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Effets de manche aux Nations Unies

Le Président Bush joue sa réélection ces jours-ci aux Nations Unies à New York.
Devant son opinion, il affronte les pays qui dès le départ de l’aventure irakienne, ont dit haut et fort que l’intervention américaine était une erreur. Et les événements leur ont donné raison. On n’a retrouvé aucune des armes chimiques recherchées et Saddam Hussein est toujours manquant dans le jeu de cartes, alors que toutes les semaines, on le dit aux abois et près d’être capturé.
Ce qui est plus grave, les Américains se sont rendu compte que l’Irak n’a jamais été une terre d’accueil du terrorisme international, comme l’Afghanistan. Le dictateur de Bagdad était bien trop jaloux de son autorité pour admettre des camps d’entraînement et des milices armées aux portes de ses palais. Tout au plus a-t-il été tenté d’entretenir quelques opposants à l’Iran, loin de Bagdad.
La libération du pays a réveillé le patriotisme irakien détourné sous la terreur de Hussein en un culte de la personnalité. Si bien qu’aujourd’hui les Américains, qui croyaient entrer à Bagdad en libérateurs, rencontrent un milieu hostile. Ils perdent chaque jour quelques soldats dans une lutte de résistance qu’ils étaient loin d’avoir imaginée. Ce qui démontre bien leur impréparation et leur méconnaissance du terrain. Modernes croisés, les voilà aussi haïs que Godefroid de Bouillon par les Arabes, à la prise de Jérusalem, le 22 juillet 1099, avec cet élément supplémentaire qu’ils impliquent tout l’Occident dans leur équipée, sans nous avoir demandé notre avis.
Ironie du sort, un commando d’une quinzaine d’hommes a secoué l’Amérique lors de l’attentat des Twin Towers à New York. Ceux qui, en Irak, harcèlent les troupes américaines sont, selon les polices US, à peine quelques centaines. Ainsi, cette grande puissance qui avait le projet de se lancer dans « la guerre des étoiles », qui poursuit son étude d’un bouclier permanent antimissile, qui peut aligner sur le terrain des centaines de milliers d’hommes suréquipés, vacille sous la poussée d’une poignée de fanatiques religieux !
Bien entendu ce n’est pas cela que le Président Bush a dit aux Nations Unies.
Il a bien d’autres soucis en tête, surtout en ce qui concerne l’argent.
Le budget proposé à la guerre en mai aux parlementaires de Washington est amplement dépassé, sans qu’aucune solution soit envisageable dans les six mois.
Réduit à demander de l’aide aux Nations Unies qu’il avait au départ écartées à la suite de l’opposition de la France, de la Chine et de la Russie au Conseil de Sécurité, le président Bush souhaite à présent une contribution de l’organisation qu’il avait grandement décriée.
Les rapports entre les nations qui s’étaient opposées à la guerre en Irak et son administration, se sont stabilisés. Nous sommes toujours des fabricants de chocolat, les Français de fromage qui pue et les Allemands de bière forte, pour l’opinion américaine rétive à des revirements, mais l’Administration Bush a compris qu’il est urgent d’arrondir les angles.
Comme c’est également le propos des nations qui ont dit non à la guerre contre l’Irak, l’actuelle cession des Nations Unies devrait être l’occasion de redire notre soutien à la démocratie américaine, mais de façon sélective et surtout pas dans ses initiatives guerrières.
Chirac qui s’est fait le porte-parole de l’Europe réticente, s’emploie à rattraper les maladresses en Irak. Comme nous, il espère convaincre Bush de laisser le futur commandement des opérations aux Nations Unies. L’intérêt de tous serait d’établir un calendrier pour mettre en pratique un cahier des charges qui rendrait l’indépendance de ce pays dans les six à neuf mois.
Mais les Américains ne l’entendent pas de cette oreille. Ils veulent garder la haute main sur le destin des irakiens et ne sollicitent qu’une aide sous leur contrôle.
Il y a des moments que faire cavalier seul, même pour la nation la plus puissante, devient difficilement supportable.
Il s’agit bien d’une bataille diplomatique – que n’a-t-on commencé par là ! Le désir de faire de l’Irak une démocratie exemplaire au Moyen Orient, n’a plus beaucoup de sens. Le départ de l’Armée américaine ne sera pas non plus le signal du cesser le feu de la guérilla. Celle-ci s’alimente en hommes et en matériel depuis les frontières poreuses de la Syrie et avec la bénédiction d’Al Qaida. C’est tout ce qu’on a gagné depuis la fuite de Saddam !
La traque terroriste en Irak est encore une utopie supplémentaire de l’Administration Bush.
Quand on sait que le véritable dispensateur en hommes et en matériel du terrorisme anti-américain est l’Arabie Saoudite, on se demande vraiment, six mois plus tard, quelle mouche a piqué Bush de se lancer dans la guerre contre l’Irak.
Pour en revenir à la question du début, à savoir la réélection du Président Bush, il est vraisemblable qu’il suivra le même destin que son père et passera à côté de son deuxième mandat.
Personne ne s’en plaindra, à commencer par l’opinion américaine et y compris la diaspora juive pour laquelle, cependant, Bush se dépense sans compter dans sa politique préélectorale, au point que l’on se demande aujourd’hui si ce n’est pas sur les conseils d’Ariel Sharon que Bush a lancé ses troupes dans un guêpier dont elles auront du mal à sortir indemnes.

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