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Le cas De Wever.

On l’a vu lors de la conférence de presse de Bart De Wever : en politique, il y a un temps pour la gesticulation, et un autre pour l’esprit de conciliation.
Un démagogue comme Bart De Wever sent de la manière dont il doit paraître afin de servir les desseins de sa politique.
Il devine les choses à dire plus qu’il ne les prépare, selon le milieu où il les prononce. C’est un intuitif.
Tantôt l’un, tantôt l’autre, il y a au moins deux Bart. Lequel s’avance placidement vers l’estrade, s’assied lourdement au centre, tandis que ses comparses le dévisagent avec la fierté du serviteur amoureux de son maître ? Lui seul le sait, comme le caméléon le sait à la couleur des feuilles.
Il ne se démonte pas, l’œil fixe comme quelqu’un qui pense ce qu’il dit sans regards obliques, droit devant, sa vision à un mètre au-dessus des têtes. Ainsi, il semble prendre de la hauteur, l’air inspiré par la Flandre, comme Jeanne le fut par la France à Domrémy….
Mais son discours ne varie pas, n’est pas imagé. Il paraîtrait un peu court, s’il ne sortait de la bouche d’un homme replet que la bonhomie apparente dispense de briller, la langue flamande n’est pas propice à un lyrisme de rhétorique…
Nous ignorerons ainsi jusqu’au 13, ce qu’est sa pensée. Ce qu’il est, en fin de compte, le troisième Bart.
Ce qui importe dans son cas, c’est l’étonnante ascension de la N-VA due à lui seul.
Qu’a-t-il dit en plus, ou en moins que Jean-Marie Dedecker, que Filip Dewinter, candidats comme lui du nationalisme flamand, qui ne réussissent plus à capter l’attention et les suffrages ?
On songe aux 800.000 voix de préférence d’Yves Leterme. La Flandre cherche un nouvel l’homme providentiel ! L’engouement des foules pour le leader, qui va les sortir de la médiocrité imposée au plus grand nombre, et, pour faire bonne mesure, le sentiment d’injustice dont elles se croient victimes.
Les leaders qui ont réussi sont ceux qui, accédant au pouvoir, n’entendent plus le rendre, détournant les lois démocratiques, quand les foules se détournent d’eux. Et elles le font nécessairement, car le tribun qui réussit est toujours un imposteur.
La réalité attend l’électeur au coin de l’urne, si je puis dire.

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La désillusion est moins sévère en n’espérant rien qui ne soit accessible, comme par exemple, une vie décente, un travail qui nourrit son homme et sa famille, bref, des désirs légitimes et, malgré tout, impossibles pour des millions de Belges ; tandis que des promesses tenant à la « libération » d’une Région d’un oppresseur étranger, la désignation des coupables : les francophones, ces pilleurs de terre et du bel argent flamand, et qu’il ne se passe rien dans les mois et les années à venir, ce n’est plus une désillusion, c’est le syndrome précurseur d’une désespérance voisine de la dépression.
Quelqu’un qui crée une frustration sans réussir à la combler est un politicien mort (voir Leterme).
Alors, autant le leader était aimé et incontesté, autant il est honni et haï !
L’Europe occidentale a eu ses grands leaders qui se sont aidés du suffrage universel, pour s’en affranchir en s’appuyant sur une junte militaire ou un parti unique et qui ont tous mal fini. L’Orient, moins pointilleux en légalité, est plus propice à la conservation de ses hommes forts, ben Ali, Moubarak, Khadafi, et bien d’autres d’Algérie, de Syrie et d’ailleurs.
Un grand leader est-il capable en Flandre de prendre le pouvoir après une élection et de le garder, malgré une opinion qui, à la longue, se détournerait de lui ?
Je ne crois pas que cela soit possible, parce que l’armée n’est pas régionalisée et que l’organisation des milices n’est pas le fort de la N-VA.
Une dictature peut-elle se forger avec la force des mots et l’exploitation de la crédulité des masses ?
On n’en est plus au romantisme révolutionnaire. Pourtant, si Bart ne partage pas l’éloquence d’un Danton et la flamme d’un Saint-Just, il y a cependant dans l’âme flamande quelque chose qui peut déboucher sur le pire : l’obéissance ! Plus que les latins, ce peuple pratique la discipline, à l’exemple de ses cousins germains.
En 2010, est-ce suffisant ?
N’assisterons-nous pas, finalement, au sort de toutes les baudruches ? Ne finissent-elles pas toutes par se dégonfler ?

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