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On pique gratis !

Le premier à parler de la gratuité du vaccin fut Xi Jinping. Devant la propagation du Covid-19 à d’autres continents, l’oncle Xi rassura les pays pauvres, surtout africains. La chine allait sauver tout le monde.
D’abord, il a étonné l’Occident en construisant un hôpital en dix jours. Puis, le président à vie chinois a changé d’avis. De la piqûre gratis, il en a fait un argument commercial. Je te vaccine tant de personnes à condition que tu me concèdes une exploitation minière, etc. Il n’était pas le seul philanthrope. A l'été 2020, il faisait des prosélytes. Dans la société nouvelle qui allait naître de ce fléau, les vaccins ne pouvaient être que des biens publics mondiaux.
Emmanuel Macron, qui n’en rate aucune pour se faire valoir à bas coût, s’interrogeait devant les caméras : « Serons-nous prêts, lorsqu’un premier vaccin [contre le Covid-19] sera mis sur le marché, à en garantir l’accès à l’échelle planétaire et à éviter à tout prix le scénario d’un monde “à deux vitesses”, où seuls les plus riches pourraient se protéger du virus et reprendre une vie normale ? ».
Les gens de France Inter pleuraient d’émotion dans les studios.
Les effets assurés passés, les promesses furent oubliées.
On se demande si le MR en s’attachant Nadia Geerts ne va pas l’utiliser façon « mème » à l’américaine, l’épaule hors Crop top pour vacciner à l’aise, en démonstration permanente ?

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Le 18 janvier 2021, le directeur général de l’OMS dressait un constat accablant : « Plus de trente-neuf millions de doses de vaccin ont maintenant été administrées dans au moins quarante-neuf pays à revenu élevé. Seulement vingt-cinq doses ont été administrées dans un des pays aux revenus les plus faibles. Pas vingt-cinq millions ; pas vingt-cinq mille ; seulement vingt-cinq. » Il évoquait la probabilité d’un « échec moral catastrophique ».
En ce mois de juillet, certains pays comme le Congo Kinshasa, notre ancienne colonie, n’est nulle part dans la vaccination.
L’objectif de l’OMS était très ambitieux : fournir deux milliards de doses d’ici à la fin 2021. Le pool d’accès à la technologie de la vaccination contre le Covid-19, qui aurait dû garantir le partage de la propriété intellectuelle, des connaissances et du savoir-faire nécessaires pour produire des vaccins à grande échelle, est, à cette heure, une coquille vide. L’OMS évoque désormais l’échéance 2022, voire 2024…
La realpolitik, celle du pognon et du biseness, l’a emporté au profit des multinationales du médicament. La loi du capitalisme néolibéral la socialisation des pertes et la privatisation des profits, a joué à plein. Les laboratoires ont été subventionnés à coups de milliards d’euros par les États. La Commission européenne a versé plus de 2 milliards pendant la mise au point des vaccins pour la recherche et le développement puis la production massive des doses. Rien n’y fait, les entreprises conservent la haute main sur les brevets, négocient âprement les prix avec les États et restreignent les dons et les reventes éventuels aux pays en développement. Selon la secrétaire d’État au budget, Eva de Bleeker, les tarifs négociés par Bruxelles iraient de 1,78 euro pour AstraZeneca à 10 euros pour CureVac et 14,68 euros pour Moderna.
La responsabilité juridique des entreprises est restreinte au minimum en cas d’effets secondaires, qui seraient assumés par les États signataires.
À ces contrats invraisemblables s’ajoute un affrontement géopolitique entre les nations pour le développement, la fabrication et l’accès aux précieux vaccins.
On a même vu Boris Johnson organiser une campagne de vaccination dynamique, mettant à mal l’argument d’un Brexit catastrophique par l’Union européenne.
On comprend que les populations des pays en développement ne soient plus une priorité, dans la chasse au beau pognon vite ramassé dans cette pétaudière. Les sociétés pharmaceutiques s’agrippent à leurs brevets. Les mécanismes C-TAP et Covax ne fonctionnent pas. À l’intérieur de l’UE, les premières livraisons ont révélé des inégalités flagrantes : l’Italie a reçu 9 750 doses, la France 19 500 et l’Allemagne 151 125 (4). Même ramenés à la population respective de ces pays, ces écarts demeurent inexplicables et semblent suggérer que certains sont plus égaux que d’autres.
Garantir l’égalité de la valeur des vies entre le Nord et le Sud impliquerait de revoir de fond en comble les règles du marché pharmaceutique.
Pourtant, certaines dispositions sur les droits de propriété intellectuelle (Adpic), qui normalement durent vingt ans, permet d’y déroger dans « des situations d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence ou en cas d’utilisation publique à des fins non commerciales. Et ce sans autorisation du détenteur du droit… sauf que les sociétés pharmaceutiques pourraient lever une armée d’avocats et, de recours en recours, remettre l’urgence à dix ans par les tribunaux.
L’économie du libre-échange chère à Georges-Louis Bouchez, n’a de libre que les pouvoirs exorbitants que les États ont concédés à l’industrie pharmaceutique.

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