« Trumpette de la renommée. | Accueil | On blanchit même le dimanche ! »

Vivre de son art !

C’est une hypothèse vraisemblable : le nombre très élevé d’artistes en tous genres dans une société qui voit d’un mauvais œil l’excentricité et la flânerie a deux effets visibles. Celui d’une abondance dans tous les arts musique, peinture, écriture d’une large partie de la population et la nécessité pour l’industrie d’exister en exploitant les arts, de faire croire que les artistes « révélés » sont d’exception et, pour tout dire, qu’il n’y en aurait qu’un d’exceptionnel par siècle ! À seule fin d’éliminer – sans même le vérifier – l’ensemble des refusés sous prétexte qu’aucun rapin ne vaut pas le petit noyau de peintres qui vend ; que nul ténor léger à la chevelure oxygénée n’égalera le goût du costume et le sens de la scène d’un Johnny Hallyday ; qu’aucun écrivain du dimanche ne pourra égaler ceux qui le font en semaine et de s’enthousiasmer de la prose d’un d’Ormesson, dont je ne peux lire dix lignes sans bâiller !
On en est là.
C’est inutile de présenter quoi que ce soit à quiconque aurait le pouvoir de montrer à d’autres ce que vous ne pouvez faire par vous-même. Vous ne serez ni lu, ni entendu, ni regardé.
Seuls échappent à ce critère, les gens suffisamment riches pour être d’abord connus pour ça ou pour être le fils de, ce qui vous dispense de passer par les critères de la sélection.
Est-ce pour autant que le plus pur des inconnus ne soit pas un jour « podiumnisé », reconnu, adulé, vénéré ?
C’est même là une astuce suprême pour vous faire croire que le futur Mozart sorti du ruisseau est bien le seul de toute la banlieue, parce qu’il le mérite.
Alors qu’il y a plus de génies disparus ou ignorés que ceux devant lesquels la foule se prosterne, que les plus grands critiques d’art se pétrifient saisis par le syndrome de Stendhal et que les plus fins mélomanes en pleurent d’émotion.
Comme la société aime les concours, on attribue des prix de Rome, on se passionne pour le Goncourt, on somme les producteurs de spectacle de produire le girafon du jour.
On avait déjà fait le coup d’un roman de Marguerite Duras, poussé au sommet de l’Olympe par les critiques dithyrambiques, des farceurs l’avaient recopié à la machine à écrire et envoyé chez l’éditeur de la dame et chez d’autres aussi, refusé partout !
Pour une fois, j’étais d’accord. Vous avez déjà lu du Duras ? Une vraie merde !...
Il faut dire à la décharge des « grandes » maisons d’édition qu’elles sont absolument submergées et que les « décideurs » n’arrivent même plus à feuilleter les manuscrits. Vous pouvez tenter l’aventure, vous ne recevrez pas de réponse. Si vous voulez reprendre votre bafouille, vous devez vous taper le transport retour à vos frais.

1loilo2.jpg

C’est pareil pour la peinture. Si vous ne douillez pas sec un gros paquet, vous n’exposerez jamais dans une galerie de renom. Ne vous tracassez pas, même si votre étalage de couleurs ne vaut pas tripette, si vous avez du fric, vous pourrez exposer tout ce que vous voulez, même des papiers WC souillez de votre propre merde, tout est dans l’assemblage. Seulement vous ne vendrez pas un clou, mais vous aurez la réputation d’avoir été exposé.
Quant à la chansonnette, c’est la foule, avec ou sans guitare, en talonnettes ou en string, on sélectionne grave dans les concours et pourtant ceux qui triomphent, souvent n’arrivent pas à la cheville de ceux qu’on élimine.
C’est la foire d’empoigne, les critères sont bidons, les critiques des incompétents, ce qui sort de la coulisse ce n’est que le trop plein du tube.
Nous ne sommes pas dans une société qui apprécie les arts et les artistes.
Sur le 7/7 de ce jour, une aventure proche de celle qu’on fit à propos de Duras.
« …Serge Volle et un autre écrivain "très connu"… estimant dans une lettre que Claude Simon, prix Nobel de Littérature de l'année 1985, ne pourrait plus être publié aujourd'hui, Serge Volle a envoyé à dix-neuf maisons d'éditions - petites et grandes - 50 pages du roman "Le Palace", écrit par Simon au début des années '60.
» …douze d'entre elles ont refusé le texte, lui reprochant des "phrases sans fin", des personnages mal "dessinés". Sept éditeurs n'ont même pas répondu. »
» Sur France Inter, il explique "sonder la qualité de ceux qui président aux comités de lecture dans les petites et grandes maisons d'édition."
Pour le reste, je ne suis pas d’accord, rien n’est bien neuf. L’artiste est un crève-la-faim de toutes les époques, un saltimbanque méprisé ou un petit employé qui ronge son frein et dont on moque sa passion des lettres. Si la littérature a évolué, la difficulté de se faire entendre, voir ou lire dans tous les arts s’est accrue considérablement en fonction d’une société productiviste dont la course à l’argent a asphyxié toutes les formes d’art. La plus éclatante preuve tient dans l’achat d’une œuvre supposée de Léonard De Vinci pour 450 millions de dollars, sur le temps qu’un peintre brûle l’œuvre de toute une vie qui ne trouve pas preneur.
"Proust disait 'avant d'écrire soyez célèbres ».
C’est la conclusion de 7/7. Je suis bien d’accord. Et c’est valable pour l’art en général.

Poster un commentaire