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Fatum

Dans la fiction d’une démocratie active les petites gens sont inessentiels, inutiles donc inférieurs, par oukase d’un moindre être et, par conséquent, d’un même avoir, avec tout ce que cela implique de déterminismes et de destins arrangés.
Les gens remplissent des cases prédéterminées, tant d’ouvriers charpentiers, tant d’employés comptables. Ils ont l’impression d’avoir été faits sur mesure dans une matrice de quartier, comme on est de Sainte-Marguerite ou de Robermont. L’école n’est pour eux pas autre chose que le moule qui les assigne à une médiocrité prédestinée.
L’infériorité du plus grand nombre par rapport à la minorité de pouvoir est vécue comme la condition indispensable à l’équilibre social.
On ne peut pas lutter contre le fait établi d’une différence avant toute mise à l’épreuve et toute manifestation de l’intelligence, comme s’il était notoire qu’un riche ou un apparatchik (il n’y en a pas que dans les anciennes républiques socialistes de l’Est) outre les avantages en nature, ait aussi celui des dons et des signes favorables par rapport à un pauvre.
Ainsi, les classes inférieures sont détruites dans leur ambition par l’altérité ordonnée des autres, ceux qui savent, en opposition avec ceux qui, par avance, ont été considérés comme ne sachant pas.
On tient un double discours à destination de la multitude. On lui dit qu’elle a toutes les capacités et que le système dans lequel elle vit pourrait la placer aux places les plus élevées. Puis on lui déclare qu’à tout jamais, elle n’aura les capacités nécessaires à la propre conduite de ses affaires. C’est trait pour trait, le schéma de la démocratie par délégation de pouvoir.
Etonnons-nous que les petites gens ne puissent trouver la volonté d’une détermination, sans entrer en conflit avec leurs délégués. Ces derniers sont poussés aux premières places par d’étranges pratiques ou même le cahier des charges, pourtant léger, du suffrage universel, n’est pas respecté.
L’obéissance passive que suggère le suffrage universel par délégation de pouvoir engendre le ressentiment et prescrit ses limites. La croyance non vérifiée qu’il n’y ait pas de meilleur système pour la conduite des affaires empêche la frustration populaire de se commuer en haine.
La haine, c’est le discours de l’extrême droite. On nous le dit dans la crainte que nous y cédions ; mais nous savons d’instinct que le discours fasciste ne peut être le nôtre ; car, sur le temps que le suffrage universel par délégation de pouvoir nous ignore, le totalitarisme de droite nous agresse et nous persécute tant que nous ne lui appartenons pas, cela malgré nous et avec le ressenti d’une violence plus grande encore.

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En choisissant de montrer une vie politique et sociale dichotomes, le pouvoir sait ce qu’il fait. Il empêche la réflexion sur une démocratie qui offrirait d’autres choix que le suffrage universel par délégation de pouvoir. Pourtant d’autres manières de vivre ensemble existent dans un cadre démocratique. La démocratie directe et autogestionnaire en est un, parmi d’autres, comme le référendum est un des moyens de rendre à l’agora des Anciens une situation meilleure. Enfin, il suffirait d’inclure une clause restrictive dans la durée non renouvelable du mandat unique pour éliminer la plupart des inconvénients du suffrage universel par délégation de pouvoir. Il conviendrait ensuite de régler la question financière de sorte que plus aucun responsable ne finisse millionnaire des deniers publics.
On voit immédiatement que les objections des gens de pouvoir tiennent plus à la préservation de leurs privilèges qu’à tout autre considération.
Un des réflexes premiers de défense des personnels de pouvoir est évidemment d’accréditer la thèse que tout ce qui tend à déconsidérer le système actuel est une démarche Front national.
Voilà qui place les démocrates sincères dans le système par délégation de pouvoir absolu en porte à faux avec une opinion publique manipulée.
C’est une tâche considérable que celle de faire admettre qu’aucun système n’est pérenne et qu’il faudra bien un jour, notamment devant les abus des concentrations capitalistes, envisager des réformes profondes de notre système qui est arrivé au bout de sa logique et qui est en passe, dans son déclin, d’offrir des avenues de pouvoir au Vlaams Blok.

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