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Milquet au stade

Le commerce du football ne doute de rien. Il y a quinze jours, Platini a eu la même réaction à propos de l’agitation sociale au Brésil, qu’un commerçant qui apprend qu’on va faire des travaux dans sa rue qui vont durer deux ans !
Les pauvres et les chômeurs brésiliens sont priés de la fermer pendant la Coupe du monde s’est écrié Platini.
Si pour lui, à un mois et demi du début des festivités footballistiques, le climat est tendu au Brésil, rien ne saurait altérer ce qui se prépare.
Et de sous-entendre les enjeux financiers, le coût d’une équipe en centaines de millions de dollars, les redevances des télés mondiales pour les retransmissions, bref un business planétaire faisant quasiment d’un protestataire brésilien, un véritable ennemi de l’humanité.
La réalité se situe ailleurs. Beaucoup de Brésiliens se fichent de l’événement. Certains mettent en cause les dépenses jugées inutiles, quatre stades (Manaus, Brasilia, Cuiaba, Natal) sont amenés à devenir des dépotoirs, dès le lendemain du sacre de la meilleure équipe, faute de pouvoir mettre le moindre Réal, pour leur entretien. Alors, le prêche de Platini pour raisonner les pauvres, c’est se ficher du monde et méconnaître la gravité de la situation.
Cette méconnaissance est bien dans la nature des frivoles qui mangent, qui dorment, qui vivent et même qui baisent en-dehors des temps consacrés au foot, à se déguiser en charlot aux couleurs du club, à se déplacer avec l’équipe supportée et à discuter le coup après le match, dans les bistrots qui environnent le stade.
Imbattables sur ce qui manque au Standard et ce qui favorise Anderlecht, possédant une mémoire fabuleuse des classements de ces dix dernières années des meilleures équipes d’Espagne ou d’Angleterre, ils ignorent où se trouve l’Ukraine, se soucient à peine du climat – ils se bornent au temps qu’il fera au-dessus du stade le jour du match – et n’ont qu’une vague idée de ce qu’ils feront dans l’isoloir au 25 mai.
Pour le boulot, la citoyenneté, la connaissance du monde, les rapports entre les Nations, ils font confiance à ceux qui les encouragent dans leur seule passion.
C’est pourquoi ces masses particulières d’électeurs intéressent si vivement le politique et le commerce des idées à bas prix. Faciles à manipuler, vite satisfaites quand on les laisse vociférer à l’aise autour des pelouses, c’est une proie aussi facile à attraper qu’un poisson rouge dans un bocal.
Platini, au nom de ces « valeurs », a inscrit sa pensée en lettres d’or dans les gazettes qui se sont fait une joie de la publier.
« Il faut absolument dire aux Brésiliens qu’ils ont la Coupe du monde et qu’ils sont là pour montrer les beautés de leur pays et leur passion pour le football. Et que s’ils peuvent attendre un mois avant de faire des éclats un peu sociaux, ce serait bien pour le Brésil et pour la planète football. »
Las ! les pauvres au Brésil sont versatiles. Les mouvements populaires ne faiblissent pas. Il faut dire aussi que peu de Brésiliens auront les moyens de se payer des tickets d’entrée. Les tubes cathodiques (les écrans plats sont rares) vont chauffer dans les ruelles, quand différents groupes organiseront des manifestations contre la Coupe du Monde.
Le fait de muscler les représentants de l’ordre est « tendance ». Les flics reçoivent des instructions en ce sens. Les populations qui sont trop remuantes sont dorénavant considérées comme terroristes. Si le Brésil adopte la politique musclée de Joëlle Milquet ce jeudi à Bruxelles, lors d’une manifestation pacifique contre le partenariat transatlantique, alors Platini est sauvé avec sa coupe, ses sponsors, ses contrats et ses dessous de table. Interpeller 240 personnes sur 500 manifestants, c’est une sorte de record belge, dont le Brésil pourrait s’inspirer.

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La perspective ne fait pas reculer les manifestations qui vont bon train.
Un Comité Populaire qui s’intitule « Coupe du Monde de Sao Paulo » mène un front pour la "bataille internationale contre la Coupe de la FIFA". A Rio de Janeiro, le Front Populaire Indépendant appelle à un "cri artistique" contre la Coupe lors d’un festival de représentations et d’interventions culturelles qui aura lieu ce vendredi 16 mai.
"Logement pour tous" critique que des milliards aient été dépensés et que des démolitions de maisons aient été décidées sans discernement, pour construire les stades.
Les Autorités espèrent quand même que la samba étouffera les cris de colère et que dès l’ouverture des matchs, le supporter brésilien renaîtra dans le cœur des insurgés.
Mais dans le doute, on fait comme Milquet, on galvanise les troupes de flics, on augmente le stock d’armes non létales, etc.
Si ça tourne mal, ça va chier du lacrymo autour des stades, 270.000 grenades et bombes lacrymogènes ont été achetées.
Il ne manquerait plus que les bonnes affaires promises, les juteux contrats et les millions d’articles sur l’événement dont la Belgique aura sa part dans nos journaux nationaux, soient perturbés par des énergumènes. Quant au sport, lui-même, on se demande, à part les supporters et parfois les joueurs (quand ils sont bien payés) qui ça intéresse vraiment ?

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