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Henri Guaino, sarkolittérateur.

Après la conférence de presse de Nicolas Sarkozy et de la critique à chaud de ce qui a été dit, ce n’est pas la première fois que j’entends parler du nègre du Président de la République, Henri Guaino, qui lui aurait mis en forme son intervention devant la presse internationale.
Le lundi 7 janvier, c’étaient Raphaëlle Bacqué du Monde et Jean-François Kahn qui rappelaient la collaboration entre un homme public et un écrivain « à la carte ».
J’ai trop de respect pour ceux qui tentent de vivre de leur plume pour faire un procès d’intention à Monsieur Guaino. Le bougre ne s’en tire pas mal. Les succès de son patron sont un peu les siens.
Comme tous ceux qui rament afin de sortir un bon texte dans un délai relativement court, il arrive à Monsieur Guaino de faire des emprunts parmi des confrères plus illustres. Cela démontre chez-lui une culture générale et de bonnes lectures.
Par le passé, de grands écrivains ont plus ou moins omis de citer ceux à qui ils ont emprunté un argument voire une partie de leurs meilleurs textes. Il n’y a pas de mal à s’inspirer de bons auteurs.
Des journalistes, des revuistes, des dramaturges, des auteurs comiques de théâtre, des philosophes même, sont des buvards qui compilent, annotent et transposent, pas que les fables d’Esope ou les comédies d’Aristophane.
On ne le voit que trop au registre des bons mots : on s’en dispute la paternité quand ils sont pertinents ou spirituels. Dans le cas contraire, c’est faire preuve de mauvais goût et manquer de jugement que de se les approprier.
Est-ce à dire qu’une idée nouvelle ne jaillit jamais du fatras d’idées anciennes pillées et repillées ?
A part calquer de A à Z les écrits d’un tiers sans même se donner la peine d’en rien changer (cette paresse s’appelle un plagiat), des choses inédites jaillissent parfois des à-peu-près et des redites. Reprendre la pensée d’un auteur en la prolongeant de la sienne est plutôt flatteur pour celui-là, même si l’emprunteur oublie de citer ses sources.
Henri Guaino aime se lancer dans des amalgames historique et rhétorique. Si l’âme de Guaino n’était qu’adolescente, empruntant à Ronsard, où serait le mal ? Hélas ! son zèle est plus terre à terre. Ses sources, il les détourne de leur sens pour en faire les contrevérités de ce pourquoi elles avaient été créées. Ce nègre-là récupère les auteurs avec les citations. Il ne les plagie pas, puisqu’il les cite ; il fait pire, il leur attribue une carte de l’UMP.
Victor Hugo, Charles de Gaulle, Léon Blum, Jean Jaurès sont bel et bien morts, Edgar Morin, pas encore.... qu’il le veuille ou non, l’ardent Guaino le met aussi au service de son patron.
Nous voilà donc partis pour une « politique de civilisation » livre du touche-à-tout Edgar Morin.
On marcherait comme un seul homme, car si Edgar Morin est mondialement connu, qui l’a lu en France, hors certains milieux intellectuels que les Sarkozy boys ne connaissent pas ?

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J’avoue avoir parfois cédé à mes démons et m’être approprié un texte ou l’autre qui me semblait parfaitement convenir à ma pensée et qui avait l’avantage d’être incomparablement mieux rédigé que je ne l’eusse fait. Mais jamais, au grand jamais, il ne me viendrait l’idée d’appeler à mon secours un homme de talent – mettons un homme politique de gauche - pour l’habiller en Déroulède !
Car la politique de civilisation d’Edgar Morin va à l’encontre de celle du président de la république.
Reste l’hypothèse selon laquelle Henri Guaino comprendrait difficilement les philosophes et qu’il a pêché sur Wikipédia et sur les blogs de critique, des textes de Morin pour une commande urgente de son patron.
Notez, puisque je suis en vaine de sincérité, Edgar Morin, je ne l’ai pas lu et tout ce que j’en peux dire sort d’une interview que j’ai sous les yeux dans laquelle l’écrivain récuse absolument « le nouvel humanisme » élyséen qui serait calqué sur le sien.
Si lui-même ne s’y retrouve pas, qui donc le ferait, sauf les MM de le présidence, drôlement gonflés ?
Le sarkozysme est un nouvel humanisme qui aurait établi sa Sorbonne au Fouquet's, recevrait Kadhafi en nouveau Socrate et aurait Platon-Guaino, Vincent Bolloré, Dassault et Lagardère pour disciples. La déesse raison serait Carla Bruni qui aurait son temple à Eurodisney.
On voit d’ici comme les Français apprécieront cette civilisation-là !
Foin des vieux grecs, nous voilà quelques siècles plus tard au Quattrocento, toujours avec Carla en déesse du printemps. On pourrait souffler à Guaino que la belle du président ressemble à Simonetta Vespucci, le modèle de Botticelli. Un saut sur Wikipédia pour s’en assurer, et voilà une page de Guaino pour le futur discours du mariage.
Dans l’alternative où Guaino serait payé à la ligne comme Balzac le fut à ses débuts, je retire la dernière moitié de ce texte et m’en tenant à la première, salue l’homme par les temps difficiles que traversent la profession d’écrivain public, et le prie de croire à toute ma sympathie.
Les râleurs diront ce qu’ils voudront, ce mardi, c’était du bon travail. Il y avait comme de l’idée dans la compilation et si l’on y ajoute le métier de l’acteur, on applaudit la performance !

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