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Macron essaie un nouveau gilet !

Suite aux importantes mesures prises, 85.000 CRS, autos-blindées, gendarmerie à cheval, on ne déplore que quelques incidents et bavures policières, les casseurs ne se sont pas manifestés. Si le discours attendu de Macron en début de semaine ne convient pas aux Gilets Jaunes, ils pourront remettre ça le samedi 15, ce sera le cinquième acte (toujours 5 actes dans une tragédie). Le pouvoir a mis le paquet à Paris, ce dispositif policier n’est possible qu’une fois tous les six mois, c’étaient les fonds de tiroir, tout ce qu’on a pu trouver, rassembler et mobiliser. Le samedi 15 devrait être plus cool !
Donc, Macron a intérêt à être convainquant !
Ce serait le moment de se demander quel nom donner au régime politique actuel en usage aussi bien en France qu’en Belgique ? (Des incidents à Bruxelles ont éclaté lors de la rédaction de cette chronique)
Démocratie ? Comment appeler le quadrillage de Paris par huit mille gendarmes (10 % des effectifs pour l’ensemble du territoire), appuyés de blindés, en retenant administrativement autour de mille personnes rien qu’au pourtour des Champs Élysées, à l’heure où ces lignes sont écrites, tout en pratiquant à l’identique dans les autres grandes villes ?
Le droit à s’assembler pour contester un gouvernement étant suspendu, on peut se poser la question de la nature du Régime qui use d’une pareille mesure ?
Assiste-t-on à un putsch, à la naissance d’un régime fort devenant une dictature par glissements progressifs ou aux derniers sursauts d’un pouvoir présidentiel déjà usé seulement après dix-huit mois ?

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Sans préjuger de la place qu’auront les Gilets Jaunes dans un débat sur l’avenir de la France, s’il a jamais lieu, n’oublions pas Platon, un des premiers à définir « une » démocratie qui est assez insultante pour le peuple, puisqu’il le considère incapable de gouverner « intelligemment ».
D’abord avant tout, la question centrale qui se pose est de savoir si un système de représentation indirecte, avec un parlement qui fait ou défait des majorités, sans jamais prendre l’avis des électeurs qu’au bout de quatre ou cinq ans, et qui, les ayant prises, en tient rarement compte, peut-on appeler ce régime une démocratie, sinon l’appeler platonicienne ?
Les avis divergent. Karl Popper voit dans la démocratie une opposition à la dictature. C’est un peu court comme définition. Mais si on considère la France comme une démocratie, comment expliquer l’action de sa police sur la Champs Élysées ? Aurait-on là une démocratie « janussienne », respect du peuple d’un côté, mépris du peuple à intervalle irrégulier selon les circonstances, de l’autre ? Le contrôle institutionnel des dirigeants ne fonctionnerait plus à certains moments. Et qui déterminait ces moments, sinon le président de la république !
Richard3.com aurait plutôt tendance à accorder plus de crédit au philosophe Cornelius Castoriadis qui critique sévèrement les régimes représentatifs. En effet, quittons un moment la situation en France pour faire un parallèle avec la Belgique. Nous sommes davantage engagés dans une oligarchie, par rapport à nos voisins, en ce sens que nous n’avons plus aucun véritable pouvoir, ce dont se sont aperçus les Gilets Jaunes belges.
C’est affligeant à quoi et pour qui le gouvernement Michel travaille. Le seul remède serait une démocratie directe. Car ceux qui aspirent à prendre la suite du calamiteux Michel feront de la même politique, présentée autrement, mais aussi suspendue aux sautes d’humeur du CAC 40, des Bourses et des caprices de Donald Trump, que le prédécesseur !
Une réelle démocratie devrait être individuelle et collective, ce qui signifie une égalité politique et économique de haut en bas de la société.
Par le passé, j’ai commis un article sur l'autogestion « de la production par les producteurs » dans la revue de la Fondation Renard au temps où son initiatrice était Maryse Ockers, à la FGTB de la place Saint-Paul à Liège. Je n’avais pas lu Castoriadis, et cependant, avec toute la gauche, sauf déjà l’aile marchande du PS, on considérait que toute inégalité économique se répercute comme inégalité politique.
Ce n’est pas l’avis de Paul Ricœur, le philosophe chouchou d’Emmanuel Macron. Ricœur voit dans la société démocratique des contradictions d’intérêt, une société divisée en train de fonctionner dans l’expression de ces contradictions, qui débat en vue d’arriver à un arbitrage.
Marx fustige le droit dans la plupart des démocraties à laisser s’exprimer les égoïsmes, ce qui détermine la société à se construire en classe sociale aux intérêts contradictoires (c’est notre société actuelle). « C’est le droit de l’individu limité à lui-même. » L’application pratique, c’est le droit de propriété privée, qui va bien au-delà du droit d’être propriétaire de sa maison, car elle inclut aussi la possibilité d’être propriétaire de celles des autres. C’est ce que Marx appelle « Le droit de propriété… qui est donc le droit de jouir de sa fortune et d’en disposer à son gré, sans se soucier des autres hommes, indépendamment de la société ; c’est le droit de l’égoïsme. »
Comme Marx, Cornelius Castoriadis, Jacques Rancière, la contemporaine Fleury, je considère les démocraties représentatives « pseudo-démocratiques ». Le peuple est dépossédé du pouvoir politique effectif, détenu par une petite minorité d'individus, formée par les supposés représentants des électeurs, les experts et les courants financiers influencés par les holdings.
D'Abraham Lincoln « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple », c’est vraiment le mouvement des Gilets Jaunes qui l’incarne le mieux, sauf qu’il n’est pas au gouvernement. Tout l’enjeu est de savoir s’il y sera un jour, afin d’écrire une nouvelle page d’un peuple qui aspire tant à la démocratie, qu’un jour il finira par l’obtenir.

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