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Du faux au vrai repentir.

La présentation des excuses est à la mode. C’est inutile de revenir sur cet engouement d’une haire morale que l’on s’inflige à titre personnel pour des crimes que l’on n’a pas commis. Le leitmotiv, la repentance, est complètement à côté de son sens biblique. Pour les religions, la repentance est un sentiment profond de l’âme qui passe un jugement sur elle-même et se désiste de la voie sur laquelle elle se trouvait engagée ; c’est un changement de façon de voir, de raison et d’intention (1).
Or, en passant du colonialisme honteux à une forme de relations commerciales, on ne peut pas dire que l’État belge se soit désisté de la voie sur laquelle le colonialisme nous avait engagés, c’est une autre manière de faire du colonialisme tout au plus.
Aussi la lettre de Philippe et de Sophie Wilmès le jour suivant sont d’une rare hypocrisie.
L’indépendance du Congo, est un mouvement panafricain contre la domination coloniale qui n’a pas résolu le problème de fond, à savoir l’extraction des minerais par une main-d’œuvre locale aux fins d’enrichissement d’autrui.
Pour Kwame Nkrumah, Franz Fanon et Patrice Lumumba, le colonialisme était un système de domination qui devait prendre fin. La Belgique a semé de nombreux obstacles pour entraver la réelle indépendance du Congo.
Kwame Nkrumah a fait le compte : la Belgique s’est préparée à affaiblir économiquement à son profit le futur Etat congolais indépendant en sortant 464 millions de livres durant les 5 années précédant l’indépendance et laissant de cette manière un déficit national de 40 millions de livres au moment de l’indépendance.
Les artistes qui peignent les statues de Léopold II au minium se sont trompés de modèles. Il aurait été plus adéquat de relever les noms des administrateurs des différentes banques belges de l’époque précédant l’indépendance et voir si, dans ces notables, il n’en était pas l’un ou l’autre à avoir un square à son nom ou une statue entre deux bosquets d’un parc.

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Frantz Fanon, né à Fort-de-France le 20 juillet 1925 et mort le 6 décembre 1961 à Washington, aux Etats-Unis, était psychiatre, essayiste et militant anti-colonialiste. Il est connu pour ses œuvres traitant du racisme et du colonialisme, notamment Peau noire, masques blancs (1954) et Les damnés de la terre (1961). Il a dénoncé le rôle du gouvernement belge, par ailleurs soutenu par la Fédération Rhodésie-Nyassaland (Etat appliquant l’apartheid) de fournisseur d’armes en vue de la sécession du Katanga, province à l’est du Congo, riche en matières premières. Franz Fanon considérait qu’un Congo unifié, en opposition à une sécession soutenue par la Belgique, avec à sa tête un militant anticolonialiste comme Lumumba, était un danger pour l’Afrique du Sud appliquant l’apartheid.
Le dossier est explosif. Ce sont les libéraux des années 60 qui montèrent la sécession katangaise qui se fit sous l'impulsion de Moïse Tshombé, l’homme de paille des multinationales. Tout s’est passé entre les deux gouvernements d’Achille Van Acker PSB-BSP PL-LP et Gaston Eyskens PSC-CVP.
Qu’est-ce que les artistes du dimanche, repentis de Léopold II attendent pour peinturlurer Achille et Gaston ?
Ah ! oui, c’est facile, on se repent des erreurs du passé pourvu qu’il soit lointain. Dans cet ordre d’idée, Nabuchodonosor n’était pas mal dans le genre. Les Iraniens plutôt que se monter le bourrichon contre Donald trump pourraient, pour apaiser les colères, se repentir des crimes horribles de leur grand ancêtre Nabucho !
A la conférence panafricaine en 1958 à Accra au Ghana, Patrice Lumumba, futur Premier ministre du Congo indépendant, était un militant irréductible contre la domination coloniale belge. Il avait réussi à unifier le pays. Je salue au passage les universitaires liégeois qui ont aidé Lumumba premier ministre, et parmi eux Maryse Hockers dont la mémoire est chère à mon cœur. Ceux-là sont les vrais repentants.
Ils ont relayé la volonté de ne pas oublier la souffrance de la population africaine ayant subi les travaux forcés, les mains coupées, etc. par les Etats colonisateurs.
En 2020, la Belgique enferme encore la RDC dans le rôle de fournisseur des matières brutes.
Le faible niveau de développement de la République démocratique du Congo (RDC) ressort de la pensée libérale dominante.
La sous-alimentation, le manque d’accès à l’eau potable, à l’électricité, aux soins de santé sont la conséquence d’une domination violente de la Belgique dans les échanges avec la RDC.
Le développement requiert de modifier ce rapport inégal. Cela serait de la vraie repentance.
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1. Encyclopédie biblique (1974) : Marc 1.4, Luc 3.3 ; 8 et 15, etc.

Commentaires

Très bon papier, bien salutaire en ces temps d'hypocrisie. Où l'hypocrisie cache aussi bien le racisme, l'exploitation coloniale et néo-libérale que la violence de la répression des mouvements sociaux sous prétexte d'épidémie.

Petit bémol sémantique
: "province à l’est du Congo" ... ttttt le Katanga est une province de l'Est du Congo, ou une province dans l'Est du Congo. "À l'Est" signifie en dehors du Congo.

Excellente réflexion. "À l'Est du Congo" n'est pas à proprement parlé ce que j'ai voulu dire. Vous avez rectifié pour moi. Merci.

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