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Un Premier Mai Le Chapelier.

Pour les suborneurs des Travailleurs, la Covid a avantageusement fait renaître la loi Le Chapelier interdisant tout groupement professionnel, que ce soit les gens de métier, les ouvriers ou les apprentis. Cette loi s'inscrivait dans une volonté de s'affranchir des groupes de pression qu'étaient devenues les corporations et les guildes sous l'Ancien Régime ; mais elle se concentra sur les associations d'ouvriers, interdisant de fait les syndicats ou autres revendications collectives.
C’est ainsi qu’à Liège, les relieurs et les typographes s’unissent aux alentours de 1845 dans une association mutuelliste qui était en réalité un syndicat (le premier de Belgique), puisqu’il avait surtout la faculté de secourir les ouvriers en grève.
La loi Le Chapelier a été abrogée en deux temps, le 25 mai 1864 par la loi Ollivier, qui abolit le délit de coalition, et le 21 mars 1884 par la loi Waldeck-Rousseau, qui légalise les syndicats. La Wallonie pour des raisons de proximité avec la France dans ces premiers pas d’une Belgique artificielle appliquait la loi française, seul le drapeau changeait.
Tout cela pour écrire qu’en 2021, la loi Covid-Le Chapelier va permettre aux libéraux de dormir sur leurs deux oreilles.
Et quand bien même, on serait hors épidémie, la société capitaliste a bien joué son coup dépossédant les travailleurs de base de leur savoir-faire en confisquant les techniques, les mettant dans les mains de leurs ingénieurs. Il suffisait ensuite de morceler les tâches pour les rendre simple et à la portée de tous (behaviorisme). Décerveler les gens au travail et leur enlever le pain de la bouche en diminuant les salaires, fut chose aisée, puisque toutes les productions aujourd’hui, en apprentissage rapide, sont à la portée de n’importe qui.
La population ouvrière étant devenue « n’importe qui », on a fait du n’importe quoi avec elle. Et ça va de pire en pire. C’est à l’échelon de la planète qu’on met aujourd’hui l’ouvrier en compétitivité.

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Comme le savoir-faire n’existe plus, reste le savoir-rester dans l’emploi. Ce n’est pas une mince affaire, tout le monde pouvant remplacer tout le monde.
La société se divise dorénavant en deux catégories. La première, la plus nombreuse regroupe l’essentiel de l’humanité. C’est un gaspillage fou des intelligences qui sont niées, abandonnées, voire détruites sciemment au profit d’une catégorie tellement minuscule qu’on la distingue à peine dans la multitude. C’est elle qui conserve les savoirs dans des laboratoires ou des ateliers pilotes, concentrant les recherches et multipliant les brevets. C’est elle aussi, qui promeut quelques individus ayant valeur d’État et dormant sur des monceaux d’or.
L’exemple d’actualité, c’est l’immense fortune nouvelle des sociétés se partageant les brevets des vaccins contre la Convid-19. Voilà mise à la vue de tous une des horreurs du système capitaliste, car les vaccins devraient être produits par tout qui peut les produire sans autorisation des propriétaires des formules, dans le respect des normes de sécurité, évidemment.
Cette diffusion sans entrave des vaccins saute aux yeux de tous, sauf d’une petite minorité, celle qui a tout et ne veut rien lâcher.
Ce premier mai de la double crise celle de l’épidémie, mais encore celle du capitalisme, latente depuis deux siècles, ne sera pratiquement pas célébré par des cortèges et des discours.
Je pense même que sans la loi Covid-Le chapelier, les cortèges et les discours auraient encore perdu des processionnaires et des discoureurs, à cause de l’étouffement du peuple par les élites.
Quand on n’a plus de savoir-faire, on n’a plus de revendications, en même temps qu’on n’a plus de tribune pour s’exprimer et sur quoi le ferait-on ?
Mais, ce n’est pas parce que la plaie est dorénavant cachée que le remède n’en est pas moins évident.
Karl Marx, Proud’hon, Babeuf, Jaurès, Bakounine, Lénine, Trotsky, Guevara, jusqu’aux héros de la Commune de Paris, ces ouvriers communards parisiens massacrés par la bourgeoisie capitulant devant l’ennemi en 1871, non, ils ne sont pas morts pour rien. Jusqu’au souvenir de la grande grève de 1961 à Liège, au cours de laquelle on compta trois morts parmi les grévistes, rien ne sera oublié et tout, un jour, peut-être plus proche, devra se payer. Le peuple se comptera, tandis que les traîtres se rangeront dans l’autre camp.

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