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La théorie du « tout pour moi, rien pour les autres »

Très tôt, j’ai su que le monde dans lequel nous vivons usurpe les termes par lesquels on le définit. La société, quelle fût belge, française ou allemande n’avait pas droit à certains qualificatifs comme « humaniste » ou « démocratique », ni même qu’on la qualifiât de « bourgeoise » (être bourgeois auquel beaucoup de gens aspirent, n’est pas représentatif de la population.)
Le « Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité entre les hommes » de Jean-Jacques Rousseau a suscité en moi plus de questions que de réponses.
« Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d’horreurs n’eût point épargnés au genre humain celui qui arrachant les pieux ou comblant le fossé eût crié à ses semblables : Gardez-vous d’écouter cet imposteur ; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n’est à personne. »
Les textes magnifiques de Jean-Jacques m’ont fait réfléchir sur le droit naturel à être soi-même, libre et sans entrave, le droit attaché à la propriété étant conventionnel et souvent arbitraire.
Ceci nous conduit à l’examen du « conventionnel ».
Tous les antagonismes aujourd’hui viennent de l’antinomie entre liberté et convention.
Sans ordre et sans loi, nous serions vraiment libres selon Hobbes qui dénonce le caractère conventionnel de l’autorité du pouvoir politique sur l’homme. Mais, si vous n’aviez pas une autorité politique capable d’accepter que vous mettiez deux euros dans la fente du caddie, vous verriez le chaos s’installer sur le parcage du supermarché !
Quelles sont les raisons qu’a une société libérale de conserver un pouvoir politique qui prélève jusqu’à 50% des héritages selon les degrés de parenté ?
C’est une question qu’il faudrait poser à Didier Reynders.
Macpherson pense que la société se réduit à un ensemble d’individus libres et égaux, liés les uns aux autres en tant que propriétaires de leurs capacités et de ce que l’exercice de celles-ci leur a permis d’acquérir. » Quant à la société politique, elle n’est qu’un artifice servant à protéger cette société et à maintenir l’ordre dans ses rapports d’échange.
Les gens de gauche me reprochent que je sois de droite et les gens de droite me reprochent que je sois de gauche. Finalement les uns et les autres disent la même chose. Ils dénoncent l’absence d’un raisonnement euristique historique du capitalisme, les libéraux parce qu’ils en sont toujours à l’empirisme de Locke et les socialistes parce qu’ils ont abandonné le principe de la lutte des classes qui avait au moins le mérité de clarifier les antagonismes.
Ce qui fait qu’aujourd’hui, le discours d’un Di Rupo oscille sans arrêt entre un dirigisme basé sur le bon vouloir, « la charité » des riches si l’on veut, et une radicalité puisée dans le discours de Hobbes.
Les libéraux et les socialistes se sont ralliés à la pratique qui consiste à se placer dans le vent de l’électeur (1). D’éclaireurs, ils deviennent éclairés et, à leur niveau, c’est une chose profondément méprisable, qui n’apporte rien comme réflexion servant aux projets de société.

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Macpherson a défini l’individualisme possessif par 7 propositions :
1. L’homme ne possède la qualité d’homme que s’il est libre et indépendant de la volonté d’autrui ;
2. Cette indépendance et cette liberté signifient que l’homme est libre de n’entretenir avec autrui d’autres rapports que ceux qu’il établit de son plein gré et dans son intérêt personnel ;
3. L’individu n’est absolument pas redevable à la société de sa personne ou de ses facultés, dont il est par essence le propriétaire exclusif ;
4. L’individu n’a pas le droit d’aliéner totalement sa personne, qui lui appartient en propre ; mais il a le droit d’aliéner sa force de travail ;
5. La société humaine consiste en une série de rapports de marché
6. Puisque l’homme ne possède que la qualité d’homme que s’il est libre et indépendant de la volonté d’autrui, la liberté de chaque individu ne peut être légitimement limitée que par les obligations et les règles nécessaires pour assurer à tous la même liberté ;
7. La société politique est d’institution humaine ; c’est un moyen de protéger les droits des individus sur sa personne et sur ses biens, par conséquent à faire régner l’ordre dans les rapports d’échange que les individus entretiennent en tant que propriétaire de leur propre personne.
La société anglaise des XVIIme et XVIIIme siècles, d’après laquelle se serait fondée la société capitaliste actuelle, s’est bâtie sur les principes égalitaires ci-dessus énoncés par Macpherson, qui déboucheront un siècle plus tard sur la théorie de Marx « Das Kapital » traitant des mêmes problèmes de liberté et d’aliénation.
C’est assez surréaliste que Louis Michel et Didier Reynders s’en réclament, citant à tout propos un disciple de ceux qui précèdent : Alexis de Tocqueville dont les écrits traduisent les mêmes convictions.
Il ne s’agit rien moins que d’un dégoûtant empirisme qui conduit le mouvement libéral aujourd’hui vers la mondialisation, le profit honteux et le maquereautage des populations exploitées.
Il reviendrait tout de même aux mouvements socialistes de se ressaisir et de redéfinir une société « libérale » comme l’entendaient les précurseurs.
Ce serait la moindre des choses.
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1. Le sentiment que les bourgeois incarnent l’avenir, donc la modernité, est tellement répandu parmi les couches les plus misérables de la population que le parti socialiste est obligé d’en tenir compte, au détriment de la logique de ce qu’il revendiquerait si son électorat n’était pas totalement subjugué par le leurre d’une élévation par le travail capitalisé, qui lui fut suggérée dans les années 50 et qui se poursuit aujourd’hui, illusion collective dont les libéraux recueilleraient les fruits, si le PS ne s’était lui aussi positionné en parti bourgeois concurrent.

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