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République des Livres et Rebuts de presse.

A part les propriétaires des moteurs de recherche et les hébergeurs, comment les blogueurs se font-ils du blé ?
Non pas que je veuille me payer des vacances aux frais de la princesse, mais parce que mon naturel méfiant me porte à croire que le geste gratuit n’est qu’un leurre qui sert à endormir la méfiance de certains lecteurs tatillons. Si l’on excepte des milliers de blogs d’une gratuité parfaite instrumentés par des internautes innocents, comme dans toute invention en expansion, il doit bien y avoir quelques grands fauves tapis au point d’eau qui boulottent de bon appétit les brebis égarées « to draw one’s sword ».
A côté du plaisir d’écrire, il y a des intérêts, dont le principal est celui tout con de faire du fric. N’est-ce pas le point de départ de toute préoccupation primaire en ces temps de capitalisme avarié ?
Ne dit-on pas qu’un artiste qui gagne sa vie par son travail a du talent ? Sortir de l’anonymat n’est-ce pas la meilleure façon de s’en persuader ?
A côté des avides, des blogueurs se taillent une réputation, avec celle de leur patron.
C’est le cas d’une grande partie des blogs dont l’intention secrète ne résiste pas à la sagacité du lecteur, lorsqu’ils ne sont pas carrément frappés du sigle du parti qui les emploie. Ils se dépensent à toutes sortes de causes desquelles ils espèrent un retour qui soit à la mesure de leur « désintéressement ». On pourrait imaginer que j’ai un compte dans certaine officine qui voit dans le parti socialiste une des sept plaies d’Egypte. Personne ne devinerait en moi, l’amoureux déçu d’une gauche victime depuis les années 60 d’une social-démocratie, co-responsable aujourd’hui de la débâcle économique.
Et pourtant…
Les blogs à caractère culturel n’échappent pas au péché mignon du faire-valoir de service. Il y a là un filon déjà exploité par les journaux. Parmi les hébergeurs de qualité, on peut citer le journal Le Monde. Le prestige du journal attire le lecteur et si en plus le blogueur est un critique connu, il n’y faut plus grand chose pour que la publicité assure les fins de mois de l’utilisateur.
La notoriété s’acquière rarement sur le seul contenu d’un blog, même s’il est de qualité. Il y faut un parfum extérieur, une école prestigieuse, un gros scandale, une parenté opportune ou un peu de talent. Celui qui, malgré les atouts de l’hébergeur renommé et des murmures flatteurs de l’establishment, fait un flop, il aura bien du mal à trouver un nouvel hébergeur du renom de celui qui l’abandonne.
En littérature-papier, c’est pareil. Christine Angot doit se faire du mouron après son dernier couac sur ses amours avec Doc Gynéco, à moins qu’elle ne soit la deuxième pantoufle du chien de Sarko, la première étant réservée à son sigisbée…
D’abord, être connu ou pas, là est la question.
Quand on s’appelle Pierre Assouline, c’est facile. Le journal Le Monde choie son blog, au point de faire de son créateur un pigiste. Le succès est assuré.
La République des Livres de Pierre Assouline est un blog évidemment de qualité et intéressant dans la manière de présenter les livres. Justifie-t-il pour autant l’engouement du public au point d’en faire un must parmi les blogs du genre ?
C’est toute l’ambiguïté d’un travail rémunéré. L’auteur est-il vraiment aussi libre qu’il le dit ?
J’ai bien aimé l’hommage à Jacqueline de Romilly. La Grèce est le berceau de notre culture. Le problème, c’est que le public des blogs attend des critiques au fer rouge. Je n’ai pas l’impression que même dans des jugements plus sévères, la critique de Pierre Assouline dépasse le jeu « contenu » de l’aimable partition. Compliment ou critique, on croit lire un complément du Monde.
Le nombre des réactions du public est impressionnant. C’est un succès certain.
Qu’un blogueur aime les livres, même mauvais, n’est pas répréhensible en soi. Au contraire, il y a une solidarité qui se noue avec les lecteurs de toute sorte ; tant nous craignons tous avec Assouline que l’engeance s’appauvrisse. Même le lecteur qui ouvre un volume de Romain Sardou est sacré !
On aura beau dire qu’un livre, c’est aussi un arbre qu’on abat, le plaisir de l’ouvrir et de le lire comme on veut et quand on veut, reste incomparable par rapport au support électronique d’Internet.
Un autre blog des Livres mérite aussi une mention, c’est « Rebuts de presse » avec comme justificatif d’édition « Tous les jeudis la presse décodée par l’un des chroniqueurs du service livre du nouvel Obs. »

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Le travail est ici plus décapant. Le déshabillage des mauvais et des « bons » livres est plus alerte. Je regrette que les noms des chroniqueurs ne soient pas repris sous la forme d’un générique quelque part, ou mieux, en-dessous de l’article du jour.
Quoique je ne sois pas d’accord avec l’auteur de l’article « Ainsi parlait Sollersoustra », surtout dans l’appréciation d’un des plus grands auteurs du siècle dernier : Louis-Ferdinand Céline, il y a dans ce papier des choses drôles sur Sollers.
Sollers sait que le talent n’est pas suffisant pour vendre. Alors, il se démène pour occuper le terrain. A défaut d’être un grand écrivain, il est un bon représentant de commerce. C’est toujours ça.
En général, le manque de respect me plaît davantage qu’une courtoisie de convention.
Mes lecteurs doivent savoir cela.

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