devrait flinguer.
-Faudra y penser.
-Voilà. On est arrivé. Je range la bagnole devant son garage. Dans l’état où il est déjà, y a pas de raison qu’il sorte…
(quelques instants plus tard)
-Bonjour Zandrine, bonjour chère sœur. On n’est pas trop tôt ? Et mon beauf ? Ha, le voilà ! Mais qu’il est beau avec la petite mèche et la moustache d’Adolphe… On va encore se tordre, je le sens, aux imitations ! C’est frappant la ressemblance ! Mais, comment tu fais ? Tu vas nous raconter ta dernière… Oui, juste pour nous, avant que les autres n’arrivent ?


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