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Mais quelle horreur !

- Je viens de faire un rêve horrible ;
- Quoi ?
- Horrible, je te dis. Franchement l’humanité…
- Quoi l’humanité ?
- Je n’en reviens pas encore que je puisse rêver des choses pareilles.
- Quelles choses ?
- Attends que je trouve un mot. Oui ! Abject…
- Qu’est-ce qui était abject ?
- Et cet homme fou, avide de désir.
- De désir pour quoi ?
- Il y avait de tout dans cette abomination : des artistes, des hommes politiques…
- C’était une émeute ?
- On piétinait des enfants, et puis, non, je ne peux pas…
- Qu’est-ce que tu ne peux pas ?
- Je ne peux pas je te dis, c’est au-dessus de mes forces.
- Tu ne peux pas quoi ?
- Dire ce qu’ils te faisaient.
- Comment cela ? A moi ?
- Cela dépasse l’imagination.
- Pourtant tu les as vus dans ton rêve ?
- Comme je te vois.
- Et tu ne peux pas me dire ce qu’ils me faisaient ?
- Non, puisque cela dépasse l’imagination.
- La tienne est dépassée aussi ?
- Personne ne serait capable.
- Mais à la fin, que faisaient-ils de si abominable ?
- Et cette odeur, cette pestilence… J’en frémis encore.
- Il y avait des cadavres pour que ça sente si mauvais ?
- Ce brouillard de cauchemar, je le sens toujours sur ma peau.
- C’était un accident de la route dû au brouillard ?
- Mais non, voyons. Qu’est-ce que tu vas chercher là ?
- J’y suis j’étais en enfer.
- Tu as déjà vu du brouillard en enfer ?
- Oui, de chaleur ?
- Ce que tu dis n’est rien à côté de ce que j’ai vu.
- Qu’as-tu vu à la fin ?
- Non. Non. Mille fois non. C’est impossible.
- Pourquoi tu m’en parles alors, si c’est pour ne rien dire ?
- Il fallait que je t’en parle.
- T’avais reçu un ordre dans ton cauchemar ?
- Pire. Et tout ce sang, ces cris, ces pleurs !
- Un ordre de qui ?
- De personne voyons. Ils ne faisaient pas attention à moi.
- Tu avais un rôle à jouer ?
- C’est secret. C’est un voile noir sur ma conscience.
- J’ai été violée ? Tu n’as pu intervenir ?
- Là, tout de suite ! C’était autre chose, tellement affreux.
- Ils parlaient tes bonshommes ?
- Ce n’étaient pas des bonhommes. Des choses grouillantes avec des visages connus.
- Oui. Et alors ?
- Non, je ne dirai plus un mot.
- Mais tu n’as rien dit.
- Ne m’en demande pas plus.
- Mais…
-Non, c’est inutile.
- Bon !...
- Tu es toujours en pantoufles !
- Comme tu vois.
- N’oublie pas qu’on doit aller chez Mailleux chercher un lit pour la petite.
- Un lit pour la petite. Mais on n’a pas d’enfant !
- Si, on va en avoir un !
- Mais tu sais bien que je suis stérile !
- Mais dans mon rêve, Louis Michel ne l’était pas !

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