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En liberté surveillée.

Ne nous rengorgeons pas en surestimant les valeurs dégagées par notre démocratie.
Et d’abord, est-ce un modèle ? Quel est le pays qui s’en est inspiré avec bonheur ?
Les efforts de Bush en Irak pour instaurer une démocratie à l’occidentale ont été inutiles.. L’Afghanistan est une démocratie sous perfusion, et sous surveillance.
Oui, la Russie s’est débarrassée du communisme toute seule et a adopté un pluralisme des partis. On y élit un président au suffrage universel. De l’assistanat des populations à un « help yourself » le plus conforme à la gestuelle économique, ce pays est passé d’une dictature à une démocratie, selon nos critères.
Au moment où paraît indiquée la bonne direction, les députés russes adoptent une loi sur l’« extrémisme » politique !
Aussitôt, nous nous récrions : si la Russie s’éloigne de la démocratie pour retomber dans ses travers de régime fort, c’est qu’elle n’était pas prête d’ouvrir le pays à la liberté !
Quand nous ne nous autocélébrons plus, nous nous apercevons que les réformes proposées à la Douma, si elles n’ont pas force de loi chez nous, sont fort proches de nos pratiques !
Par des moyens de pression, des rapports de force entre le pouvoir des riches et la faiblesse des pauvres, nos bons sentiments et nos convictions démocratiques cachent en réalité une perverse dictature.
L’extrémisme politique en Europe occidentale existe. Il est toléré, parce qu’il est neutralisé, donc rendu inoffensif. Les partis d’extrême droite ou d’extrême gauche sont exclus ou se sont exclus de l’organisation politique. Des lois écrites ou non existent - que les Russes n’avaient pas - qui les étranglent financièrement. Ils sont neutralisés par l’hostilité intéressée que leur accordent les médias et sont réduits à leur plus simple expression par l’absence chronique du sens critique des citoyens, sans qu’on sache vraiment si l’extrémisme consiste à vouloir un Etat plus juste ou si l’extrémisme ne se cache pas dans un centre politique hurlant au loup et criant à l’aventure dès que l’on remet en question le système capitaliste établit comme la clé de la démocratie.
La lutte contre l’extrémisme est d’application depuis longtemps chez nous, mais de manière feutrée. La pensée libertaire ou extrémiste en Europe est sous l’étroite surveillance des polices d’Etat, étouffée par le manque de moyens et d’éditeurs, boycottée dans sa diffusion par la grande presse et les télévisions qui ignorent les raisonnements philosophique et économique estimables, dès qu’ils émanent d’un milieu « non autorisé ».

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Les écoutes téléphoniques des autorités n’ont jamais cessé d’être l’obsession des démocraties, alors que toutes y sont implicitement engagées.
Enfin, s’il n’y a pas de prisonniers politiques dans nos démocraties, c’est qu’hypocritement nous n’avons jamais admis qu’un délit ait été perpétré pour raison politique, laissant à la législation du droit commun le soin de clôturer les dossiers et de punir les infractions.
En Belgique, les Cellules communistes combattante (CCC) (1983-1986) étaient constituées de militants issus des luttes sociales et politiques. Que l’on soit ou non d’accord avec ce genre d’activité politique, indépendamment de tout jugement moral, ces jeunes gens ont écopé du maximum et leur action n’a pas été considérée comme une action politique « violente » mais comme relevant du droit commun.
La loi est à ce niveau un instrument de régulation des peurs collectives. Quoique un crime reste un crime, il est plus facile de condamner un crime crapuleux qu’un crime politique.
Cela aurait-il changé l’opinion ? Non.
Les citoyens avisés savent que la violence d’où qu’elle vienne est détestable. Par contre, cela aurait créé un « mauvais » climat. L’Europe l’aurait trouvé détestable, comme ce fut le cas pour les Brigades rouges en Italie.
Bien entendu, les actions terroristes des Intégristes de l’islam ont changé la donne depuis l’attentat des Twin Towers à NY, tout en ne surprenant pas les polices « spéciales » des démocraties occidentales depuis longtemps appliquées à noyauter les milieux musulmans.
C’est en partie grâce à l’émotion et à la frayeur entretenue par les Autorités en collaboration avec les médias depuis cette tragédie que sont nés des réseaux de surveillance, des caméras, des polices privées, etc. de sorte que le citoyen européen n’est pas éloigné d’être à égalité du citoyen russe. Il est en liberté surveillée !

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