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Une question de survie.

Allons-y directement, écrit Eric Le Boucher sur « Slate magazine », les populistes ont raison.
Cette affirmation venant de lui (il abomine la gauche de la gauche) est assez surprenante.
Que les adorateurs du système se rassurent. On se doute que la suite rétablira « sa vérité ».
Il empile d’abord les arguments « On a passé ce 9 août le dixième anniversaire du déclenchement de la crise des subprimes. Le FMI et de nombreux économistes nous affirment qu’on en sort enfin. La croissance est lente, certes, mais elle paraît désormais bien établie. Elle repart même en France et en Italie, c’est dire! La crise est finie. La grande majorité des «gens», pourtant, a l’impression d’y patauger encore. »
On a compris. Le journaliste se demande pourquoi, puisque la crise étant finie, « le populisme » a encore tant de vigueur, pour qu’on y patauge avec une certaine délectation ?
Surgit un petit malentendu entre nous. Non, monsieur Le Boucher la crise n’est pas finie. Elle ne fait que commencer !
En réalité, 2008/9 était un abcès d’une crise endémique bien plus profonde aux origines étroitement liées au système économique lui-même. Peut-être même a-t-elle débuté dans l’entre-deux guerres à Detroit, quand Henri Ford s’est mis à produire des autos en série et que l’Homme n’a plus été dès ce moment qu’une spéculation « mécanique ».
On peut penser que le système a perdu en humanité ce qu’il a gagné en efficacité. Sans le savoir, il se condamnait lui-même à longue échéance.
Nous n’en sommes pas encore au terme, mais on s’en rapproche.
Pour l’instant, le populisme se nourrit d’un long processus de malaises accumulés. À sa portée de nombreux matériaux entretiennent son ressentiment.
Il rassemble aussi contre lui toutes les haines et toutes les rancœurs d’un tas de gens qui vont du simple journaliste au ministre, parce que le populisme est la vitrine de leur ratage.
Non, mille fois non, la crise n’est pas finie. Elle ne fait que commencer !
Le chômage ne se résorbera pas à un taux « raisonnable ». Les inventions carrément maladives des businessmen pour faire du fric sont sans limite. L’ubérisation d’une partie de plus en plus grande des activités semi-artisanales, du taxi aux livreurs de pizza en est l’illustration.

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Les banques sont aussi instables qu’en 2007 et rejouent au casino. 217 milliards, produit du travail des Belges, sont encore parti en 2016 faire des petits dans des paradis fiscaux. L’écart entre les salaires et les conditions de vie, entre les diplômés et les autres, entre les chômeurs et les actifs, replonge cette société dans les affres de l’Ancien Régime au temps du pouvoir absolu, et justement, drôle de démocratie qui permet le rétropédalage.
À près de dix ans des subprimes, cadeau des USA, le monde peut basculer à tout instant dans de nouvelles dérives.
Trouver que les populistes n’ont pas raison de s’inquiéter rend les Autorités peu crédibles et les satisfaits du système proprement idiots.
Voyons les arguments de Monsieur Le Boucher.
Les populistes ne proposent qu’un retour aux solutions d’avant-hier. À savoir l’État sauveur et qui peut tout. Il met ainsi dans le même cageot pour les halles à la criée les Brexiter, Orban, Trump, Duterte, Le Pen, sans oublier Mélenchon.
Mais voilà, nous dit-il, l’État est devenu trop petit !
Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft ont un chiffre d’affaire de 3.000 milliards de dollars, c’est-à dire plus que la France (PIB 2.200 milliards).
Ainsi, les antipopulistes continuent inconsciemment à présenter le gigantisme comme une invitation à la terre promise, une marche forcée en avant. N’est-ce pas un argument mille fois entendus du mondialisme ?
Or, depuis qu’il est effectivement parti pour le grand rassemblement économique de la planète, a-t-on jamais vu une once d’amélioration d’un autre gigantisme : une pauvreté générale, des guerres locales cachant des intérêts industriels et même dans les États dits « riches », une nouvelle manière d’être pauvre : celle du travailleur dont le revenu est insuffisant pour nourrir une famille !
Il est vrai que le populisme n’a pas de réponse pour toute l’organisation sociale de demain, par exemple : comment concilier le communisme et l’autogestion, le revenu universel est-il compatible avec le socialisme ?
Que je sache Mélenchon n’est pas au pouvoir. Il ne peut que produire des schémas et des plans. Il manque le terrain à l’expérimentation. Il vient même de reconnaître sa défaite dans le combat actuel contre les ordonnances de Macron.
Trop souvent, la reprise en main par le peuple conduit à l’épuration idéologique, d’autant que le pouvoir économique actuel est puissant et influent, toute la démocratie en est imprégnée et malade.
Contrairement à ce que pense Monsieur Le Boucher, le sauveur du monde n’est pas dans une croissance continue et accélérée par tout ce qui peut être exploitable et négociable, c’est là que se trouve le mur et l’utopie d’un monde productiviste dopé par le commerce mondialisé.
Le cas de Monsieur Le Boucher et de ses pareils est pathétique. Le premier coup de semonce sérieux de cette productivité démente est dans le réchauffement de la terre et de la fonte des glaces des pôles. Le deuxième, c’est pour le siècle prochain : l’appauvrissement des sols et la disparition des espèces vivantes « non comestibles » donc « inutiles ». Enfin, dans peut-être moins de deux siècles, la démographie galopante sur une terre rétrécie aura raison de l’humanité toute entière, dans la confusion générale, les famines et les guerres pour l’eau.
À côté de ces perspectives déjà scientifiquement approchées, le populisme et le retour à l’État pour une juste répartition des biens et la recherche des aliments et des énergies qui ne mettent pas en danger la survie, oui, et de loin, le populisme de gauche est cent fois matériellement et philosophiquement bien plus raisonnable que cette fuite en avant irresponsable et sans futur.

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