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Roublardo et les Sept nains.

« Miroir, gentil miroir, dis-moi qu’elle est la plus belle du royaume ? ».
Chaque année, à la fête nationale flamande, la reine Bart questionnait son miroir et celui-ci renvoyait fidèlement le visage de la curieuse, certes, de plus en plus rond et épanoui à mesure que le temps passait et repassait les plats, car sa majesté était gloutonne ; mais moins épaisse encore que la plupart des Anversoises.
En ce jour funeste 2011, après le questionnement annuel de la reine, le miroir renvoya l’image de la princesse Eloïse Di Roublardo, dont la reine était la marâtre.
- Quoi… quoi, dit la reine en fureur, ce pruneau de soixante ans ! Ce succédané de Berlusconi ! Elle serait la plus belle !...
Aussitôt, elle chargea Wouter son palefrenier favori, de la venger d’Eloïse.
- Mon Beke, tu seras le bras armé de ma Flandre.
Aussitôt elle lui colla un sac du GB sous le bras, afin de lui rapporter le cœur de sa rivale.
Wouter est un brave homme. Il n’eut pas le courage de perpétrer son crime. Il souffrait d’être le jouet des caprices de la reine Bart. Son secret désir était de se mettre à son compte.
Il raconta tout à la princesse Eloïse et lui permit de fuir à la condition que celle-ci ne reparût plus à la cour. Elle était condamnée à errer sans fin dans la forêt de Soignes…
Et il montra à la reine une carbonade bien nerveuse et sanguinolente que l’on sert si souvent à la Côte et que la reine Bart prit pour le cœur d’Eloïse.
Un jour d’orage, Eloïse s’abrita dans une étrange maison. Minuscule, elle était pourtant dotée d’une énorme table ronde, sur laquelle des couverts étaient posés si petits qu’on aurait dit des cure-dents. Elle s’affala sur les sept lits et fit le rêve qu’ont toutes les jeunes filles, se placer dans une riche famille régnante.
Le soir, les Sept nains revinrent de la recherche d’emplois pour handicapés. Atchoum ressemblait à Charles Michel, Timide à Jean-Mi, Prof à Alexandre, Grincheux à Laurette, etc.
Après de longs pourparlers, Eloïse tint leur ménage, tandis qu’ils s’en allaient chaque jour à l’interview des placeurs prêchant les douceurs de la démocratie. Quoique frères et sœurs, ils étaient divisés du point de vue politique et linguistique. Ils n’avaient qu’une chose commune, ils étaient tous nains.
Dame, quand on vit dans un petit pays, pour avoir plus d’espace, il vaut mieux être nain.
Dans la capitale, les choses s’étaient précipitées.
Wouter avait assuré la reine Bart, le jour du Gordel, qu’elle était à nouveau la plus belle. Méfiante, elle n’attendit pas la fête nationale suivante pour consulter son miroir.
« Miroir, gentil miroir, qu’est-ce que tu en penses ? » Ce fut le hideux visage du diable Maingain qui apparut. « Qu’est-ce que tu crois ? Wouter t’as raconté des craques. Il fricote avec Eloïse dans ton dos ! ».
La reine résolut de se venger. Aussitôt, elle prit son petit panier de gaufres empoisonnées et se transformant en Caroline Gennez, la rosière de Flandre occidentale, courut à la forêt de Soignes perpétrer son forfait.
La princesse Eloïse ne se méfia pas de la vendeuse de gaufres, tant elle paraissait plausible en gargotière, tablier bleu et jan moulant, mangea la gaufre et tomba raide au pied de la reine Bart.
On fit des funérailles grandioses à la princesse et on crut le royaume perdu…
Mais le roi qui aimait tendrement sa fille, obtint de Merlin qu’elle se réveillât le jour où un chevalier déclarerait sa flamme.
Les Sept nains mirent la princesse sur un lit de rose au milieu d’une table ronde et attendirent avec le roi qu’un prince charmant vînt à passer par là.
Quand Caroline Gennez apprit que la reine Bart s’était servie de son visage pour tromper la princesse Eloïse, elle appela son voisin pour aviser. Coïncidence, celui-ci n’était autre que Wouter Beke !
Le brave homme confessa sa faute et promit de réparer.
Restait à trouver un Prince.

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Comme il n’en passait pas, après un an et trois mois de réflexion, on déguisa Wouter en prince. On le hissa sur un cheval blanc. Il était gauche et emprunté, peu noble et piètre cavalier, mais une dame de cour l’aida à se tenir en selle, lui apprit le métier de prince, remplaça ses lunettes par des verres de contact. La malignité publique soutint même que Wouter étant puceau, la dame de cour poussa l’abnégation jusqu’à lui montrer toutes les subtilités du baiser avec la langue, et le coït-surprise à la new-yorkaise. Il fallait bien sauver le royaume ! Il serait toujours temps de lui dénouer l’aiguillette en une autre occasion.
La suite, tout le monde la connaît.
Le royaume fut sauvé.
La reine Bart, inconsolable, prit le diable Maingain à son service en qualité de bouffon-souffre-douleur.
On prétend que poussés par le vice et les conseils d’André Antoine, ils eurent quelques enfants illégitimes!
Quant à la princesse Eloïse, on raconte qu’elle était assez noble pour deux et elle épousa Wouter en grande pompe à Sainte Gudule. Entre des exorcismes de démons flamingants, l’évêque Léonard s’habilla de ses plus beaux rideaux pour entendre leur « ja ».
La messe eut lieu en flamand, quoique Eloïse ne connût point le langage un peu frustre qui était celui de son fiancé.
Ils eurent deux enfants Simplicie et Flamint.
Quand ils furent adultes, ceux-ci se disputèrent le royaume et tout fut à recommencer.
Mais, c’est une autre histoire que vous racontera un autre jour Charles Perrault-Michel, Alexandre-le-petit et Bètchette Onglelisse.

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