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C’est qui, Tacite (1) ?

Un des caractères forts de notre époque est l’absence quasiment de conséquences, dans le manque d’intégrité des élus de la Nation.
Non pas que les gens s’en fichent, mais ils sont tellement habitués qu’il en soit ainsi, qu’une sorte de résignation s’est emparée de l’électeur.
À tel point que ce dimanche midi, je m’efforçais de me tenir éveiller devant le spectacle d’un Deborsu disert à son habitude et une Laurette Onkelinx en chemisier blanc largement ouvert, faisant le spectacle sur RTL, avec ce qu’elle pouvait.
C’est ce chemisier qui m’empêchait de tomber dans une sorte de somnolence heureuse, une seule idée me venait à l’esprit à propos de ses nibards invisibles dans l’échancrure : ils ne doivent pas peser lourd !
Puis je me reprochai cette attitude coupable.
C’est pratique d’avoir des lettres. Je me suis souvenu de Tacite, Livre IV page 229, lorsqu’il écrit « Le mépris fait tomber la satire, l’irritation l’accrédite ».
Je fais des vœux pour que Laurette laisse tomber. Elle, au moins, n’est pas en délicatesse avec le judiciaire.
Parmi les personnages publics dont les noms apparaissent dans les faits-divers Publifin, Nethys, les tribulations autour du milliardaire Chodiev, les loteries congolaises organisées depuis la Belgique, combien y en a-t-il qui seront condamnés en justice ?
Probablement aucun, sans que cela émeuve les collègues de parti, les électeurs et les collaborateurs de ces personnages.
La présomption d’innocence, pour peu que l’on sache y faire dans des procès dont on ne voit pas la fin, devient une sorte de certificat de bonnes vies et mœurs que les peines, souvent légères, rendent définitive.
On a beau réclamer la limitation des mandats non seulement par le nombre, mais aussi par la durée, sans que le flux de ces innocentés par la longueur des procès soit tari. La présomption d’innocence est une sorte de préemption légitime d’innocence tout court.
Personne ne réclame des peines plus fortes aux accidents de parcours de la fonction politique ; seulement une conformité avec les peines encourues des délinquants ordinaires.
Une célérité égale aussi, entre le voyou d’en bas et le voyou d’en haut.
Le public entre pour une bonne part dans cette bénignité.
Un exemple attire l’attention, même s’il n’est pas de chez nous.
Comment se fait-il que François Fillon, présumé innocent, mais ayant quand même présenté des excuses, c’est-à-dire reconnaissant implicitement ses manquements, accablé par la nouvelle affaire de costumes à 13.000 euros payés par un avocat impliqués dans des combines de Françafrique, soit toujours à la tête d’un petit capital de voix, appelé son socle, soit environ 40.000 personnes à avoir fait le déplacement par temps de pluie au Trocadéro ?

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Dans l’esprit de pas mal d’électeurs, l’intégrité et l’honnêteté sont des qualités très peu intéressantes et, en tout cas, qui n’intéressent pas ceux qui seront appelés demain à traiter des affaires et des contrats au nom de leur pays !
Voilà une curieuse manière de militer pour un parti, en acclamant son voyou en chef !
Dans des moments de lassitude face à cette boue qui éclabousse régulièrement les hommes des partis, plus sensibles à l’argent qu’au sort de leurs compatriotes, il m’arrive de me replonger dans l’Histoire de Rome et des premiers César.
Les temps étaient encore plus chargés de crimes et de confiscation de biens qu’aujourd’hui. Le fait du dictateur était la loi, l’empoisonnement monnaie courante, les délateurs (comme ici pour les chômeurs) étaient écoutés et parfois honorés. Les condamnations étaient sans appel. La mort, parfois par suicide assisté et le bannissement étaient les seuls choix. L’esclave recevait la torture en lieu et place de son maître. Tout cela était horrible et les mœurs bien plus cruelles que de nos jours.
Cependant, par rapport à nous, on y parlait de vertu, de morale et on y tenait des discours qui ont complètement disparu de notre langage politique.
Tous les caractères de l’Homme y étaient connus, fustigés ou moqués. C’était une époque d’instinct sauvage, mais lucide qui dénonçait l’assassinat d’une voix forte !
Loin de moi de regretter ces temps révolus. Sénèque, Tacite, Pline, Suétone, Cicéron, nous manquent. La démocratie bien chancelante aurait bien besoin d’eux. .
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1. J’ai failli titrer « Mes Annales » (Tacite). Je m’en suis gardé, depuis que la confusion règne dans l’esprit de la jeunesse qui ne verrait la chose qu’avec un seul « n ».

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