« La trahison des clercs. | Accueil | La note de Lanotte !... »

Téléphonite.

Vit-on jamais pareil acharnement ?
Tous les soirs, à minuit, quelqu’un saisit son téléphone et fait mon numéro.
C’est bien de penser à moi, sauf que si c’est pour ne me rien dire…
Le premier soir, après un long silence, j’ai pensé « c’est une erreur » de quelqu’un de timide. J’ai raccroché.
L’année dernière une vieille dame voulait à toute force me prendre pour son boucher. Trois fois de suite, elle s’y est prise, des fois que le boucher aurait été facétieux… Enfin, revenue de son erreur, elle aurait voulu me dédommager en me racontant sa vie. C’est moi qui ai raccroché.
Cette fois, ce n’est pas fortuit, c’est tout à fait volontaire et sérieux. Un ou une insomniaque veut de façon systématique que j’en fasse autant, sans assortir son intrusion du moindre commentaire !
Le silence persiste. Je tends l’oreille pour guetter un signal, une respiration, le tic tac d’une horloge, quelque chose enfin qui fait du bruit. Le silence total.
C’est simple, il n’existe pas trente six solutions.
Moyennant quelques démarches auprès de la Régie des Téléphones, on peut obtenir le numéro d’appel et savoir le nom du harceleur. Fort du relevé des appels, il est simple d’aller déposer une plainte. A condition d’être importuné depuis une ligne fixe, c’est l’enfance de l’art.
L’appel d’un portable exige plus d’investigations, si c’est un portable à carte payante, donc sans abonnement, c’est encore plus compliqué.
Je suis allergique à la délation. Je ne me vois pas faire des démarches pour empêcher quelqu’un qui fait l’effort de m’envoyer un coup de fil tous les jours à minuit. Cela ne doit pas être par gentillesse, mais rapporter aux flics me gêne !
Comme je ne m’endors que tard, l’esprit vagabonde.
J’en arrive à l’attendre, ce coup de fil. Il ponctue la fin d’une journée… C’est mon calendrier sonore.
A mon correspondant muet, j’envoie la musique du film que je visionne ou des fragments du CD sur la platine du laser, enfin le son que j’entends moi-même… C’est comme un partage. Sauf que j’ignore ce que l’autre en pense. C’est frustrant.
Qui peut croire que cette assiduité m’atteint vraiment ?
Une sorte d’instinct me dit que le téléphoniste est une femme.
Pourquoi ? A cause de l’assiduité de son silence ! On dirait celui d’une femme qui boude ! Un homme finirait par m’engueuler ou avoir un petit rire sadique.
Dans certains cas de vengeance froide, les hommes sont plus bavards que les femmes.
Qui de mes relations féminines cela pourrait être ? Quelqu’un que j’aurais pu décevoir ou gravement compromettre ?
Toutes, me direz-vous, implacables lecteurs !
Et je repasse dans la tête ce qu’un homme peut avoir raté dans sa vie, des femmes qu’on quitte ou qui vous quittent et puis, brusquement qui vous en veulent pour des motifs qui vous échappent. J’aurais commis une petite goujaterie à l’une d’entre elles ? Une infidélité… va savoir ?
L’occasion d’un retour en arrière… d’un bilan pas trop glorieux…

469_1000.jpg

A moins que cela ne soit la sourde vengeance d’une femme dédaignée, ou une señora si originale, qu’elle veut m’imposer la vision de ses lèvres closes sur l’appareil ?
Le doute est délicieux ! L’imagination pourvoit à tout.
Et si c’était une fée ? Ou une femme qu’on a aimée et qui est morte sans qu’on l’ait su et qui vous téléphone de l’au-delà, cinq ans plus tard ? Comme un ectoplasme n’a plus de voix, elle se désole de ne pas vous dire que la mort ne nous a pas séparés pour autant… Oui, mais, alors, comment ferait-elle mon numéro de l’au-delà, sans ses petites mimines, en ectoplasme ?
A moins que cela ne soit le veuf qui ait découvert notre correspondance ?
Ou bien une pauvre créature qui se croit moche et qui, malheureusement, l’est et à qui j’ai dit « je t’aime » un jour que j’étais bourré et qui depuis s’accroche à l’idée que son existence est ratée à cause de moi ?
Je ne me souviens plus d’être sorti bourré.
Ce serait aussi bien une lectrice du blog déçue de mes textes abominables, prétentieux, sans intérêt… pourquoi attendre minuit pour une non-communication de sa critique ?
Elle m’aurait balancé plutôt sa façon de penser dans le courrier des lecteurs !
Reste la solution par une petite enquête personnelle. Chaque soir, à minuit, je vais téléphoner à l’une de celles qui auraient de bonnes raisons de m’en vouloir. Si ça sonne « occupé », je saurai à quoi m’en tenir.
Ce sera long ! Pensez-donc, une par soir ! Tant d’entre elles ont été déçues...

Commentaires

Richard III, une pareille mésaventure m'est arrivée il y a quelques années. "On" sonnait chez moi à 3 heures du matin et "on" ne disait rien quand j'arrivais à décrocher avant que la "communication" ne se coupe. J'ai contacté Belgacom et épluché le relevé des appels. En fait, il s'est avéré que c'étaient des appels automatiques liés à une mauvaise configuration de je ne sais plus quoi. Belgacom a fait le nécessaire et je n'ai plus été importuné par ce "fantôme malveillant". Mais avant cela, je me suis torturé la tête en me demandant qui pouvait m'en vouloir à ce point...:).

D'abord, je ne suis pas une femme et si même...ce n'est pas moi, mais en lisant , cet article, moi qui pensait que vous n'étiez pas un Duc, mais un Prince de Liège, maintenant je ne sais plus quoi penser, peut-être un Don Juan!!

Pour vous être agréable et vous en faire la confidence, je ne suis rien de ce que vous dites. Don Juan est un être pathétique, inhibé et malheureux.
Et puis, êtes vous certain que ce que j'écris soit bien réel ?
Et si c'était un conte ?
Quant à l'aventure de Michel, la différence avec la mienne tient dans le fait que la communication ne se coupe pas quand je décroche.
D'une part, imaginons que c'est une "histoire" inventée et d'autre part qu'elle est réelle.
Le doute est la seule chose qui nous fasse tenir le coup. Si nous n'avions que des certitudes, pour moi, la vie ne vaudrait rien. Il serait inutile de réfléchir. Nous redeviendrions des "animaux dénaturés".

J'utilise "Don Juan" comme le terme désignant un homme sachant séduire les femmes et non comme le personnage comme vous dites "pathétique". Et sans être ni sot , ni malin, j'ai pris du plaisir à lire votre histoire sans vraiment penser qu'il s'agissait d'un fait réel ou tout simplement d'une histoire crée pour le plaisir.Bonne journée cher Monsieur..

Poster un commentaire