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Un duce en difficulté.

Silvio Berlusconi après des années de procédure vient d’être condamné à quatre ans, réduits à un an de prison ferme pour malversation et fraude fiscale. A 76 ans, le Cavaliere ne sera pas incarcéré pour raison d’âge.
Voilà qui met fin à une saga politico-judiciaire de près de vingt ans, les prolongations étant dues à des pourvois multiples que seuls des fortunés comme lui peuvent se permettre. Un margoulin plus modeste eût été condamné dans les deux ans du début de la procédure, ruiné et emprisonné. Personne n’en eût parlé et la justice aurait été saluée comme un modèle du genre.
La malhonnêteté quand on est riche étant souvent récompensée par un mandat politique, Silvio ne s’est pas contenté de dominer la presse et les médias. Il a monté un parti politique florissant, ce qui lui a permis de devenir président du Conseil.
Les collègues italiens du Soir et de la Dernière Heure qui encensent Berlusconi me font penser à la façon dont la presse bruxelloise nous entourloupe.
Comme quoi l’opinion en général et l’italienne en particulier n’ont que faire de l’éthique quand on leur jette de la poudre d’or aux yeux.
Cela pose évidemment une question plus large aux citoyens européens sur la fragilité du vote populaire et l’étonnante démocratie que nous vénérons tant, au point que nous osons croire qu’elle est la meilleure discipline pour diriger un État. La plupart des conflits dans lesquels l’Europe et les USA ont partie prenante, c’est toujours au nom de la démocratie et des grands thèmes d’ingérence que nous le faisons, comme si nous avions la mission d’imposer l’oiseau rare au monde !
A voir de près la carrière du Cavaliere, les Italiens peuvent s’estimer heureux que l’idole de la moitié d’entre eux soit un homme âgé de 76 ans. Eût-il eu 20 ans de moins, il n’est pas sûr qu’ils eussent pu éviter une nouvelle aventure mussolinienne : même allure, même prétention à trancher de tout, même origine très modeste, le parallélisme entre les deux hommes frappe dès l’abord. La situation politique aussi : même déliquescence des mœurs, même clivage gauche droite, tout pouvait faire pencher l’histoire contemporaine de la république italienne vers l’aventure d’un nouveau duce. Peut-être bien que l’Union européenne aurait été le dernier frein ?

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Mais la capacité de nuisance de Berlusconi n’est pas close. A 76 ans il lui reste le grand parti de droite qu’il a fondé. Les magistrats qui l’ont condamné pour escroquerie, abus de biens sociaux, détournements, etc, ont renvoyé devant une autre juridiction l’interdiction du condamné de droit commun qu’il est devenu à exercer un mandat politique.
Voilà que le dernier atout du Cavaliere est au centre désormais d’un enjeu politique d’importance.
Bizarrerie du droit italien, même si cette interdiction était confirmée en appel, Silvio ne perdrait pas automatiquement son siège de sénateur... Il reviendrait au Sénat d'entériner d'abord la décision de la Cour, ce qu'il peut faire de longs mois après la décision du tribunal suprême !
Le Peuple de la Liberté (PDL), le parti de Silvio Berlusconi, fait partie de la coalition gauche-droite de l’actuelle majorité.
La non-éligibilité du richissime condamné et voilà tout le laborieux d’une coalition qui ne fonctionnerait plus ! Sans compter que l’homme n’en a pas encore fini avec la justice. En juin, il a été condamné à sept ans de prison et à l'interdiction à vie d'exercer un mandat public pour abus de pouvoir et prostitution de mineure dans l'affaire Rubygate. Il a interjeté appel du jugement. Cela va allonger de quelques années la sentence définitive et donc rendre la non-éligibilité possible, conséquence de sa condamnation ferme actuelle, d’une brûlante actualité.
Cet homme insubmersible, passant à travers tout sans jamais douter de soi, fait penser à son homologue Tapie, quoique ce dernier n’ait pas eu la carrière politique de l’Italien. Il ne fut que le bref ministre de la Ville de François Mitterrand. Même charisme incompréhensible auprès des petites gens, indulgences de ceux qu’ils spolient, carrière glauque à coups de pots de vin et d’entourloupes et surtout facilité des grands personnages de l’État à se laisser corrompre !
On peut dire que ceux qui n’ont « rien à se reprocher » qui élisent de pareils requins, ont au moins celui de permettre à des malfaisants de régner sur leur démocratie ! Les Rosselliens de nos gazettes feraient bien d’y réfléchir, avant d’écrire leurs conneries sur la justice, le pouvoir et la démocratie.

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