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L'art de paraître en politique

On ne peut exprimer un choix en politique qu’en fonction de ceux qu se présentent. C’est-à-dire un très faible pourcentage de la population. Je ne veux pas croire dans un choix aussi limité, on puisse considérer que l’exercice de la démocratie soit possible, fussent ces quelques milliers de personnes les meilleures sur les dix millions.
Voici dans sa plus parfaite subjectivité le processus en marche :
Être beau ou être laid, bien discourant ou malhabile, ces facteurs physiques et psychiques individuels départagent souvent les candidats.
On sait qu’à l’embauche, les patrons se déterminent parfois sur quelques minutes d’entretien. La dépolitisation des foules allant bon train et l’obligation de celles-ci de voter, font que, comme les patrons, l’écrasante majorité des électeurs se déterminera sur le chemin du bureau de vote, voire à l’intérieur de celui-ci.
Les paris sont ouverts, ce sera à qui aura le physique « avantageux » le plus mis en valeur et gare aux crocs en jambe des adversaires par des révélations de dernière minute sur « l’honnêteté » des postulants.
L’art de passionner les foules de leur propre ego est la clé du nouveau deal des « commerçants de juin ».
La plupart des portraits reproduits sur les affiches de quelques mètres carrés sont évidemment retouchés. L’un fera effacer son double menton, l’autre exigera qu’on le représente du côté de son « bon » profil, un troisième s’adjugera quelques mèches supplémentaires.
Les confrontations en Belgique sont moins déterminantes que partout ailleurs et surtout qu’aux Etats-Unis. La raison tient dans les programmes fort proches qui convergent tous au centre. Seuls certains des petits partis osent attaquer de front l’économie libérale dans ses excès. En l’espèce le seul débat qui eût été intéressant aurait dû opposer un intégriste libéral à un altermondialiste, voire un marxiste post-communiste à un social-démocrate. Il ne se fera pas. Les petits partis n’ont pas droit à la parole, surtout en se mesurant aux grands.
L’exposition au public de la personne du candidat à l’élection, fait partie des écoles de marketing, selon les mêmes critères de la vente d’une poudre à lessiver.
C’est ainsi qu’au lieu de servir une cause, d’émettre des idées et de parler des sujets qui préoccupent tout qui s’intéresse à sa propre situation sociale et professionnelle, le candidat reçu avec mention de ces écoles du paraître se sera habillé de façon à ne pas détoner par rapport au plus grand nombre, il sortira de chez le coiffeur (sauf si c’est un petit parti de gauche) et aura dompté une nervosité bien naturelle, si c’est sa première tribune, par une discipline des gestes et du port des mains.
On ne saura pas ce que le candidat propose comme politique, mais on sera assuré à l’évidence qu’il la suivra « avec fermeté » ou comme Di Rupo « avec simplicité ».
L’homme politique, bien avant l’ère Sarkozy, est entré dans la religion du people et tous ses efforts tendent à ce qu’il soit intronisé « star ». Le chemin est fait presque à moitié quand des stars des faits-divers, du spectacle ou du journalisme tentent d’être aussi stars en politique.
Plus la crise de confiance augmente, plus les candidats jouent sur leur présentation. Avoir « l’air honnête » équivaut à l’être officiellement.
Plutôt que convaincre, en ces temps difficiles, c’est plus efficace de séduire.
Si bien qu’au physique, un grand aura plus facile de convaincre qu’un petit, et un mince, qu’un gros.
Il ne serait pas difficile à débusquer le candidat, comme Berlusconi, qui se serait fait poser des implants, et lifter, parmi les membres en vue des partis.
Quand on voit l’engouement pour les matches du Standard et d’Anderlecht, il est bon que le candidat le soit aussi, mais de façon ostentatoire. Le sportif candidat gagne en popularité. Tout l’art c’est d’en répandre le bruit. L’athlétisme correspond à un public populaire, ainsi que la pratique du vélo. Le jogging est passe-partout, mais plaît davantage à Ecolo. Les élus flamands se battent pour qu’on les photographie au Gordel. Tous les candidats de la Région wallonne sont supporters du Standard, tous les Bruxellois le sont d’Anderlecht, évidemment.

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Ainsi, la société marchande aura réussi à faire que les derniers bastions de l’éthique tombent dans le tout commercial.
Le système aura eu raison de la notion du « bien public » pour faire des élections une foire d’empoigne où c’est le plus habile, le plus friqué et la plus belle gueule qui l’emporte.
Faire de la politique, c’est assurer son avenir, se donner un statut et s’arroger des situations rentables un peu partout.

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