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La Télé-pute du royaume.

Qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas de pub à la télé n’empêchera pas les programmateurs des chaînes de nous proposer leur merde à longueur de soirée. Sauf que sans pub, les voilà contraints de boucher les trous.
Cet outil qui aurait pu être didactique et divertissant, au lieu d’élever le téléspectateur l’abaisse depuis un quart de siècle, au point qu’un programme qui ne dépasse pas le caniveau fait de l’audience et qu’un autre procédant d’un meilleur esprit n’est regardé que par un nombre réduit de personnes, si bien que l’on dit que ce dernier n’est vu que par des intellos ; et d’ajouter : la télé doit rester un passe-temps populaire.
Avec ça on a tout dit et rien dit en même temps.
Les causes de cet abaissement général, de ce mauvais goût collectif, ne sont-elles pas dans les tâtonnements des débuts, lorsqu’on a trouvé que plus on flattait la vulgarité, les bas instincts et la grosse plaisanterie, on faisait de l’audience ? La concurrence par l’audimat n’a-t-elle pas tiré les programmes vers le bas ?
Le public s’est installé dans la facilité, parce qu’on l’y a contraint. Pour ceux qui n’ont que ce passe-temps de soirée, c’est-à-dire le plus grand nombre, c’est certain qu’il faut du divertissement et de la légèreté, afin de supporter la gueule du contremaître et du chef de bureau le lendemain matin. On n’a pas vu, qu’il y avait dans le divertissement deux voies possibles. La facilité arrange aussi les programmateurs. Il est plus aisé de propulser des Sébastien et des Arthur en vedettes de l’audience et pour le reste de s’accoupler avec la télévision américaine pour acheter des idées, des jeux et des soap-opéras, que d’intéresser et d’enrichir les gens de connaissance en les divertissant.
Les télévisions commerciales servent la grosse soupe à la louche.
Les chaînes subventionnées par le contribuable ont suivi sur la pente fatale. Si bien qu’aujourd’hui, le choix se porte en majorité sur la pantalonnade et les feuilletons, dans une concurrence folle des chaînes, vers les abîmes du mauvais goût ; tandis que les spectacles et les émissions de qualité sont logées aux petites heures, quand l’ouvrier agricole ronfle déjà depuis longtemps dans sa soupente.
Il n’y a pas pire moquerie que celles des veaux de l’audiovisuel qui s’esbaudissent des minuscules audiences d’ARTE et de la RTBF à ses bons moments, parce que ces chaînes – surtout la première – essaient parfois de sortir des sentiers de la honte et du lieu commun.
Le projet en France de dégager antenne 2 de la publicité et aussi de l’audimat va peut-être changer la donne.

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C’est curieux, souvent la RTBF sert de poisson pilote aux chaînes françaises en programmant avant celles-ci des spectacles et des films co-financés. Par contre, pour les initiatives de la logistique, c’est le contraire. La RTBF et les spectateurs attendent un décret français sur l’audiovisuel pour en discuter le bien fondé en Belgique. C’est ainsi qu’une quinzaine d’associations, représentant les usagers de la radio-télévision de service public, se sont réunies jeudi afin de donner leur avis sur l’éventuelle diminution, voire la suppression, de la publicité à la RTBF.
C’est un débat ancien qui, comme tout en Belgique, pourrit dans les saloirs de la vènerie flamendo-belge, les Wallons comptant pour du beurre. Les Flamands ont choisi la pub et la suppression de la redevance. Le plan Marshall oblige, nous crachons toujours la redevance au bassinet, pensionnés à petit revenu compris, tout en nous farcissant les bonimenteurs de poudre à lessiver.
La pub imposée est en soi une honte et une vulgarité. Elle est aussi une impolitesse en choisissant les moments les plus « tendus » d’un film pour s’introduire chez nous vanter un promoteur qu’on retrouve dans des boîtes au supermarché le lendemain. On a beau dire, si c’est encore Danone qui passe, je vais pisser, on reste confondu d’une telle désinvolture. Le comble, c’est que ça vend mieux quand c’est baratiné en plein grand film ou avant un match de foot, que devant une émission culturelle, non pas que les sportifs soient plus cons que les esthètes, mais c’est qu’il y en a plus ! C’est dire que les publicitaires ne sont pas prêts à lâcher leur bout de gras !
La question de savoir si on continue de faire de la merde ou si l’on élève le débat, doit faire l’objet d’une véritable étude scientifique, approfondie et publique, comme tout en Belgique joyeuse et linguistique. Dame les experts sont partout et pas que sur TF1.
En attendant Philippot, grand vizir à la RTBF par la grâce des jeux politiques, se répand partout que c’est un débat vieux d’au moins deux ans. On sent qu’il aimerait poursuivre à nous servir la merde sous emballage de pub, c’est plus facile pour le choix des programmes et la garantie d’un bon audimat. La qualité, c’est de la corde raide ! Et puis, faut-il le dire, le personnel actuel est-il capable de raffiner les plaisirs, d’élever les débats, alors que les rediffs battent leur plein ?
Le diplôme n’est pas tout. Souvent l’aptitude n’est pas en rapport…
On ne sait pas.
Philippot en appelle à la prudence. Le téléspectateur s’abêtit d’année en année si bien qu’il ne sera bientôt plus capable de comprendre même la langue de Patrick Sébastien – c’est dire ! - et qu’il se résoudra un jour qui n’est pas si lointain à se scotcher définitivement sur sa console de jeux.
Enfin, de merveilleux outil didactique, en n’y prenant pas garde, les étranges lucarnes finiront par avoir la forme d’une lunette de water-closet depuis laquelle il sera plaisant de chier sur la gueule des rois du rire et des lieux communs de la pensée contemporaine.
On se demande comment un designer n’y a pas encore pensé ?

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